jeudi 17 novembre 2011

Le village des gens d'ici

Comme je disais, le village est séparé en deux par un mur : d'un côté les brahmanes, de l'autre... les autres, les paysans. Cela étant, les brahmanes sont propriétaires de champs de noix d'arec, et les paysans travaillent pour eux. Les brahmanes vivent simplement, et ce qui est frappant, c'est que ce sont des intellectuels des campagnes, avec des traits archaïques comme les philosophes de la Grèce antique : ils vont pieds nus, le crâne à demi rasé, avec des boucles d'oreilles, ils parlent fort. Le système d'apartheid qu'ils ont inventé leur permet de vivre tranquillement et de se dévouer à la vie de l'esprit  - chose impossible quand vous vous épuisez dans les champs sous le dur soleil des tropiques. Mais la plupart ne vont pas jusque là : ils se contentent d'apprendre par cœur des rituels védiques et autres pièces, pour les pratiquer quand on le leur demande. La journée, ils récitent ou bien ils palabrent à l'ombre des grands figuiers.

Le temple de la plèbe est un figuier sacré :
(désolé, il refuse de se mettre à l'endroit !) A son pied, on trouve des serpents sculptés, car les cobras logent dans les racines des figuiers. Plus loin, les femmes décalottent les noix d'arec :

A côté du centre du village, il y a une termitière sacrée :
Bref, il est clair que ne n'est pas le même monde, bien que les brahmanes fantasment sur "les autres". Ces fantasmes nourrissent, c'est certain, l'imaginaire du tantrisme, peuplé de nymphes, de fées, de yoginîs et de "sauvages" qui ressemblent fort aux femmes des la plèbe. D'ailleurs, ce ne sont pas que des fantasmes : les brahmanes Namboudiris au Kerala avaient le droit de prendre n'importe laquelle de ces femmes.

Mais a côté de ces aspects humains, trop humains, le plus difficile à décrire, ce sont les odeurs : on passe sans cesse d'un parfum fruité à un relent de pourriture, en passant par le bois brûlé, la bouse et les odeurs d'huiles de cuisine. La terre elle-même semble parfumée, imprégnée au cœur.

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