vendredi 20 janvier 2017

La Lumière consciente

S'éveiller, c'est reconnaître sa vraie nature, son essence.
L'essence est ce qui est toujours présent.

Qu'est-ce qui est toujours présent ?

Le corps change. En se renouvelant, le jeune remplace l'ancien. La vie perdure ainsi, à travers une succession de naissances et de mort, comme un écho de la Vie immortelle.

L'esprit change. D'instant en instant. Et seule cette rapidité explique que nous croyions que notre esprit est notre essence. L'esprit est en réalité discontinu. Si on observe de près les pensées, on s'aperçoit que sa présence est intermittente, comme les images d'un film projetées sur un écran. De fait, l'esprit est absent entre deux pensées, ou durant le sommeil profond. L'esprit n'est donc pas notre essence.

Notre essence est toujours présente.
Qu'est-ce qui est toujours présent ?

Est toujours présent ce sans quoi aucune expérience ne serait possible. 
Est toujours présent cette sorte de Lumière en laquelle se présentent les expériences, qui est la texture même de toute expérience.
Est toujours présente cette Lumière qui embrasse en son sein la présence et l'absence des choses, des pensées, de tout. 



Cette Présence en laquelle tout se présente - y-compris l'absence de telle chose ou de telle pensée durant le sommeil ou l'évanouissement - est appelée Lumière en sanskrit, ou cit, terme difficile à traduire que l'on rend souvent par "conscience". 

L'un des derniers maîtres de la philosophie de la Reconnaissance (pratyabhijnâ), Hara Bhatta Shâstrî, la faisait reconnaître en ces termes :

"La Lumière consciente absolument libre est ce qui manifeste tout. "Toujours manifeste", elle n'a pas besoin d'une autre lumière pour l'être : elle est auto-lumineuse. Et aussi, (elle n'a pas besoin d'une autre lumière) "parce qu'elle ne se couche jamais", car il y a ces textes révélés (qui nous le confirment) :

Ce Soi est manifeste une fois pour toutes.
Le voyant ne perd jamais sa vision, car elle est impérissable.

"Cet Un" est sans-second. Il est le même "dans la lumière" : dans les lumières du soleil, etc. et dans les lumières des moyens de connaissance, etc. Il est aussi "un dans l'obscurité" : dans les ténèbres de la folie, du coma, et autres (état d'inconscience). Pourquoi ? Parce que c'est lui qui se manifeste à l'intérieur de ceux pour qui plus rien ne se manifeste à l'extérieur. Même à l'extérieur, seule existe la Lumière de la conscience. L'extérieur n'existe qu'à l'intérieur (de la conscience). L'éclat du soleil et les ténèbres dépendent de son existence. En effet, sans cette lumière qu'est la manifestation consciente, absolument rien - un vase, par exemple - ne peut être manifeste. Or, la "lumière" des (choses telles que le soleil ou les ténèbres) se lève et se couche (en ce sens qu'ils ne sont pas toujours manifestes). La Lumière consciente, en revanche, n'est pas affectée par ces apparitions et ces disparitions."

Telle est la Lumière consciente, Lumière qui jamais ne se couche, qui brille à jamais sur les êtres et sur leur absence.
Plus encore, cette Lumière est "libre" : les choses, quand elles disparaissent, disparaissent en cette Lumière dont elle n'ont jamais été réellement séparées. Quand elles apparaissent, elles apparaissent aussi en cette Lumière vivante. 
L’apparition et la disparition des choses, c'est-à-dire le temps, le devenir, est la pulsation de cette Lumière sans nom. Rien n'est séparé d'elle. Tout est Elle, car c'est Elle, absolument souveraine, qui désire spontanément apparaître ainsi. Elle qui se manifeste gratuitement comme corps, comme esprit, comme ma personne, comme votre personne, comme monde, comme univers infinis.

Tout apparaît et disparaît en cette Lumière toujours évidente, comme des vagues qui se soulèvent et retournent à l'océan sans jamais l'avoir quitté.

L'éveil, c'est reconnaître cette vérité, plus intime que tout, et insaisissable par le corps ou par l'esprit.
L'éveil, c'est se voir soi, sans intermédiaire, comme la main se sent en sentant ce qu'elle touche.

Ensuite, il faut cultiver cette reconnaissance, se laisser nourrir de son parfum. Se mettre à l'unisson de cet espace discret et aveuglant, de cette grande réponse indicible, corps et âme.

Je suis, vous êtes, cet Être qui n'a pas de nom et qui, nul ne sait pourquoi - pas même lui - joue à s'incarner.

S'éveiller, c'est reconnaître, dans le corps, dans l'esprit, et au-delà, que je suis Lumière consciente qui jamais ne se couche, en laquelle se lèvent et se couchent toutes les autres lumières physiques et mentales.

L'extrait donné plus haut vient de ce livre, un petit enseignement du shivaïsme du Cachemire traditionnel :

Poème pour l'éveil Bodhapanchadashika
Pour l'acheter, clic ici

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Pas de commentaires anonymes, merci.