vendredi 3 janvier 2020

Le refuge du souffle

L’image contient peut-être : 1 personne, assis et barbe

Il y a un temple très simple qui vit au fond de chacun de nous.
Nous pouvons l'oublier mille et mille fois.
Avec l'âge, souvent il semble s'éloigner.
En vérité, il est immortel. Sa porte est toujours grande ouverte, bâillant
sur de vastes prairies lumineuses, ronronnantes et où chaque mouvement nous rassure, nous console et nous réconcilie.
La tradition rapporte que les intervalles sont un moment privilégié pour s'en souvenir, pour oublier un peu la machinerie qui semble régner durant l'année.
Ce secret est simple comme ce temple fait de vertes contrées : écouter la fin d'une pensée. Inutile de la supprimer avec grande force, car tout s'en va, c'est dans la nature des choses. Par contre, oui, avec intensité, regarder d'un regard entier, comme le chat guette la souris, comme le chien appelle sa friandise. Et se laisser planer dans cette coulée de silence frais comme un bonbon à la menthe. Avec douceur et rigueur. En un instant, nous sommes alors transportés dans le paysage de ce temple hors du temps, ce temps d'avant le temps, quand tout c'était que paix et repos chantant. Avec cette confiance simple, entière aussi, quand nous savions nous effondrer avec pleine confiance dans l'herbe, comme des bêtes heureuses. Alors la musique de ce temps où tout ce répond, de cet espace où tout concoure à la magie bienveillante, de ce sanctuaire imprenable et à jamais accessible, redevient audible. Au creux de soi, seul ou dans la foule.
Le voilà, l'entre-deux où nous nous retrouvons tous en nous retrouvant nous-mêmes, dans l'esprit d'avant, d'avant le temps.
C'est ce temps fragile et fort entre Noêl et le Réveillon, le temps atemporel de se réveiller, de se retourner vers la chaude clarté du grand soleil qui à jamais annonce le retour chez soi.

Simple comme une petit chèvre.

"A travers la lampe des yeux : pratique grossière.
A travers les cinq sens : pratique moyenne.
A travers les pores de la peau : pratique subtile."

Maître Présence céleste, Drenpa Namkha, tradition Boeunpo, Tibet

Voir la lumière qui voit briller à travers la vaste ouverture des "yeux".
Percevoir la présence qui jaillit à travers les cinq sens,
comme une lampe dans un vase.
Sentir la vibration qui ruisselle à travers la "peau",
qui exsude comme une vapeur, qui rayonne comme une lumière, etc.

Si je me sens incapable de "rester dans la présence" dans le quotidien,
alors je peux faire attention à des choses :
la vaste ouverture du champ visuel, sa transparence, porter l'attention vers ses "rebords";
les sensations dans le corps, une zone plus précise :
sommet de la tête, nuque, ventre, hara, main, front, plante des pieds...;
la peau, l'espace autour de la peau.
Par exemple, quand je suis assis, les mains posées à plat, étalées,
une partie de mon attention sur ce ressenti des mains étalées ;
ou, quand je suis debout, le ventre détendu, avec juste une légère tension
minimale, l'attention posée en partie sur cette masse;
ou bien, l'attention donnée à la fin de l'expir, souvent, pas forcément longtemps. Mais souvent.
Sans chercher midi à quatorze heure, le silence devient vivant.

Pratiquer ainsi dans le quotidien, sans honte, sans rancune, sans calcul ni gêne.

L’image contient peut-être : plante et plein air

La nature parle, même quand nous n'écoutons pas.
Les ancêtres murmurent, même quand nous les piétinons.
Le silence est éloquent, même quand nous bavardons.

Tout y est,
Tout est donné,
gratuitement,
au prix de se taire.

Je m’assois dans le miracle du souffle.
Chaque cycle, un nouvel an.
Chaque inspir, une inspiration.
Chaque expir, une libération.

J'ouvre les yeux,
le monde s'éveille.
Ils se referment,
je reprends le monde en moi.
Dans ce balancement
est ma joie,
libre de toute fin
comme de toute répétition.
Nouveau et insaisissable,
magie évidente,
aliment limpide
qui me nourrit.

Tout se passe comme si,
au fond de moi,
vivait un être,
second en apparence
mais premier en substance,
qui s'aliment du plein et du vide,
diaphane glouton,
à la fois
jouissance et transparence.

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