lundi 9 décembre 2013

L'Inde éternelle...

Souvent, les gens qui aiment l'Inde ne veulent pas entendre parler des castes ou des violences faites aux femmes. Comme si ces "mauvaises vibrations" étaient de mauvais augure. C'est exactement la raison pour laquelle on chasse souvent les veuves de leur maison : elles portent malheur. On emmène mémé à la foire, ou bien en voyage de train, et on oublie de la rappeler quand on repars. Rien de plus banal. 
Voyez ce documentaire. Je sais bien que ce n'est pas très joyeux, mais c'est ainsi. Je ne comprends pas comment les gens qui cherchent l'"Éveil" peuvent chercher à fuir le réel. 
J'ai vécu plus de cinq années en Inde, dans toutes les régions et tous les milieux, et je confirme que ce qui est montré correspond bien à la situation. A la fin du film, il est question des veuves à Vrindâban, le "village" de Krishna. Je me souviens d'avoir visité ces parcs à veuves et d'avoir passé des après-midi à leur côté, dans des temples, tandis que je lisais et qu'elles mendiaient. Un jour, je suis entré dans une ruine. En m'accoutumant à l'obscurité, j'ai aperçu des formes dans les ténèbres. C'était des vieilles. Nues, telles des créatures préhistoriques, avec quelques haillons. Une étable à femmes. 
L'Inde n'est pas le pays de la Tradition Éternelle ou tout le monde est heureux. Contrairement aux fantasmes de Guénon et de ses (parfois sinistres) aficionados, l'Inde réelle offre un visage cru, chaotique, ambigu, fragile, tourmenté, loin de l'équilibre du dicton platonicien "Une place pour chacun et chacun à sa place". Les Indiens n'ont jamais formé une société heureuse. Et c'est bien pourquoi ils n'ont cessé de chercher la sortie !
L'Inde et l'hindouisme sont mysogynes. Il y a bien sûr le tantra, les cultes shâktas et kaula. Mais ce sont des exceptions. Le dharma "éternel" le dit clairement : 

"Jour et nuit, l'homme doit veiller à ce que les femmes (de sa maison) ne soient pas indépendantes, car elles sont attachés aux plaisirs des sens. Les hommes doivent donc les garder sous contrôle. Enfant, elles dépendent de leur père. Jeunes, elles dépendent de leur seigneur (de leur époux). Vieilles, elles dépendent de leurs fils. Une femme n'a pas le droit d'agir de sa propre initiative." (Mânava-dharma-shâstra, 5, 147-149). 


7 commentaires:

  1. Pas mieux dans le bouddhisme. L'aspiration de devenir un bouddha ne peut aboutir tant que l'on est une femme. On peut être une bodhisattva femme - et c'est vraiment très chouette que ce que fait Tara - mais pour devenir un bouddha il faut un pénis (et en parfait état de marche), va comprendre...

    (2) The male sex (li"ngasampatti): For one who has attained to the human state, the aspiration only succeeds when made by a man, not when made by a woman, eunuch, neuter, or hermaphrodite. Why? For the aforesaid reason (i.e., because the Buddha is always of the male sex), and because there is no fulfillment of the required characteristics (in these other cases). As it is said: "This is impossible, bhikkhus, this cannot come to pass, that a woman might become a perfectly enlightened Buddha" (A.i,28).

    http://www.accesstoinsight.org/lib/authors/bodhi/wheel409.html

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  2. Merci pour ce rappel qui sonnera le glas je le souhaite de bien des illusions.

    Amor Fati. Nietzsche signait ainsi.

    Et moi aussi, ce qui signifie "amour des fait"s et non des fées et des elfes dont l'Inde mythologique est peuplé dans bien des imaginaires : Amour de la Réalité. De ce qui est.

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  3. Bonsoir David,
    Bonsoir Hridaya artha,

    Je suis surpris par ce que Hridaya artha avance : dans le bouddhisme, il faudrait être un homme pour devenir un bouddha.

    Est-ce le cas dans tous les courants du bouddhisme ? Trouve-t-on cette idée dans le dzogchen, dans le mahamudra , dans le ch'an, dans le zen ? Et quid du Theravada ?

    Bien à vous,

    L'idiote

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  4. Idiote ou manifestation de Târâ ? :)

    Dans le Theravâda et le Mahâyâna, point d'éveil pour les femmes. Sauf exceptions (Târâ par exemple), Bouddhas qui se manifestent dans un corps de femme "par compassion sans limites"...
    Dans le zen, je crois que c'est un peu comme dans le Mahâyâna.
    Dans le vajrayâna, c'est plus ambigu. Il y a les deux tendances. Il existe quelques rares instructions de yoga sexuel pour les femmes, mais ce sont encore des exceptions. Or, sans ce yoga, point de Bouddhette. Euh, d'ailleurs le mot ne se trouve jamais au féminin.
    Mais il y a, dans les bouddhismes tantriques, des symboles féminins, bien sûr. Et quelques femmes-bouddhas, comme Séra Khandro... mais quant on lit sa biographie, on s'aperçoit qu'elle a été quand même utilisée par les hommes. Les hommes préfèrent les bouddhettes empaillées ou en statues, plutôt qu'en chair et en os.
    Au Tibet, le courant le plus ouvert me semble être celui des ngakpas (tântrikas aux cheveux longs) qui envisagent le couple comme une voie vers l'éveil.

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  5. Chère I.
    Ce n’est pas qu’il faut être un homme pour devenir un Bouddha, mais plutôt qu’un Bouddha est un mâle. C’est « le bouddhisme » qui avance cela, moi je préfère garder la paix dans le ménage.

    Le corps d’un Bouddha est paré de trente-deux marques majeures et une des marques est le sexe caché dans une gaine. Selon un design de Philippe Starck je crois. Trêve de plaisanterie. Un Bouddha est un genre de messie qui se produit à certaines périodes. Il donne alors le La de l’époque, appelé Dharma, et en suivant celui-ci, chacun peut atteindre la libération.

    Il y a différents degrés de libération possibles selon les véhicules. On ne peut pas vraiment dire que le Bouddha soit un degré ou niveau. Ce qui fait qu’un Bouddha, un vrai, soit un Bouddha est qu’il arrive à une certaine période où il n’y a plus de Bouddha et qu’il enseigne un Dharma propre à cette période. Un Bouddha est un peu un chef d’orchestre cosmique et sa baguette est le Dharma. Nous sommes actuellement sous le règne de Sakyamouni. Même dans les autres véhicules bouddhistes, c’est toujours lui qui se manifeste comme tel ou tel Bouddha spécifique, enseignant tel sūtra ou tel tantra. Ceux qui ont de la dévotion et une vue pure peuvent dire que leur maître est un Bouddha (et j’espère qu’ils en seront richement récompensés dans une vie à venir), mais techniquement cela n’est pas vrai bien sûr. Ou c’est vrai dans le sens qu’au fond de nous-mêmes, chacun est un Bouddha. Donc on peut considérer soi-même et tous les autres comme des Bouddhas. Si on y arrive, on n’a pas besoin d’attendre pour être richement récompensé.

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  6. Merci à vous pour vos réponses !

    Hridaya artha, au vu de votre dernier commentaire, je suppose qu'il faut donc nuancer (voire reformuler) votre premier commentaire qui commence par ceci : "L'aspiration de devenir un bouddha ne peut aboutir tant que l'on est une femme".


    Par ailleurs, y aurait-il l'une ou l'autre lecture que vous pourriez me recommander sur le même sujet ? Pour info, je possède déjà l'ouvrage de Bernard Faure, "Sexualités bouddhiques".

    Bien à vous,

    L'idiote

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  7. Chère I.

    Oui, vous avez raison. Tant qu'on se pense homme ou femme ou quoi que ce soit, cette aspiration ne peut aboutir. Et après tout, qu'est ce que j'en sais ? :-)

    Pour la lecture, j'ai vu récemment la sortie d'un nouveau livre en anglais qui avait l'air intéressant, mais que je ne retrouve pas de si tôt. Je reviendrai si je le retrouve.

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