jeudi 9 avril 2015

Que prouvent les preuves de l'existence de Dieu ?

A quoi bon une lampe pour éclairer le soleil ?

Voilà un grand classique, détesté par beaucoup, ignoré par presque tous. Il est étrange que ceux-là mêmes qui professent leur liberté vis-à-vis des mots s’ébouriffent à l'instant dès la mention de ce petit mot : Dieu.

Il existe plusieurs preuves, peu ou prou les mêmes à travers les traditions : des preuves logiques et des preuves empiriques, en gros.

En Inde aussi, il y a ces preuves. Par exemple, dans le Florilège de raisonnements (Nyâyamanjarî) du cachemirien Jayanta. Utpaladeva, le grand sage de la philosophie non-duelle de la Reconnaissance (pratyabhijnâ) a lui même composé une Démonstration de l'existence du Seigneur (Îshvarasiddhi) dans ce style.

Mais pour la Reconnaissance, Dieu est la conscience : évidente et pourtant insaisissable, source et tout et inatteignable par nulle créature, indémontrable et pourtant Preuve de toute preuve. Réfuter Dieu, c'est encore le prouver, comme le reconnaissait du reste Anselme de Cantorbéry, le formulateur de la très classique (mais si mal comprise !) "preuve ontologique".

Abhinavagupta résume la doctrine de la Reconnaissance à propos de la connaissance en ces verset ô combien denses, comme à son habitude et selon les canons de la tradition :

Nous célébrons ce Shiva,
maître de toutes les preuves
qui, possédées par la Science
dans la mesure où
elles sont dominées
par la vertu du Soi,
engendrent un objet de connaissance vraie,
objet qui ne cesse de dépendre de lui. 1

Abhinavagupta, Petite méditation, II, 3

"possédées par la Science" : une preuve est une preuve seulement dans la mesure où elle est "possédée" par la Science, c'est-à-dire la conscience, comme un homme est possédé par un esprit qui le contrôle. Dieu est conscience, la conscience est la Preuve des preuves. Il est donc impossible de le prouver. Et vain.

Louanges à Shiva !
Il est la Preuve même,
lui, l'Un
qui enveloppe tout sans rien exclure !
Son être même est la preuve,
le moyen de connaître vraiment 
ce monde ambrosiaque,
cette félicité
débordante de la Triade
des Puissance primordiales
qui émanent de lui ! 1

Abhinavagupta, Grande méditation, II, 3


N.B. : comme souvent, ce verset est rempli de jeux de mots, d'allusion et de doubles sens. Comprenne qui pourra. La "Triade" : désir, connaissance, action.

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