mardi 19 mai 2020

Non pas union, mais unité



Une fois la paix intérieure goûtée, 
nous voudrions pouvoir la savourer
sans interruption.
C'est toute l'oeuvre intérieure.
Mais comment ?

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Le grand Fénelon, profond mystique et rigoureux penseur,
essaie de nous faire entendre en quoi consiste
"l'état d'oraison perpétuelle"
- et en quoi il ne consiste pas :

"Cette union à Dieu ne peut être ni par effort ni par excitation du cœur, ni par contention d’esprit ni par une vue distincte. 

Rien de tout cela ne peut être absolument continuel : car tout ce qui est distinct et marqué, ne l’est que par être différent de ce qui précède et de ce qui suit ; d’où il faut conclure que toutes ces choses distinctes ne sont que passagères. 

Aussi voyons-nous que ceux qui parlent de cette Oraison sans interruption, ne veulent pas même la nommer union mais unité, pour en exclure toute action distincte. C’est ce que dit saint François de Sales : c’est pour cela que le même saint dit que l’Oraison, dont il parle, dure même en dormant. C’est cette présence de Dieu que l’Écriture représente comme continuelle dans certains hommes de l’Ancien Testament : Ils marchaient en la présence de Dieu. Toute leur voie, toute leur conduite , toutes leurs actions communes n’étaient que présence de Dieu."

Puis l'archevêque de Cambrai essaie de nous faire comprendre,
à la lumière de la métaphore de... la lumière,
comment Dieu est toujours déjà présent en nous,
ou plutôt, nous en lui,
mais sans que nous l’apercevions :

"On ne pense pas toujours à la lumière, mais on la voit toujours sans réflexion et c’est par elle qu’on voit tout le reste. Il en est de même pour certaines âmes .Elles ne pensent pas toujours à Dieu d’une façon distincte et aperçue : mais elles en ont toujours une certaine occupation d’autant plus secrète et confuse, qu’elle est plus intime et devenue plus naturelle. Ils ne font point des actes d’amour, mais ils aiment sans penser à aimer ; comme tous les hommes aiment sans cesse à être heureux, sans chercher distinctement [338] ni plaisir, ni intérêt, ni bonheur. L’âme pénétrée de Dieu est de même pour lui. Voilà donc un état où l’on fait Oraison en tout temps et en tout lieu sans intermission. C’est-à-dire que toutes les fois que l’âme s’aperçoit elle-même, elle se trouve non pas disposée à faire des actes ; mais dans une conversion constante, habituelle, et fixe vers Dieu qui est une espèce d’unité avec lui. Dans le moment où l’âme aperçoit Dieu , elle ne commence point à s’unir ; mais elle se trouve déjà toute unie et elle sent qu’elle l’a toujours été, lors même qu’elle n’y pensait pas actuellement.
Voilà ce que les mystiques appellent état d’oraison continuelle."

(tiré des Justifications, 1720)

"Dans le moment où l’âme aperçoit Dieu , elle ne commence point à s’unir ; mais elle se trouve déjà toute unie et elle sent qu’elle l’a toujours été, lors même qu’elle n’y pensait pas actuellement."

Toute est dans cette phrase : la présence divine, toujours prévenante, 
est seulement reconnue, aperçue. 
Le divin a toujours l'initiative. 
Il est don gratuit. 
Vivre de lui consiste à s'y rendre disponible,
à le choisir à chaque instant par un choix intime, 
immédiat,
sans délibération d'images ni de concepts.

3 commentaires:

  1. Merci pour la découverte de ces textes magnifiques.

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  2. ce que Fénélon nous suggère à propos de l'oraison c'est donc qu'elle est un état spontané, l'homme ou la femme qui se maintient dans la présence de Dieu, ou plutot la présence de Dieu qui se maintient dans l homme ou la femme.
    Ca c'est le discours d'un homme qui est parvenu à cet état ultime et qui reconnaît l'inutilité de toute action de volonté personnelle pour en arriver là
    mais avant d'en arriver à cet état d'abandon, les efforts, l'excitation, la contension au contraire me paraissent nécessaire.
    C'est par eux qu'on explore le monde et qu'on en découvre aussi les limites
    Ce que Fénélon et les autres mystiques décrivent c'est un peu à mon sens la libération des contraintes de ce monde duel, sur les plans physique et mental
    RJHW


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    1. Oui, mais il n'y a rien à fabriquer. Juste s'ouvrir à une présence qui précède et prévient nos efforts.

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