jeudi 30 octobre 2014

L'individu est-il une illusion ?


Il y a un seul moi : conscience simple, sans forme.
Quand je m'identifie aux pensées, je me construis un moi factice.
Mais quand je sais que ce moi factice est un personnage assumé par le vrai moi, ce moi artificiel ne disparaît pas. Peu à peu, il se simplifie, à l'image d'un vitrail qui laisse passer un peu plus de lumière.

Il n'y a qu'un seul "je" : conscience simple, sans visage.
Mais il/elle assume tous les visages.
Et chaque visage est unique. Donc précieux. Irremplaçable.

Chaque individu est donc à la fois l'être infini qui joue, par amour, à se prendre pour une infinité de personnages, et un personnage unique..
Quand je m'identifie à un personnage dans l'oubli de ma vraie nature, alors ce personnage est une calamité.
Mais quand je me reconnais comme conscience au-delà de tout personnage, alors ce personnage est une incarnation de l'infini, qui peut évoluer à l'infini.

Le "moi" est comme le reste : perçu comme séparé des autres et de la source, il est maudit. Reconnu comme manifestation de la source, il est béni.

Le point de fusion de la conscience infinie et du personnage est le cœur, la pointe de l'âme, la source de vie au centre de la poitrine. Quand la volonté s'abandonne et se laisse emporter dans la volonté qui est le cœur, qui est la source, l'individu est peu à peu transmuté.


mardi 28 octobre 2014

Se laisser couler



Nous allons vers notre centre.
C'est inévitable.
Toutes les rivières coulent vers la mer.
Toutes les vies vont vers la source de la vie.
C'est la voie du désir aveugle.
Laissons tomber l'observation des pensées, des sensations...
Laissons-nous couler au fil de notre élan vital,
Comme une brindille emportée par le courant.
C'est la voie du bien-être :
Nous avons un instinct du centre en nous.
Il suffit d'épouser nuement
Notre propre volonté
Pour qu'elle se perde en l'élan
En lequel toutes choses naissent.
Il n'y a pas de voie plus courte ni plus savoureuse.

La rivière se perd comme rivière,
Mais se trouve comme océan.
Ce silence n'est pas un néant,
Mais un chant.
Une sorte de choeur.
Une fontaine de vie
A laquelle on s'abreuve
Et dans laquelle on n'aspire qu'à se noyer
Une fois goûtée.
Les mystiques chrétiens l'appellent
"La connaissance amoureuse".
Tout perdre,
C'est tout gagner
Tout laisser,
C'est tout recevoir,
Mais cette mort n'est pas possible par un exercice.
Plutôt, on découvre en soi un point de pure félicité.
On y vient, y revient
Et l'on s'y ensevelit.
On s'y laisse ensevelir.
Et ce comble de l'impuissance
Est le prélude au comble de la liberté.

Madame Guyon dit :

"Ici tout est Dieu : Dieu est partout en tout ; et ainsi, cette âme est égale en tout. Son oraison est Dieu même, toujours égale, jamais interrompue..."


dimanche 26 octobre 2014

Le miel de la non-dualité

Je publie un petit poème didactique traduit du sanskrit, Le Miel de la non-dualité. Il pointe vers notre vraie nature et défait nos croyances erronées. Limpide et parfumé comme un bon miel. Le livre comprend la traduction du poème et quelques commentaires simples. L'enseignement s'achève en cette certitude :

"Je suis l'immensité
En qui les errements
Du monde et de l'individu,
Du maître et du disciple,
On complètement cessé.
Je suis spontanément réalisé,
Je suis ma propre preuve,
Plénitude  parfaite
Sans commencement ni fin".



Le livre est disponible en format numérique sur Amazon et 

sera bientôt disponible en format papier.

samedi 25 octobre 2014

Essayons une autre approche



On essaie d'être, mais on retombe dans l'avoir.
On essaie le silence, mais on se laisse emporter par les pensées.
On essaie l'instant présent, mais on se fait reprendre par le les espoirs et les craintes.
On essaie d'être en pleine conscience, mais on sombre dans l'inconscience.

Essayons autrement :


Essayez de ne pas être.

Essayez de retenir une pensée.

Essayez de ne pas être présent.

Essayez de ne pas être conscient.


Que se passe-t-il alors ?

vendredi 24 octobre 2014

Sans cela, même le meilleur est insipide



Sans la Présence, même le bonheur est sans joie.
Avec la Présence, même la souffrance est pleine de joie.


Un Cachemirien dit :


Là où même les souffrances tournent au bonheur,

Où même le poison se change en nectar

Et où le cycle du monde devient libération,

Là est le chemin de ce Bienfaisant.




(Guirlande d'hymnes à Shiva, XX, 12, par Utpaladeva

vers l'an 1000 au Cachemire).


jeudi 23 octobre 2014

Je suis un seul... mais pas seulement !



Je suis l'espace 
En lequel brille le corps.
"Je suis"
tel un soleil.

Quand je m'identifie seulement au corps, 
je suis un individu séparé, 
avec des hauts et des bas relatifs.

Quand je me reconnais comme conscience , 
vie de tout et de tous, 
"Je suis" le corps qui rayonne dans l'espace, 
sans limites ni but. 
Elle (!) irradie tous les possibles, 
parfait bien-être, amour et joie,
Reliée à tout et à tous.



mercredi 22 octobre 2014

Quand l'Orient parlait à l'Occident

Poséidon du Gandhâra

Les philosophes occidentaux ne s'intéressent guère aux philosophies nées en Inde. Non seulement le grand publique ne lit pas les textes, même quand ils sont traduits depuis des décennies, mais même ceux qui font profession de passer les préjugés au crible de la raison semblent incapables de se débarrasser de leurs préjugés sur l'Inde. Pour mes collègues professeurs, il n'y a pas de philosophie en Inde, mais des "sagesses", d'ailleurs difficilement accessibles aux "Occidentaux", trop rationalistes et peu accoutumés aux délires orientaux... Malgré le livre de Roger-Paul Droit et les centaines de publications, rien n'y fait : les manuels de philosophie continuent de sortir sans mentionner aucune philosophie originaire de l'Inde. 
Rien ne change. Étonnant non ?

Du côté indien, on est souvent plus curieux. Les universités indiennes enseignent les philosophies de l'Occident. Et traduisent des textes.

Voici une traduction en hindî de la République de Platon, peut-être le texte le plus important de la philosophie "occidentale" :
Nāgarikī (plātona kī politiyā kā hindī anuvāda) par Rājendra Svarūpa Bhaṭanāgara
नागरिकी (प्लातोन की पोलितिया का हिन्दी अनुवाद)- A Translation of Plato's Republic

La République lue en français :


Ces exercices de traduction sont très intéressant, car il s'y confirme combien le sanskrit et autres langues du Nord de l'Inde sont proche du grec. La séparation entre "orient" et "occident" est récente : une conséquence des invasions musulmanes. Mais jusqu'au VIIe siècle, il n'y avait qu'une seule culture de l'Inde à l'Europe, un flux d'échanges permanent. Par exemple le manichéisme proposait une synthèse des enseignements du Christ et du Bouddha. L'art "gréco-bouddhique" du Gandhara (actuel Pakistant et Afghanistan) témoigne assez que les Grecs ont dialogué avec les Indiens. Les Questions de Milinda, mettent en scène un moine bouddhiste et un roi grec, Ménandre. 
Un doc sur le Gandhâra :

lundi 20 octobre 2014

dimanche 19 octobre 2014

Pourquoi cette souffrance ?

Y a-t-il un lien entre capitalisme (l'argent d'abord) et spécisme (les animaux vivent pour nous, pour notre usage) ?

Une question qu'explore en passant ce second épisode d'un documentaire sur le capitalisme :


A mon sens, il y a aussi un lien entre spécisme, racisme, sexisme d'une part, et les religions fondées par Abraham (judaïsme, christianisme, islam), de l'autre. Mais il faudrait aussi examiner les liens entre taoïsme et environnement en Chine, et le rapport entre hindouisme et maltraitances, en Inde. Sans tomber dans un pseudo jugement à l'emporte-pièce du genre "tout se vaut, il y a du bon et du mauvais partout".

Le culte d'un Dieu jaloux et exclusif qui aurait tout créé pour l'homme n'est-il pas l'une des causes de cette souffrance ? Accorder une dignité aux autres espèces animales, est-ce nécessairement renoncer à reconnaître la dignité de l'homme ?

Je crois qu'il y a un rapport de cause à effet entre les croyances d'un individu et ses actes. Si l'on veut comprendre la violence, il faut regarder les croyances qui encouragent ou justifient cette violence. Ne reconnait-on pas un arbre à ses fruits ?

samedi 18 octobre 2014

Muette éloquence



Laisse venir.
Laisse être.
Laisse aller.

Une clarté surgit des profondeurs, 
une présence muette qui prend les rênes.

Le mental se noie dans cette présence 
comme l'ombre dans la lumière.
Plus d'intérieur ni d'extérieur.

Par-delà tout discours,
une immensité sans visage se reconnaît elle-même,
sphère transparente 
dont le centre est partout et la circonférence, nulle part.

Au cœur de l'espace qui enveloppe tout,
Brille un soleil relié à tout et à tous
Par des rayons limpides.



vendredi 17 octobre 2014

Pour l’expérience de soi-même



Hommage à celui qui porte en son sein 
D'innombrables triades de Puissance 
Manifestées par jeu,
Qui anéanti toute contrainte,
Lui dont la majesté est naturelle.

Hommage à l'incarnation de la félicité et de la lumière,
Qui peut être appréhendé par notre propre expérience,
Qui se tient à l'intérieur de toutes les incarnations,
Soi suprême et toujours présent.

Hommage à celui qui joue à construire le monde
Une fois devenu pur éveil (au monde),
A celui dont la nature est suprême souveraineté 
Animée par une absolue liberté.

Bien qu'il soit un
Il atteint la multiplicité
Dans la totalité des êtres,
Dans les règnes animal et végétal.

Cachant sa propre majesté,
Occulté par sa Puissance d'illusion,
Absorbé dans l'Octuple cité faite de souffle vital,
Il vient habiter dans l'individu (comme s'il en dépendait).


Cent versets pour l'expérience de soi-même
par Sillana, Cachemire (Xe-XVe siècles)



jeudi 16 octobre 2014

L'agitation des sens est-elle une entrave à la méditation ?


On s'accorde à penser que la cause du samsara
Est la dispersion des sens...
Mais pour tes amoureux
Qui ont guidé cette agitation
Vers l'intérieur - faute d'un meilleur terme - 
Cette même agitation des sens 
Alimente la grande fête de ton adoration !

Maître ! 
Puissent mes organes corporels et mentaux
Être comblés, amoureux, transparents et harmonieux 
Durant leurs activités
- Offrandes à ta Présence.

Maître !
Au sein du trésor véritable de ton adoration totale,
Pendant ces activités qui sont offrande à toi
-  Merveille ! -
L’ineffable et mystérieuse richesse
De la multitude de mes organes
Se dilate et s'épanouit...

Utpaladeva, Hymnes à Shiva, XVII, 38, 43, 44

                                        Une belle image du distingué Major Chadwick, un disciple occidental de Ramana Maharshi

mercredi 15 octobre 2014

Priorités



Quand on ne sait plus reconnaître l'essentiel, on se sent perdu, embarrassé, paralysé. On se sent écrasé par une avalanche de tâches à faire, de demandes à traiter. Mais quand on voit le plus important, on se détend, la situation s'éclaircit et l'énergie redevient disponible pour l'action.

Il en va des taches à accomplir comme pour tout. La recherche spirituelle semble compliquée quand on perd de vue le plus important. Il faut donc savoir hiérarchiser. Repérer les priorités. La priorité.

Le monde est important. Nous, les autres, tout.

Mais il y a plus important. C'est de se tenir muet. Et de voir ce qui se passe, à défaut de le comprendre.

"L'Immense est l'essence du monde. Mais le monde n'est pas l'essence de l'Immense"
Shankara

L'Immense est ce qui ne se laisse pas comprendre. Mais dans lequel on peut se laisser tomber. Et planer, voler, virevolter.

L'Hymne de la dance de Shiva (Shivatândavastotra) :

lundi 13 octobre 2014

Embrasser l'espace


Voir que personne ne voit change la personne et le monde.
Mais, à l'inverse, voir un monde différent change notre vision intérieure.

Changer le mental pour changer le monde.
Ou changer le monde pour changer le mental.

Ces deux approches se retrouvent dans toutes les cultures. Mais en général, c'est l'approche intérieure qui domine dans la philosophie, la méditation, la métaphysique et la morale, et l'approche extérieure qui domine dans la politique, l'art et la science.

Dans le tantra du corps et de l'espace, yoga non-duel du plein et du vide, ces deux approches coexistent et se combinent.

Le corps est comme un vase. Dans le cœur, il y a une lampe. Elle brille et irradie à travers les yeux. Ses illuminations fulgurent dans l'ovale du champs visuel. Le yogi voit la conscience, il/elle voit le Soi face à face, avec ses yeux de chair. L'intérieur se manifeste à l'extérieur, et en retour cet extérieur infuse l'intérieur, les deux s'interpénètrent, comme un cristal qui se dissout dans l'océan.

Interpénétration

Dans le yoga de Bhairava, l'approche intérieure s'appelle "yoga non-mental" (sanskrit : amanaska). L'approche extérieure, visionnaire, s'appelle "yoga qui sauve" ou "qui fait traverser, transcender, qui libère" (târaka).

Dans le yoga du Bouddha originel, l'approche intérieure s'appelle "larguer les amarres" (tibétain : trèkcheu). L'approche extérieure, visionnaire s'appelle "brûler les étapes" ou "passer le cap", transcender (theuguèle).

Ces yogas mettent tous deux l'accent sur le bien-être, l'absence (relative) d'effort, la relaxation, la détente, le lâcher-prise dans l'espace, la dilatation du corps tactile qui s'étale dans l'espace comme une tache d'huile. C'est la pratique principale du tantra, que j'ai décrite ailleurs et que je partage de temps à autre. Cette pratique est un immense plaisir, une joie incroyable. Quelle chance de pouvoir savourer ainsi l'espace sans aucune limite !

Ces deux approches s'opposent en un sens mais, en fait, leurs détails concrets sont à peu près les mêmes (postures, regards, suggestions sensorielles, évocations poétiques de lumière et d'immensité...). Malgré leur importance dans le tantra ancien, elles restent peu connues.
En général, on réduit le tantra à une pratique sexuelle, exclusivement tactile. Je ne nie pas que l'expérience sexuelle et tactile est importante dans le tantra. C'est indéniable. Le sexe et le langage sexuel sont omniprésents. 
Mais il existe aussi cette double approche, plutôt visuelle, cette étreinte du corps et de l'espace. Bien sûr, le côté tactile est inclus dans cette expansion. Mais dans cette pratique spatiale et visionnaire, l'accent porte généralement sur le champs visuel, et secondairement sur les sons. 

Il y a ainsi deux modèles dans le tantra : un modèle tactile et sexuel ; et un second modèle, visuel et visionnaire (à ne pas confondre avec les visualisations !).

Une exception notable est le tantra de La Roue du temps. Son yoga combine ces deux modèles : le yogi/ la yogini s'unissent à la sphère de lumière qui apparaît dans l'espace, à l'ovale translucide et parcourue de lumières diaprées que forme le champs visuel. Les instructions de ce yoga emploient à la fois le langage des visions lumineuses de l'espace, et la rhétorique sexuelle de la félicité, de l'irradiation tactile et de l'étreinte. La Roue du temps propose ainsi un nouveau modèle pour le tantra : une union sexuelle sacrée, non pas avec un partenaire visualisé, ni même avec un partenaire de chair et d'os, mais avec un partenaire visionnaire : le champs des visions qui ne sont rien d'autre que la manifestation de la Lumière consciente en sa nudité, la vacuité visible, la Mère universelle concrète.

Un livre superbe vient de sortir en anglais sur les traditions visionnaires dans le tantra bouddhiste. L'auteur fait le rapprochement avec les pratiques équivalentes du tantra de Shiva, mais sans approfondir.

Un site sur les visions spontanées, les "entoptiques", à ne pas confondre avec les hallucinations ou les rêves. En anglais mais très riche.

Une animation qui tente de montrer ce que l'on voit dans l'obscurité et dans ce yoga de l'union du regard et de l'espace. Ces nappes de lumière bleues, vertes, rouges sont le point de départ du yoga visionnaire :

vendredi 10 octobre 2014

La méditation consiste t-elle à ressentir quelque chose ?


Suite des conseils de méditation d'un moine du Grand Siècle :

"Le quatrième [défaut de la méditation] est que nous désirons Dieu, car tout désir marque en nous du vide, et de l'imperfection, et étant dans le désir, nous ne sommes pas dans la possession et la jouissance.

Donc pour remède, possédons continuellement Dieu notre bien souverain et infini, tout et uniquement présent, qui nous remplit tous de tout lui-même, et qui se donne à nous en jouissance et fruition très admirable, en tant que la condition de cette vie le peut permettre et ne veuillons jouir de lui qu'en la manière qu'il lui plaira.

Le cinquième [défaut] est, que nous jetons notre regard comme de nous-mêmes en Dieu, et par ainsi nous faisons quelque mouvement et acte propre pour tendre à Dieu.

Donc pour remède, demeurons continuellement unis à Dieu, par un regard sur lui comme sur le seul être existant, et par l'anéantissement de nous et de tous nos actes propres, comme venant de nous. Et par ainsi ce notre regard sera un regard non pas actif, mais passif et infus, tiré de Dieu hors de nous sur lui : de sorte que nous demeurerons toujours en notre rien.

Le soleil en son midi frappant par ses rayons un cristal transparent, il le pénètre intimement, et l'éclaire de toutes parts. Et par son efficace il tire de lui vers soi une splendeur réciproque, et cette splendeur réciproque du cristal vers le soleil est, non pas tant du cristal comme du soleil, lequel en frappant, pénétrant et illuminant le cristal, lui fait jeter et réciproquer cette splendeur vers soi. 

De même Dieu jetant ses regards amoureux sur l'âme, dardant ses lumières favorables sur elle, et la prévenant et comblant de ses grâces efficaces, il tire d'elle par sa vertu infinie des regards très intimes d'un amour réciproque, lesquels en vérité ne sont pas tant de l'âme comme de Dieu, lequel étant tout esprit, vie et lumière, prévient, pénètre, illumine et embrasse divinement l'âme."

Simon de Bourg-en-Bresse, Les Saintes élévations, 1657


mercredi 8 octobre 2014

L'Hymne à la forme du Sans-forme


L'existence des choses
N'est rien d'autre
Ni rien de plus
Que l'existence du Soi.
Et de même,
Leur manifestation
N'est rien de plus
Ni rien d'autre

Qu'une manifestation du Soi.

L'Illumination de l'esprit, commentaire de l'Hymne à Dakshinâmûrti

Voici la traduction inédite d'un enseignement simple, rigoureux et radical. 

Qui sommes-nous vraiment ?

Juste le corps ? Le cerveau ? Un ensemble de sensations ? Une simple construction mentale ? Un flux de pensées ? Une personnalité ? Une mémoire ? Ou un néant ?

Dans cet hymne magnifique accompagné d'un commentaire, tous les deux traduits du sanskrit, les auteurs pointent notre véritable nature et déconstruisent nos croyances erronées. 

Cette philosophie, basée sur les tantras, est celle de la Reconnaissance : nous sommes déjà ce à quoi nous aspirons, nous sommes la Source, la joie et la paix sont notre nature. Mais par négligence, nous ne le vivons pas, tels des tigres qui se prennent pour des moutons. 

Née vers l'An Mille au Cachemire, cette philosophie du tantra non-duel s'est diffusée dans le Sud de l'Inde. Ce texte en offre un témoignage éclatant.

Cette forme de non-dualisme est différente de celle du Vedânta, mieux connue en Occident. Elle n'est pas basée sur le renoncement au monde et au corps, elle est inclusive, ouverte au monde et aux expériences, elle reconnaît l'importance des émotions : tout est la Source. 

L'Hymne à la forme du Sans-forme



Voici cet hymne chanté en sanskrit par notre groupe favori en ce domaine :




mardi 7 octobre 2014

La méditation est-elle une introversion ?



"Voici cinq défauts subtils que nous commettons, soit en nos distractions, soit en nos recueillements :

Le premier : nous contestons et combattons contre nos pensées superflues, nos distractions et nos tentations, et contre leurs objets, comme contre quelque chose de réel. Et par ainsi elles s'impriment bien souvent plus vivement dans notre esprit, et nous inquiètent davantage.

...Anéantissons toutes choses, et particulièrement nous-mêmes, dans cet abîme infini d'être, de lumière et de vie ; et ce même abîme qui anéantira nos personnes et tout ce qui est créé, dissipera et perdra soudain toutes nos distractions et tentations...

Le second est que lorsque nous nous voyons distraits, pour nous recueillir nous nous introvertissons. 
Mais premièrement l'introversion suppose l'extraversion, alors que nous devons être continuellement unis pour le total engloutissement de nous et de toutes choses dans notre grand Tout infini, le seul être existant, de sorte qu'aucune chose créée ne nous puisse distraire et désunir de lui. 
Deuxièmement, nous introvertissant, nous nous enfuyons craintivement des choses, lesquelles nous devrions généreusement faire fuir et évanouir par la vue vivre de Dieu tout présent et qui seul est vérité. 
Troisièmement, plus nous nous enfuyons par peur d'elles, comme de quelque chose de réel, et plus leurs images s'impriment dans nos esprits et nous remplissent de distractions et de tentations. 
Quatrièmement, c'est toujours à refaire, car en nous enfuyant ainsi des choses, dès que nous devons recommencer une oeuvre extérieure, nous sommes derechef distraits et abattus en cette oeuvre. 
Cinquièmement, en nous introvertissant nous nous recherchons imperceptiblement nous-mêmes et aspirons à quelque consolation sensible, comme il appert parce que nous croyons que nous ne sommes pas bien introvertis, et nous ne nous contentons pas tant que nous n'avons quelque goût et expérience sensible pour nous assurer que nous sommes unis.

Pour remède... quand nous sommes distraits, soudain relançons-nous en lui, par une foi vivre, mais simple et nue, par un nu et pur amour... comme si nous n'étions pas, et par la vue vive de Dieu comme de l'être infini et seul existant."

Suite au prochain numéro...

Simon de Bourg-en-Bresse, Les Saintes élévations de l'âme à Dieu par tous les degrés de l'oraison, 1657, chap. 24

lundi 6 octobre 2014

La conscience et le mental



"Il va de soi que le mental est aussi contingent que le corps - et les limites du corps sont évidentes : j'ai la taille que j'ai, et pas un centimètre de plus. Je peux sauter à une certaine hauteur, et pas plus haut. Je ne peux pas voir derrière ma tête. Mes genoux me font mal. 
Les limites de mon mental sont aussi claires : je ne peux parler un seul mot de coréen. Je ne me souviens pas de ce que j'ai fais à cette date en 2011, ou les derniers mots de Dante que j'ai lu, ou même les premières paroles que j'ai dite à ma femme ce matin. Même si je puis modifier mon humeur et l'état de mon attention, je ne puis le faire que dans des limites étroites. Si je suis fatigué, je peux ouvrir mes yeux un peu plus grand et essayer de me revigorer, mais je ne peux faire entièrement disparaître la sensation de fatigue. Si je suis un peu déprimé, je peux alléger mon humeur avec des pensées joyeuses. Je peux même accéder à un ressenti de bonheur directement en me rappelant ce que c''est d'être heureux - en faisant délibérément sourire mon mental - mais je ne peux reproduire la plus grande joie que j'ai jamais ressenti. Tout ce qui concerne mon mental et mon corps semble se ressentir du poids du passé. Je suis juste ce que je suis.
Mais la conscience est différente. 
Manifestement, elle n'a aucune forme, car tout ce qui pourrait lui donner forme doit apparaître dans le champ de la conscience. La conscience est simplement la lumière par laquelle les contour du mental et de l'esprit sont connus. Elle est ce qui est conscient des sentiments comme la joie, le regret, l'allégresse et le désespoir. Elle peut sembler assumer leur forme durant un temps, mais on peut reconnaître qu'elle ne le fait jamais vraiment. De fait, nous pouvons reconnaître directement que la conscience n'est jamais améliorée ou troublée par ce qu'elle connait. Découvrir cela, encore et encore, est la base de la vie spirituelle."

Sam Harris, S’éveiller (Waking Up), pp. 204-205


La conscience, cela qui voit tout, omniscient, est la Déesse chantée dans le Chant de la Déesse, dont voici quelques paroles en sanskrit et en anglais - Non pas ce qui est vu, mais cela qui voit, propre soi-même (pratyag-âtmâ) :

dimanche 5 octobre 2014

L'Aube de la joie


Dimanche matin... 
A la messe ? 
Pas tout à fait :

Au réveil, j'évoque en mon cœur
L'être du Soi, radieux
- Vérité, conscience et bien-être -
Quart (du Soi qui transcende toute expérience),
(Mais) accessible aux âmes 
Qui ont transcendé (toute expérience).
Au réveil, j'évoque en mon cœur
Le Soi inné,
Témoin des états de veille, de rêve et de sommeil profond.
Je suis cette immensité incomposée,
Et non un composé matériel !

Au réveil, je savoure mentalement
Ce qui est inaccessible au mental et à la parole,
Cette grâce dont proviennent toutes paroles,
Que la tradition dit en disant "Non, non".
Les (sages) disent qu'il est le Dieu des dieux,
Incréé, infaillible, originel.

Au réveil je salue cela qui transcende les ténèbres,
Doré comme le soleil,
Plein et parfait, royaume éternel
Nommé "Être suprême".
Ce monde entier sans exception
Apparaît dans sa Forme qui embrasse tout,
Sans exception,
A la manière dont un serpent
"Apparaît" sur une corde.

Hymne du rappel (de la non-dualité) au moment du réveil (Prâtahsmaranastotra), attribué à Shankara

Ecoutez cet hymne sanskrit chanté en sanskrit par notre groupe sanskrit favori. Idéal pour un dimanche matin !

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