dimanche 22 novembre 2015

L'appel de l'Immense

Peu après le 11 janvier, j'écrivais :


La vie intérieure n'est rien si elle ne s'incarne pas à l'extérieur. 
Et si elle peut s'exprimer, alors elle doit s'exprimer.
Le sommeil des consciences, même éveillées (?!), engendre des monstres. Ou du moins les laisse prospérer.

Mais comment ? Comment matérialiser l'esprit, comment spiritualiser la matière ?
A quoi ressemblerait une éthique et une politique fondée sur l'expérience de l'unité éprouvée en soi ? Comment traduire le mystique en politique ? On pense à la religion. Mais je crois qu'il y a d'autres possibilités. Il faut les explorer. Montrer l'actualité politique d'une philosophie de l'unité inclusive, de la philosophie de la Reconnaissance, tout en convoquant les parallèles occidentaux tels que Rousseau et Jaurès.

Ma thèse est : une république démocratique, laïque, est le système politique qui incarne le mieux l'expérience mystique, ou l'éveil comme on dit aujourd'hui.

En guise de mise en bouche, voici un petit délice façon Jean Jaurès :

"Dieu intimement mêlé au monde qui est sa puissance [=son potentiel en train de se réaliser], 
est à la fois être et devenir, réalité et aspiration, possession et combat. Par là cesse le seul scandale que la conscience humaine rencontrait dans l'affirmation de Dieu : nous luttons, nous souffrons, nous essayons péniblement de dompter en nous les penchants mauvais, de réaliser une perfection naturelle et chancelante; et pourquoi cela si la perfection existe déjà ?
Mais précisément parce que cette perfection absolue existe, elle veut éternellement abolir en elle ce qui pourrait ressembler au destin. 
Dieu ne se contente pas d'être la perfection toute faite ; il veut encore et en vertu même de cette perfection la conquérir, et si je puis dire, la mériter ; et voilà comment, du fond de son acte éternel, il déploie le monde, qui est sa puissance, dans la lutte, dans l'obscurité, dans l'effort. Il donne le moi, c'est-à-dire la communication directe avec l'infini et la liberté, à des formes innombrables. Et lui, le parfait, il poursuit avec toutes ces consciences qui cherchent, qui doutent, qui tombent et se relèvent, le pèlerinage de la perfection."

Abhinavagupta n'aurait pas dit mieux !

P.S. : voir là d'autres magnifiques textes de Jaurès que j'avais partagé sur ce blog.

3 commentaires:

  1. Q: Pour autant que j'ai pu le vérifier, l'anthropologie orthodoxe, aussi bien que les prétendus défenseurs de l'héritage culturel de l'Amérique précolombienne récusent la crédibilité de votre travail, l'opinion selon laquelle votre travail est simplement le produit de votre talent littéraire, qui, soit dit en passant, est exceptionnel, continue d'exister aujourd'hui. D'autres secteurs vous accusent aussi d'avoir deux systèmes de valeurs parce que, soi-disant, votre style de vie et vos activités contredisent ce que la majorité attend d'un chaman. Comment pouvez-vous dissiper ces soupçons?

    A: Le système cognitif de l'homme occidental nous oblige à nous en remettre à des idées préconçues. Nous basons nos jugements sur quelque chose qui est toujours "a priori", par exemple l'idée de ce qui est "orthodoxe". Qu'est-ce que l'anthropologie orthodoxe? Celle qui est enseignée dans les amphithéâtres? Qu'est-ce que le comportement d'un chaman? Porter des plumes sur la tête et danser avec les esprits?
          Pendant trente années les gens ont accusé Carlos Castaneda de créer un personnage littéraire simplement parce que ce que je leur rapporte ne coïncide pas avec l'"a priori" anthropologique, les idées établies dans les amphithéâtres et sur les terrains de recherche anthropologique. Cependant, ce que don Juan m'a présenté ne s'applique qu'à une situation qui appelle une action totale et, dans ces circonstances, très peu ou presque rien de ce qui est préconçu n'a lieu d'être.
          Je n'ai jamais eu la possibilité de tirer des conclusions au sujet du chamanisme, parce que pour faire cela on a besoin d'être un membre actif du monde des chamans. Pour un scientifique du domaine social, disons par exemple, un sociologue, il est très facile d'arriver à des conclusions sociologiques sur tout sujet touchant au monde occidental. Mais comment un anthropologue, qui passe tout au plus deux années à étudier d'autres cultures, peut-il arriver à leur sujet à des conclusions fiables? Il faut toute une vie pour être capable d'obtenir l'adhésion à un monde culturel. J'ai travaillé pendant plus de trente ans dans le monde cognitif des chamans de l'ancien Mexique et, sincèrement, je ne crois pas avoir obtenu cette adhésion qui permettrait de tirer des conclusions ou simplement d'en proposer.
          J'ai discuté de cela avec des personnes de disciplines différentes et elles ont toujours été d'accord avec les prémisses que je présente. Mais ensuite, elles s'en retournaient et oubliaient tout ce sur quoi elles étaient tombées d'accord et continuaient de soutenir les principes académiques "orthodoxes" sans se préoccuper de la possibilité d'une absurdité dans leurs conclusions. Notre système cognitif semble être impénétrable

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  2. Peut-être, une autre voix de notre temps à découvrir ou redécouvrir, celle de Simone Weil la philosophe, qui s'est tenue toute sa vie à la croisée du spirituel, du politique et du social, aussi bien dans la réflexion que dans l'engagement.
    La majeure partie de ses écrits, bien souvent recueillis par des tiers et publiés à titre posthume (La pesanteur et la grâce, l'Enracinement...) se trouvent gratuitement en ligne

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  3. "Ma thèse est : une république démocratique, laïque, est le système politique qui incarne le mieux l'expérience mystique, ou l'éveil comme on dit aujourd'hui." Rappelez moi sous quel régime politique vous vivez?

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