jeudi 31 mai 2018

Conférence à Nantes

Le désir est-il un obstacle à l'épanouissement intérieur, 
ou bien au contraire son moteur le plus puissant ?

J'aurai le plaisir de vous rencontrer pour une conférence à la librairie l'Autre Rive, à Nantes, ce vendredi 1er juin à 19h30
David

lundi 28 mai 2018

Les vagues des pensées...


Les vagues des pensées et des sensations
brillent sans cesse dans l'océan de la conscience.
Elles sont remémoration de ma souveraineté
présente sous toutes ces formes.

Râmeshvar Jhâ, La Liberté de la conscience, 126

Comment les pensées, les formes et les couleurs 
pourraient-elle cacher la Lumière
qui les révèle ?

Pour celles et ceux qui désirent approfondir cette approche :
Le 9 et 10 juin à Nantes 

Le 16 et 17 juin à Paris 

Du 9 au 15 juillet dans la Drôme :

Dans la joie de vous rencontrer,
David


Terre et amour


D'après Hésiode, la première naissance a été celle de Chaos :

Puis Terre aux larges flancs, 
assise sûre à jamais offerte à tous les vivants,
et Amour...

Il dit donc que, après Chaos, ce sont ces deux-là qui sont nés : Terre, Amour.

Platon, Banquet, 178b, trad. L. Robin

Chaos est Bhairava, l'unité achevée de Shiva et Shakti.

Terre est le Silence : transparence nue, absolu immobilité intérieure, le Sceau Béat de Shiva, émerveillement muet, "comme un enfant devant un tableau", vérité stable qui ne s'écarte jamais de soi, espace sans limite dans lequel tout apparaît et disparaît comme des myriades de bulles de Clairette.

Amour est le Désir : élan sauvage, ressaisissement de soi et écart de soi, tout à la fois, décalage et reprise infinies, frémissement, mouvement immobile, extase façon toupie, paradoxe de l'étonnement d'être, vertige de la perte et de la reprise, Soi-se-crée-comme-non-Soi-au-moment--même-d'être-soi...

Ainsi sur la terre "plate" (prithu en sanskrit) et déployée (prathitâ), c'est-à-dire dans l'immensité de la Lumière illuminante (prathâ), joue  Amour, le désir originel (kâma-tattva) souverain aux mille visages, fils de Pauvreté et d'Habileté, à jamais insatiable donc.

On pourrait gloser à l'infini. 
C'est ce que font tous les vivants
et même les étoiles.

dimanche 27 mai 2018

Les origines du tantra sexuel bouddhiste

Comme chacun, sait, le Tantra consiste à 1) faire l'amour sans se fixer sur la zone génitale et 2) en se retenant d'éjaculer.
Il y a des divergences sur les détails, mais en gros, c'est ça le Tantra pour la plupart des gens, adeptes ou non.


Comme je l'ai expliqué ailleurs, le tantrisme est un vaste mouvement religieux centré sur des rituels, pas sur le sexe. C'est la source de l'hindouisme et du bouddhisme tels qu'ils sont pratiqués de nos jours en Inde, en Mongolie, à Bali ou au Japon.

Il y a bien des symboles sexuels dans ces rituels, mais les pratiques sexuelles sont l'affaire de courants ésotériques à l'intérieur du tantrisme. En fait, le tantrisme est fait de traditions hiérarchisées. Plus on monte (ou plus on descend, question de point de vue), plus le sexe est présent. 
Là, il y a deux approches : le sexe plus la mort ; ou le sexe et ce qui est beau. Par exemple, dans le "shivaïsme du Cachemire", il y a le Krama, axé sur la mort, le vide et l'impur : il y a alors un yoga sexuel, mais dans une esthétique plutôt gore. Et à côté, il y a le Trika, axé sur la vie, la plénitude et la créativité : il y a aussi un yoga sexuel, mais dans une esthétique de "luxe, calme et volupté". Et ces deux approches sont combinées parfois, comme l'expir (mort) et l'inspir (vie) dans le yoga du souffle.

La source principale du "yoga sexuel" est le kaulisme, tradition ésotérique à l'intérieur du tantrisme, centrée sur l'accomplissement par le corps. C'est cette tradition, d'une richesse extraordinaire, qui nous a légué les bases du Hatha Yoga, les 7 chakras et l'idée d'un "yoga sexuel", entre autres.
Ce yoga n'est pas appelé yoga, ni tantra, mais "le premier sacrifice" ou "rituel primordial" (âdi-yâga) ou "pratique de la nuit" (nishâ-âcâra) ou "rituel secret" (rahasya-caryâ), etc.

Cependant, dans les pratiques kaula, il y a bien l'idée d'une certaine lenteur, d'une écoute, d'une sensibilité, mais rien sur la "rétention spermatique". 
Cette idée est certes répandue dans les cultures grecques, indiennes et chinoises, mais elle n'est pas spécialement tantrique. Il y a la croyance que la conservation du sperme est bonne pour la santé. On retrouve cette idée chez Platon, par exemple. Mais c'est vraiment une croyance générale et elle conduit plutôt à l'abstinence qu'à un "yoga sexuel".

 Alors d'où vient cette idée, si populaire aujourd'hui, d'un genre de yoga sexuel avec rétention spermatique ?

Du bouddhisme.
Cette religion, très puritaine, pro-chasteté et misogyne au départ, a évolué jusqu'à développer un corpus tantrique parallèle à celui du shivaïsme.

Et c'est dans ce corpus que l'on trouve les exemples les plus explicites de yoga sexuel.

Le premier exemple vraiment clair est le Guhyasamâja, daté des alentours de 750. Après des rituels et une pratique approfondie de yoga du souffle, ce tantra promet l'éveil "en six mois" grâce à une sorte de yoga sexuel intensif, pratiqué dans un palais agencé en mandala, une grande maison avec un harem ou bien, pour les yogis (on ne parle pas des yoginis) les moins fortunés, une seule femme. Le plus souvent, une prostituée, ou une jeune fille achetée à des gens de basse condition. Il n'y a pas de technique précise. 

La rétention spermatique apparaît peu à peu, mais c'est dans l'ultime grande révélation tantrique bouddhiste (avant les vagues de razzias qui seront fatales au bouddhisme) que l'on trouve une véritable théorie justifiant le yoga sexuel et la rétention spermatique.
Ce tantra est le Kâlacakra, révélé vers l'an 1025.

Dans son chapitre sur l'initiation (pas de tantra sans initiation), on trouve un discours assez détaillé sur la raison d'être de cette rétention. A ma connaissance, c'en est l'exemple le plus convaincant, alors que chez un maître du shivaïsme du Cachemire comme Abhinava Goupta, il n'y a pas un mot, pas une seule allusion.

Ce chapitre a deux commentaires en sanskrit : l'un par Vajrapâni, mais il est très bref, c'est juste une paraphrase. L'autre par Nâdapâda, alias Nâropa, plus détaillé.

Voici le premier verset sur le pourquoi de la rétention :

"De l'éjaculation (cyuti- "la chute")
naît le manque de passion (virâga).
Du manque de passion,
la souffrance (duhkha).
De la souffrance, la destructions
de l'essence vitale (dhâtu) des hommes,
et de cette destruction, la mort." (139)

L'idée de base vient de la "science de la longue vie" (âyurveda).
La nourriture ingérée se transforme en plusieurs éléments de plus en plus raffinés et concentrés en énergie vitale. L'élément ultime est le sperme, support de l'énergie vitale pure (ojas). Ce sperme se concentre dans le cerveau (la "matière grise"). Sous l'effet de l'excitation sexuelle, cette substance précieuse descend vers la zone génitale et, finalement, elle "tombe". En d'autres termes, les femmes sont des vampires qui prennent aux hommes leur vitalité.

Face à cette croyance très répandue, le bouddhisme tantrique trouve une solution originale, qui va connaître un grand succès : ni continence monastique, ni sexualité ordinaire, mais rétention (ce mot est voulu, car le Kâlacakra Tantra est en effet le premier texte à établir un lien explicite entre respiration, sperme et mental).

Mais plus profondément, ce qui est extraordinaire dans ce passage (je ne traduis pas tout), c'est que l'éjaculation n'est pas directement condamnée à cause de la perte de vitalité, mais plutôt à cause du "manque de passion" qui s'ensuit. Ce mot virâga ou vairâgya, en effet, désigne d'ordinaire le détachement. Et il est valorisé. Comme chacun sait, le bouddhisme classique est fondé sur le détachement.

Or ici, c'est au contraire le détachement qui est accusé d'être la cause de la souffrance.
Pourquoi ?
Parce que dans ce détachement, il n'y a plus de passion (râga) et donc plus de félicité (ânanda), il n'y a plus cette sensation de plaisir total (mahâ-sukha) qui, selon ce tantra et d'autres, est la seule manière d'atteindre la conscience essentielle, seule capable de nous libérer de la souffrance.

Et le tantra poursuit :

"Il faut donc s'efforcer par tous les (moyens)
de se détourner de la passion (râga)
pour l'éjaculation.
De cette façon, le yogi atteint 
le plaisir impérissable,
(délivré) des liens du samsara." (141)

L'idée est claire : il faut faire l'amour sans éjaculer, car l'éjaculation met fin au plaisir. Pour écarter toute ambiguïté, le tantra ajoute :

"Même si on est excité et avide de plaisir (kâmaka),
on se s'intéresse plus aux enseignement sur le plaisir sexuel
(kâma-shâstra) à cause du manque de passion." 142

Nâropa précise "à cause du plaisir de l'éjaculation". Comme chacun sait, l'orgasme, chez l'homme du moins, diminue fortement l'excitation. Après la passion (râga), vient le dépassionnement (virâga). Après le goût, le dégoût.

Pour éviter cela et stabiliser un état de conscience immergé dans une extase permanente, le bouddhisme tantrique prône la "rétention", grâce à des rétentions respiratoires et divers genres de crispations musculaires, sans doute à l'origine des bandhas du Hatha Yoga. Les techniques proposées sont généralement rudes, musclées, et elles visent la diffusion de la sensation de plaisir dans tout le corps.

Mais ce qui est vraiment intéressant, c'est cette idée que la passion est bonne, et que le manque de passion est cause de souffrance.

Au-delà du folklore tantrique et des croyances désuètes sur le cerveau spermatique et les femmes-vampires, il y a cette idée qu'il est possible, via une pratique, de contrer la nature pour cultiver le plaisir.
Ce qui confirme une autre idée : le bouddhisme se situe dans un mouvement contre-nature, à "rebrousse-poil" (pratiloma), ce qui le rapproche des mouvement scientistes, voire du transhumanisme.

Cette double théorie 1) souffle=mental=sperme et 2) rétention=passion=plaisir=éveil va être transmise dans l'hindouisme via un texte redécouvert récemment, l'Amrita-siddhi, source de la Hatha-pradîpikâ, elle-même source du Hatha Yoga contemporain.

Voilà, en gros, les origines bouddhistes de la croyance à l'éveil par la rétention spermatique. Et donc, du Néotantra New Age dans le dév perso.


samedi 26 mai 2018

L'éveil selon Plotin - amour et toucher


Il y a un cliché :
le christianisme aurait inventé l'amour.
L'idée est que "la sagesse grecque" (=le platonisme) aurait découvert la sagesse, l'extase de l'union avec l'Un au-delà de tout ; mais seul le christianisme aurait apporté l'amour aux hommes, accouchant ainsi de la mystique.

Tout ceci est faux, à mon sens.
Depuis trente ans que je me suis mis à l'écoute des enseignements néoplatoniciens, 
j'ai entendu dans leur bouche le même discours sur l'amour, à commencer par ceux de Platon (Phédon, Banquet) qui esquissent une voie d'amour complète.

De manière quasi systématique donc, les auteurs chrétiens ont tendance à passer sous silence l'ampleur de l'apport grec "païen". C'est évident dans le cas du Pseudo-Denys (celui de la cathédrale du 93), "père" de la mystique chrétienne. Cet auteur, peut-être un moine syriaque, a tout pompé sur Proclus, l'un des plus grands, si ce n'est le plus grand, philosophe platonicien "païen".

L'Un est l'aimé et l'amour : il est amour de soi (Plotin V, 4, 2)

Porté à l'intime de lui-même, il s'aime lui-même et sa pure clarté, et il est lui-même ce qu'il aime... son existence est son regard vers lui-même... cet acte est éternel, il est semblable à un éveil (égrègorsis) qui n'est pas séparé du sujet, un éveil et une intelligence éternelle au-delà de l'intellect (Plotin, VI, 8, 16)

C'est un "contact avec la lumière même qui fait voir" (Plotin V, 3, 17), un "toucher (épaphè) qui n'a rien d'intellectuel" (VI, 9, 10), etc.

Cet éveil, c'est comme "faire coïncider son propre centre avec le centre universel" (VI, 9, 10). Il ajoute "Celui qui a vu me comprend" (VI, 9, 9).
C'est un don de soi, une extase, une simplification, un élan vers un contact, dit-il encore.

Tout est dit.
La mystique européenne est née.

Au-delà, cette tradition converge avec le shivaïsme du Cachemire.

vendredi 25 mai 2018

Loin près


Dieu est amour
plus on l'embrasse
plus il s'échappe

Livre des XXIV philosophes

Chaque être bouge. 
Vers quoi ?
Vers son centre.
Qu'est-ce que le centre pour une chose ?
C'est son lieu naturel.
Comment sait-on que tel lieu est le centre de telle chose ?
Parce que, quand elle l'a atteint, elle cesse de bouger.
Ainsi, une pierre bouge
pour rejoindre le centre de la terre,
son lieu naturel.
Ainsi, le feu bouge
pour rejoindre le feu céleste,
son lieu naturel.
Ainsi les rivières bougent
pour rejoindre la masse océane,
leur lieu naturel.

De même, le lieu naturel de l'Âme,
sa source et son centre,
est Dieu.
Ou plutôt, Dieu est cet élan qui anime toute chose.
Chez les vivants, 
on l'appelle "amour".
C'est le lien mystérieux,
le messager.
Chaque être vivant a un instinct
vers Dieu.
C'est l'amour.
Donc, pour les vivants, 
Dieu est amour.

Comment faire ?
En se lassant faire.
C'est l'in-action divine,
l'action interne de la grâce
(parce qu'elle est sans prix)
sur l'intérieur,
travail qui anime
la vie intérieure.

C'est le Loin-près
comme dit Marguerite Porète.
C'est le mouvement immobile,
le frémissement dont le cœur se souvient
quand il oublie ses soucis

jeudi 24 mai 2018

Mes trois impuissances


égaré dans l'immense
je confesse trois impuissances :

l'impuissance de ne pas être présent
l'impuissance d'empêcher d'apparaître
l'impuissance d'empêcher de disparaître

je laisse venir
je n'ai pas le choix

je laisse partir
je n'ai pas le choix

je suis présent
je n'ai pas le choix


Présence


Quand j'écris, j'écris dans la présence.
Si je suis d'accord, cette pensée apparaît dans la présence.
Si je ne suis pas d'accord, cette pensée apparaît dans la présence.

Quand "je suis" cela apparaît dans la présence.
Quand "je ne suis pas" cela apparaît dans la présence.

Quand je suis conscient, c'est dans la présence.
Quand je ne suis pas conscient, c'est dans la présence.

En cette lumière, il y a l'être.
En cette lumière, l'au-delà de l'être.

Quand je suis centré, cette expérience apparaît en cette présence.
Quand je suis distrait, cette expérience apparaît en cette présence.

Une sensation agréable ? En cet espace sans limites
Une sensation désagréable ? En cet espace sans limite

Une forme ? Dans le sans-forme !
pas de forme ? Dans le sans-forme !

Tout est en moi ? Cette image apparaît dans la présence.
Il y a encore quelque chose au-delà ? Cette image apparaît dans la présence.

Il y a de la dualité ? Cette pensée apparaît dans la présence.
Je ne suis pas éveillé ? Ces mots apparaissent dans la présence.

Je manque de quelque chose ? Cette pensée apparaît dans la présence.
La souffrance apparaît dans la présence.
La solitude apparaît dans la présence.

J'ai un choix à faire ? Ce choix apparaît dans la présence.
Le libre-arbitre est une illusion ? Cette pensée apparaît dans la présence.

Je suis tout ? Alors je suis tout dans la présence.
Je suis rien ? Alors je suis rien dans la présence.

Tout peut être nié - dans la présence.
Au-delà de tout ? Dans la présence.
L'un par-delà les concepts ? Dans la présence.
Le rien encore au-delà ? Présence.
L'indicible au-delà du rien ? Présence.
Un soupçon de transcendance, encore ? Présence.

Nue.

Simple.
Pas une expérience.

Tout ce qu'on peut dire, on le dit par rapport à nous.
Mais tout cela apparaît dans la présence.
Sans effort.
Qu'on le veuille ou non.
Qu'on le sache ou non.
Qu'on le réalise ou non.
Qu'on pense ou non.
Qu'on imagine ou non.

Grand espace.
Immensité généreuse.
Capacité sans limites.
Indépendance.
Liberté.

mercredi 23 mai 2018

Où ? - L'ultime question


Si je dois me poser une question, laquelle ?

Voici :
Où ?

Car tout est dans le regard ou l'oubli de la situation.
Si éveil il y a, c'est au contexte.

La dualité ne disparaît pas.
Seulement, au lieu de se situer dans la dualité,
on réalise que la dualité apparaît dans...
... dans l'unité, disons.
Dans la présence.
Dans l'espace sans limites.

C'est juste ça qui fait la différence.

Être distrait, c'est oublier où je suis,
croire que 
je suis dans le corps
que le corps est dans le monde.

Être éveillé, c'est me rappeler où je suis
reconnaître que
le corps est en moi,
le monde est en moi,

en moi dans l'espace
comme une soleil.
Le corps est
comme un "je suis"
qui brille en plein centre de l'infini

Où apparaissent les choses ?
Où est le corps en ce moment ?
Où est le monde ?
Où est tout ce qui peut apparaître ?
Où sont les pensées ?
Où sont les émotions ?

Cette simple question est la clé.

Comme dit le Vijnâna Bhairava, "comme les gens ordinaires, les yogis aussi vivent la relation du sujet et de l'objet : mais le propre des yogis, c'est qu'ils prêtent attention à la situation de l'objet par rapport au sujet". L'objet est toujours dans le sujet. Jamais ailleurs. Regardez.

Advaita - non dualité ?

Aujourd'hui le non-dualisme est plus populaire que jamais.
Depuis la mort de Papaji (alias Poonja) en 1997, 
les éveillés et les satsangs ont proliféré comme jamais.



Même si les adeptes de cette spiritualité font souvent mine de mépriser le savoir et semblent afficher fièrement leur ignorance (comme si le crétinisme était une sorte d'intelligence spirituelle supérieure), la plupart de leurs croyances viennent d'Inde.

"Non-dualité" traduit le mot sanskrit a-dvaita, formé d'un "a" privatif, et du numéral dvi- "deux" sous une forme allongée : "dualité", "fait d'être deux, double, dupliqué".

C'est une théorie, vâda, un genre de discours sur le réel, qui a pour but la libération (moskha) et, parfois, la vie heureuse (bhoga).

Il a quelques synonymes : a-dvaya "non duel", "non double" a-bheda "indifférencié", "non séparé", nir-dvandva "sans couples de contraires".

Advaita, comme épithète, peut aussi désigner celui qui est "sans second", "sans égal", "sans rival" ; il a alors pour équivalents a-dvitîya "sans second", an-uttara "sans supérieur", a-sama "sans pareil" et a-pûrva "sans précédent".

Mais le plus important est sans doute de commencer par noter que ce mot ne signifie rien indépendamment d'une interprétation. Car advaita, c'est le fait de ne pas être deux.

Mais qu'est-ce qui n'est pas deux ? Et pourquoi ?

Les avis divergent selon les philosophies.

Quelques exemples :

Dans le Védânta, le Soi et l'Absolu ne sont pas deux. Car le corps, le monde et le mental ne sont que des apparences sans réalité.

Dans le bouddhisme yogâtchâra, le sujet et l'objet ne sont pas deux. Car l'objet n'est qu'une projection du sujet, comme dans un rêve.

Dans le tantrisme, le pur et l'impur ne sont pas deux, car ce sont des constructions culturelles.

Autres cas, non identifiés clairement ou partagés par plusieurs philosophies :

-non-dualité des apparences et de la vacuité
-non dualité du vide et de la forme
-non dualité de l'inspir et de l'expir
-non dualité de la sagesse et de la compassion
-non dualité du chemin et du but
-non dualité du plaisir et de la douleur
-non dualité du corps et de l'univers
-non dualité des amis et des ennemis
-non dualité de l'intérieur et de l'extérieur
-non dualité de la théorie et de la pratique
-non dualité de l'absolu et du relatif
-non dualité de le la dualité et de l'unité
-non dualité du rêve et de l'état de veille
-non dualité de soi et d'autrui
-non dualité de la méditation et de la vie quotidienne
etc.

De plus, quel est le sens de cette non-dualité ?

Parfois, non-dualité signifie que l'un des deux n'existe pas, ou par réellement, ou pas au même degré que l'autre.

Par exemple, pour le Vedânta, il n'y a que l'absolu, l'un. "Le monde est l'absolu" signifia alors que le monde n'existe pas, et non pas que le monde serait uni à l'absolu.

Le bouddhisme général, au contraire, affirme qu'il n'y a que le multiple, et que toute synthèse n'est qu'une fiction imaginaire.

Pour le shivaïsme, le monde est la manifestation de l'absolu, tout comme pour le dzogchen ou certains soûtras ou tantras. Le monde est inséparable de la conscience.

Pour le yogâchâra, la non-dualité, c'est comprendre que l'intérieur et l'extérieur on une seule source.

Pour le tantrisme en général, c'est réaliser que le microcosme et le macrocosme se correspondent.

Pour le yoga tantrique, c'est réaliser que les opposés sont relatifs et n'existent pas indépendamment l'un de l'autre.

Pour les uns, la non-dualité est une expérience spéciale, contemplative.
Pour d'autres, c'est une intuition.
Pour d'autres, c'est une transformation physique (mais l'application du terme "non dualité" à leur cas est contestée).
Pour d'autres encore, c'est la mort. Ou une expérience post mortem.
Pour certains, on ne peut la réaliser que par la méditation.
Pour d'autres, la réflexion est plus importante.
Pour certains, la non-dualité est un état auquel on parvient.
Pour d'autres, c'est un fait à voir directement.

Pour la philosophie de la Reconnaissance,
la non-dualité est la réconciliation 
des "deux ennemis : dualité et non-dualité".

Selon d'autres enfin, "dualité" et "non-dualité" sont des catégories inutiles.
Mais leur contestation est plutôt rhétorique (=ils disent ça pour valoriser leur propre produit).

Et tout cela, c'est juste en Inde.
Aujourd'hui, dans le monde entier, des bars de Bali aux studios de Paris, 
"non-dualité" semble désigner un peu tout ce qu'on estime le plus important.
"Dualité" est devenu péjoratif, comme "mental", "intellectuel" ou "occidental".

Au-delà des modes passagères, la non-dualité est le coeur des sagesse de l'Inde.

vendredi 18 mai 2018

Atelier Le Yoga du souffle à Paris

Le Yoga du souffle
avec David Dubois
à Paris les 16 et 17 juin 2018


Le souffle est le lien entre le corps et l'esprit

Dans la tradition du shivaïsme du Cachemire,
le yoga du souffle est la voie du corps vers le silence et la plénitude

Grâce à cette pratique, on découvre concrètement
comment calmer l'angoisse, le stress, le mental,
mais aussi la fatigue et la boulimie.

Le yoga du souffle est la base de toutes les voies d'éveil
Il développe naturellement la concentration, l'écoute, l'équilivre

Dans cet atelier, je vous propose de découvrir 
pourquoi la respiration est la clé de l'épanouissement intérieur,
pourquoi la plupart d'entre nous respirons si mal,
quels sont les approches de la respiration dans les traditions spirituelles,
et surtout, nous pratiquerons dans l'esprit du shivaïsme du Cachemire

Chaque respiration est une vie complète
Chaque inspir, une renaissance

Avec l'expir, aller toucher l'espace
Avec l'inspir, rejoindre le coeur

Il n'y aura pas de postures de yoga.
Juste une assise simple et confortable,
sur chaise pour ceux qui en ont besoin

Ce weekend aura lieu au centre de Paris,
dans une petite salle conviviale située non loin des grandes gares.

participation : 140 euros
samedi 16 juin et dimanche 17 juin 2018
10h-17h
Lieu : Espace Divyan
1 passage du Jeu de Boules 
75011

Infos et inscriptions :
deven_fr@yahoo.fr
0603330558


La philosophie de la Reconnaissance, voie d'éveil

Beaucoup de gens intéressés par le Tantra ignorent encore
qu'il existe une philosophie inspirée par le tantrisme,
une philosophie proposée comme une voie complète
vers l'éveil à soi.

Manuscrit cachemirien du Vijnâna Bhairava Tantra, avec des notes


D'autres croient que cette philosophie, nommée "reconnaissance", consiste à s'administrer des massages ou à recevoir une mystérieuse énergie d'un être spécial appelé "gourou" ou "siddha".

La Reconnaissance (pratyabhijnâ) n'enseigne rien de tout cela. Elle est une philosophie, c'est-à-dire un examen rationnel et attentif (carcâ, anveshanâ) de l'expérience ordinaire. Elle ne fait appel à aucune expérience spéciale,
en plus de l'expérience commune de l'état de veille. Selon cette philosophie, les états induits par la pratique du yoga ne sont pas nécessaires pour s'éveiller. Il suffit de bien observer ce qui nous est donné ici et maintenant.
De plus, aucune croyance préalable n'est requise. Nul besoin de grâce, d'initiation ou de préparation morale. Il n'est pas nécessaire de manger bio, ni de croire à quoi que ce soit, même si chacun est laissé libre de croire à ce qu'il croit avoir choisi de croire. 
Contrairement à d'autre spiritualité, il n'y a pas de prérequis, en dehors du fait d'être un être conscient qui se pose des questions et qui aspire à une sorte de plénitude, sans trop savoir de quoi il s'agit au juste.
Contrairement au bouddhisme, il n'est pas nécessaire de croire en la réincarnation.
Contrairement au védânta, il n'est pas nécessaire d'être un mâle brahmane, ni d'adhérer au système des castes ni à l'idéologie des Védas. 
Contrairement au Néotantra, il n'est pas nécessaire de croire à... toutes sortes de choses plus ou moins crédibles.
En revanche, il faut être audacieux, curieux, ouvert d'esprit et capable de se concentrer suffisamment pour comprendre plusieurs phrases d'affilée, ce qui n'est plus si courant, apparemment. 

L'enseignement de la Reconnaissance est simple. On pourrait l'exprimer ainsi :
"Nous sommes tous une seule et même conscience
qui joue librement et gratuitement
à se manifester sous toutes les formes".
Pour parvenir à cette certitude, il faut interroger nos croyances et regarder de plus près notre expérience, ici et maintenant.

Mais comme dit Outpala Déva, le fondateur de cette voie nouvelle :
"Cette voie est facile".
Abhinava Goupta explique que cette voie nouvelle est facile parce qu'il n'est pas besoin de s'y exercer au yoga tel que l'enseigne Patanjali. La réalisation, l'éveil, n'est rien d'autre la reconnaissance de notre essence. Point de règles quant à la manière de vivre. Pas de conditions préalables. Ni yama, ni niyama, etc., c'est dit explicitement : "ils ne sont d'absolument aucune aide" (anupayoga eva, Pratyabhijnâ-vimarshinî IV, verset 16).

La Reconnaissance est une voie d'éveil,
un chemin complet basé sur l'expérience et la réflexion.
Pas d'autre autorité, pas de gourou, rien d'autre
que la lumière naturelle et la richesse de ce qui est donné à chaque instant.

Pour celles et ceux qui seraient curieux de regarder plus avant dans cette direction,
je conseille la lecture de La Doctrine secrète de la déesse Tripurâ, très abordable, sous forme de fables. Par ailleurs, j'ai traduit plusieurs textes de cette philosophie, traductions que vous trouverez sur cette page, à droite.

A mon sens, la Reconnaissance est un véritable yoga de la connaissance, bien adapté à la vie moderne.

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