dimanche 31 janvier 2016

La vie intérieure est inaction



Nous sommes habitués à progresser par nos efforts.
Mais dans la vie intérieure, tout notre effort doit être de nous laisser agir par l'énergie divine. 
C'est l'in-action, ou action intérieure.
Comme le conseille un Carme :

"les âmes ne sont pas encore accoutumées à ce genre de vie, elle ont de la peine...à s'empêcher de tendre à force de voiles et de rames...dans cet océan de la Divinité.
Mais à présent qu'elles n'ont pour motif que l'unique plénitude...il ne faut plus qu'elles usent d'autres industries ni effort que d'un simple écoulement de cœur en lui."

Mais pourquoi "vie intérieure" ?
"On appelle cet exercice vie, parce que l'âme n'en doit jamais être privée, autrement on pourrait dire qu'elle serait morte, comme l'on dit d'un corps mort, qu'il n'a plus d'âme. Et aussi...on l'appelle vie simple... Il est impossible que l'esprit qui a goûté Dieu simplement, par habitude et non en passant seulement, puisse jamais trouver goût ni s'appliquer à le cherche autrement."

Il n'y a pas de rémission :
"Quand Dieu s'est fait goûter au fond de l'âme, il laisse une impression quasi éternelle, et qui rappelle à soi tous les mouvements d'esprit avec une telle force qu'il ne peut jouir d'aucune satisfaction ailleurs que dans ce fonds qui est son centre et sa vraie demeure."

Maur de l'Enfant Jésus, Théologie chrétienne et mystique, pp. 71-73

vendredi 29 janvier 2016

Ma mère



"Ma mère était une femme sainte, pure, immaculée.
Elle était omniprésente comme l'espace
et subtile comme les atomes.
Elle connaissait tout sans rien connaitre.
Elle faisait tout sans rien faire.
Elle contenait tout sans être contenue par rien.
Elle portait tout sans être portée.
Sans forme, elle avait toutes les formes.
Relative à tout, elle était absolue.
Pleine de joie, elle ne se réjouissait de rien.
Évidente, toujours, partout et pour tous,
elle était inconnue.
Elle qui n'a eu ni père, ni mère
a mis au monde des filles semblables à moi,
innombrables comme les vagues de la mer."

Le secret de la Déesse (Tripurârahasya), V

jeudi 28 janvier 2016

L'enracinement et l'ouverture

Regardez ce clip. Il a fait un carton :


Faut dire qu'il est bien fait, et qu'il remplit le cœur de fierté. La fierté d'être européen, occidental, français aussi. Il rappel certains aspects de notre héritage. Et je suis certain que beaucoup s'y reconnaîtrons, même s'ils ne sont pas d'accord sur tout. Même, et surtout, dans les milieux "alternatifs" et New Age : célébration de la terre, de la tradition, des ancêtres, des parfums du terroir, de la sagesse des générations, de l'instinct local, de l'enracinement, de l'émotion, du ressenti. Tout le vocabulaire des cinq sens est invoqué. 
Surtout, on y valorise le concret contre l'abstrait, le particulier contre l'universel, l'instinct contre la pensée, la sécurité contre la liberté, la communauté contre l'individu.

Mais, ce qui est aussi intéressant, c'est ce qui est omis de cette célébration.

Car, pour moi, l'Europe, c'est aussi les Lumières.
L'Europe, c'est les Droits de l'Homme.
L'Europe, c'est la révolution copernicienne.
L'Europe, c'est l'abolition des privilèges et de l'esclavage.
L'Europe, c'est la séparation des Etats et des Eglises.
L'Europe, c'est la société ouverte.
L'Europe, c'est l'émancipation des femmes.
L'Europe, c'est l’espérance en l'humanité.
L'Europe, c'est l'humanisme.

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Rien de tout cela n'est mentionné. La raison, la révolution scientifique, les progrès sanitaires et dans les mentalités, les savants et les bâtisseurs. Oubliés. Escamotés.

En fait, ce clip est issu de ce que l'on appelle "le mouvement identitaire" qui célèbre l'Europe païenne (et chrétienne, un peu). Pour eux, être fier d'être occidental, c'est seulement être fier d'un passé, d'un attachement au passé. Moi aussi, je suis fier de ce passé. Et donc fier d'être occidental. Mais pas seulement. Je suis aussi et surtout fier d'être porteur d'un projet d'avenir, qui est celui de l'humanisme des Lumières. Le passé dont je suis fier, c'est surtout ce moment du passé où l'Europe s'est émancipée de son passé. Les Lumières.

Il y a donc deux "fiertés", qui se ressemblent, mais qu'il faut soigneusement distinguer :

- La fierté communautariste, tournée exclusivement vers le passé. Un passé idéalisé. Et cette tendance ne se rencontre pas seulement chez les identitaires, ni dans l'extrême-droite, mais aussi chez bien les écolos, les altermondialistes, certains gauchistes, souvent chez les New Age (qui n'en ont pas conscience, car ils n'ont aucune culture historique), et chez les intégristes de tout bord.
- La fierté universaliste ou humaniste, tournée à la fois vers le meilleur du passé, ET vers un progrès universel. Et cette tendance-ci est en voie de disparaître. Aujourd'hui, tout le monde est, soit traditionaliste (retour au passé idéalisé, retour aux croyances), soit relativiste (on s'en fout, tout se vaut, que chacun se démerde). Les humanistes sont en voie d'extinction.

Pour votre culture générale : le mouvement identitaire, dont ce clip est la parfaite illustration, ne date pas d'hier. Je reviendrais sur ses sources, et sur leur proximité avec l'écologie, le New Age et une partie de la spiritualité contemporaine. Il y a beaucoup en commun, en effet, entre les pensées d'extrême-droite et d'extrême-gauche : haine de la raison, de l'Occident, de l'Amérique, du capitalisme, de la science, de la société libérale...


mercredi 27 janvier 2016

Si tout est conscience, tout est-il permis ?

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En Occident, Descartes a fondé la science sur la conscience : quand je doute de tout, je réalise que je suis, que je suis conscience, sans quoi je ne pourrais douter ni être trompé. Même si tout n'est que rêve et rêve dans un rêve, il est certain que je suis, comme conscience de ce rêve. Il ne saurait y avoir illusion sans conscience de cette illusion. Pour que l'objet puisse être incertain, il faut que le sujet, la conscience, soit certain. "Je suis, j'existe" est l'évidence absolue, qui survit aux doutes même les plus délirants, dit Descartes.

Mais en fondant ainsi la science sur la conscience de soi, Descartes ouvrait aussi la porte au subjectivisme : tout dépend de "moi", de mon point de vue, donc tout est relatif, y-compris les théories scientifiques. Relativiser peut avoir du bon, mais on en voit aujourd'hui les ravages. A force de déconstruire, les parents ne savent plus éduquer les enfants, et les enseignants n'ont plus rien à transmettre à des élèves qui, de toute façon, sont mal éduqués. En l'absence de tout autre repère que les caprices et humeurs de l'instant présent, la culture disparaît, l'obscurantisme et le fanatisme peuvent se donner libre carrière, en même temps, du reste, que le consumérisme.

C'est pourquoi l'évidence de la conscience doit être celle d'une conscience universelle.
Une conscience, oui. Et celle qui se donne ici et maintenant. Certes. Mais elle n'est pas ma conscience au sens où elle n'est pas française, ou chinoise, de gauche ou de droite. Cette conscience est impartiale. Elle est universelle. Et, par conséquent, son point de vue n'est pas mon point de vue, mon invention, ni les banalités du "moi, mon avis personnel, c'est que...", mais un point de vue universel. A ce titre, il peu s'imposer à toutes les subjectivités individuelles. 

Pour le dire autrement, l'univers est un rêve, mais un le rêve de la conscience universelle.
Et ce rêve a des lois. Les phénomènes ne s'y succèdent pas dans l'arbitraire, mais selon des rapports réguliers, des lois donc. Et nos rêves individuels s'inscrivent dans ce rêve. Même s'il y a du relatif, nous ne pouvons donc pas légitimement nous vautrer dans le relativisme. Il n'y a que des points de vue, mais des points de vue individuels subordonnés au point de vue universel - à tous points de vue, si j'ose dire - de Dieu, ou quelque soit le nom qui vous plaira.

Tout est magie dans la conscience. Mais une magie rationnelle, intelligente. La conscience crée librement. Et nous, qui sommes des dieux miniatures, créons librement dans le cadre de la liberté divine absolue. Et ce cadre s'appelle "le monde". La nécessité des lois de la nature est, pour nous, la liberté divine. Mais nous restons conscients, donc divins, donc libres et créateurs. Non pas absolument comme Dieu, mais gratuitement et en Dieu. En tant que conscience, je suis Dieu, je suis libre. En tant que je suis capable de me ressaisir purement comme conscience, je puis alors être libre comme Dieu, et heureux comme lui. Mais, au plan pratique, je ne suis qu'un seul corps, et donc, par là, ma liberté est déterminée. Mais ce déterminisme ne s'oppose pas à ma liberté. Au contraire, il la rend possible. Peut-on être libre dans un rêve ? Sans doute pas vraiment, tant que ce rêve reste chaotique, sans lois, sans régularité. Il n'y a pas de liberté sans règles. Et la conscience crée des règles. Il existe donc des lois, des lois que notre raison peut comprendre. Le monde est sans doute un rêve, mais il reste beau. Et nous pouvons éduquer nos enfant. Et leur enseigner, et même leur transmettre un héritage, afin que leur sort soit meilleur que le notre et que l’humanité progresse.

Tel était la sagesse des Anciens, des Modernes, mais aussi des Indiens, que nos contemporains s'acharnent à déconstruire depuis 200 ans environs.
Donc tout s'enracine dans la conscience, mais une conscience universelle, dont les inventions font nos découvertes. Et je puis participer à cette conscience. En fait, tout être y participe plus ou moins, en fonction de son degré de réflexion. Tout ce qui est vu, en effet, n'est pas pour autant reconnu.

Et le fait que cette conscience soit universelle n'ôte aucune valeur à l'individu en son unicité. 

En Occident, c'est l'enseignement du platonisme.
En Inde, c'est la philosophie de la Reconnaissance (pratyabhijnâ en sanskrit) qui s'épanouit entre le Xè et le XVè. Selon cette philosophie d'une profondeur abyssale, nous sommes des êtres divins, car nous sommes conscients. Même si notre conscience semble limitée, elle suffit à nous rendre libres et créateurs, ou cocréateurs. Et plus nous réfléchissons, plus notre conscience s'épanouit, et plus notre liberté augmente. Cela s'appelle la culture. Et le monde est notre création en tant que conscience universelle, mais il est le cadre de notre vie individuelle en tant que conscience individuelle. Donc, dans ce rêve divin, nous n'inventons pas les règles, pas plus que nous n'inventons la grammaire ou l'orthographe. Il y a une logique qui s'impose à nos caprices. Il y a une physique qui force nos humeurs. Donc il n'y a pas de quoi sombrer dans le relativisme. Que tout soit conscience n'implique pas que tout dépendent de notre individualité. Au plan du monde, il y a une physique, une logique, et donc aussi une éthique, une politique, et même une esthétique universelles, qui servent d'idéaux à nos efforts individuels et dons nous aspirons à nous approcher, comme une courbe asymptote qui s'approche infiniment d'une limite, sans jamais néanmoins coïncider avec elle.

Dire "tout est conscience", ce n'est donc pas tout se permettre. C'est, au contraire, se reconnaître un devoir de grandir toujours sans cesse, à la fois tirés par la grâce et poussés par nos efforts.
Ce non-dualisme ci, inclusif ou dialectique, si vous me permettez cette expression, est compatible avec la démocratie et l'avenir de nos enfants.
En revanche, le non-dualisme qui pose que tout est subjectif et que la raison n'est qu'un mythe auquel chacun peut croire à sa guise, est destructeur de l'avenir de nos enfants. Il ne débouche que sur le chaos.

dimanche 24 janvier 2016

Un autre éveil - les Lumières


Je crois que la démocratie offre à l'individu et à l'humanité plus de possibilités d'accomplissement que tout autre système politique.

Au XVIIIème est né une pensée nouvelle, une nouvelle façon de voir l'homme et le monde : 
alors que la vie des individus consistait seulement à reproduire celle de leurs ancêtres, 
on a compris que l'individu avait le droit de prendre sa vie en main, de décider de changer le monde. 
Quelle révolution !

Ce sont les Lumières - l'éveil de l'homme à son autonomie. L'individu, l'égalité, les droits, la raison, le progrès... tant d'idées nouvelles qui ont amélioré la vie des humains. Au lieu de croire que le but de la vie s'accomplit en cette vie (hédonisme) ou en la suivante (religion), une foi nouvelle est née : l'humanité peut progresser, nous pouvons nous battre pour améliorer le sort de nos descendants, même si nous n'en voyons pas les fruit. L'humanité progresse, peu à peu, à l'image de la vie d'un individu. Et chacun est libre d'y participer, ou pas. Je ne me définis plus par ma nature, mon sang, mes ancêtres, ma race ou mon sexe, mais par mon pouvoir de choisir, d'accepter ou de refuser, d'imaginer un autre monde, meilleur et plus riche que celui dans lequel je suis né. 
Des hommes s'étaient éveillés avant.
Mais, au siècle des Lumières, l'humanité s'est éveillée.

Par exemple, on a compris qu'une société n'est pas un organisme naturel, une sorte de corps - "chacun à sa place, une place pour chacun" - mais un ensemble d'individus qui s'associent librement. Et pourquoi ? Pour dépasser les limites de la nature. Pour aller au-delà de la violence, de l'arbitraire, du règne - chaotique - du plus fort. Nous avons décidé d'obéir à nos propres loi, éclairés par notre raison, et non plus par la prétendue tradition. Et ainsi, nous avons dépassé la violence physique entre individus. 
Quel changement !
Mais les nations sont aussi des individus. Et, tant qu'il n'existera pas une réelle société des nations, il y aura de la violence entre les nations, comme il y avait de la violence entre les individus avant la création de la société civile. Je suis donc pour une société des nations, pour un gouvernement mondial et fédéral. 
Mais il faut, pour y parvenir un jour, réveiller les hommes de leur sommeil, supprimer l'ignorance, l'obscurantisme et les superstitions. Surtout, il faut combattre les communautés, les tribus et les doctrines - peu importe leur nom - qui détestent les Lumières, qui veulent garder les hommes prisonniers de l'ignorance, dans un état d'enfance perpétuelle : relativisme, traditionalisme, fanatisme, complotisme, islamisme, consumérisme, occultisme, toutes ces réactions en forme de régression qui empêchent l'individu de grandir, de devenir majeur, de faire usage de son intellect, de s'éveiller pleinement.
Comment ? Par l'éducation. Et la philosophie est, par excellence, éducatrice. Car les autres savoirs nous apprennent des choses et des arts, et des techniques (des "compétences"). Mais avec tout cela, on ne sait pas pour quoi, pour quelle fin, on va et on devra les employer. La philosophie est, plus que jamais, vitale. 

Je crois en l'homme et en son potentiel. Je crois en l'avenir.

"Les connaissances rendent les hommes doux ; 
la raison les porte à l'humanité : 
il n'y a que les préjugés qui y fassent renoncer."


Après la méditation

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D’ordinaire, la méditation est une activité mentale. Un entraînement de l'attention sur divers sujets, comme la compassion, Dieu, ses attributs, le souffle, le corps, les émotions, le karma... 
Au-delà, il y a la contemplation : un regard simple ou l'âme se laisser aller, sans soucis, sans chercher à faire attention : il n'y a qu'un acte d'abandon, d'ouverture simple, de pleine disponibilité.

Un moine décrit ainsi ce regard du cœur :

"Il faut donc que l'esprit humain, qui jusqu'ici a eu la liberté de parcourir indistinctement par toutes les perfections divines pour en considérer le long et le large..." en vivant mille expériences, en goûtant des intuitions, des éveils et autres révélations, "commence à retirer cette étendue de vie et de vue multipliée pour faire recouler simplement son inclination amoureuse en Dieu, qui en est l'auteur et le principe qui l'a fait naître dans le fond de l'âme, sans aucun effort de sa part, sans persuasion ni prévenance de lumière particulière", sans savoir clair et distinct, "mais par l'anticipation de sa vie radicale et foncière, laquelle il occupe et remplit de sa divine vertu, qui la pénètre et l'attire si fortement qu'elle ne peut rien goûter ni trouver bon sinon Dieu, bien qu'elle ne voit rien en lui de particulier qui l'attire, mais seulement elle voit une plénitude à laquelle elle est attirée si secrètement qu'il lui est presque impossible d'y résister." 

Maur, Théologie chrétienne et mystique, p. 71

Je m'ouvre, quelque chose s'insinue, prend le contrôle et m'emporte encore plus loin dans le rien, où un autre courant me prend, et ainsi de suite, à l'infini...


vendredi 22 janvier 2016

Comment la religion entrave l'intérieur

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Les religions se prétendent gardiennes des moyens de parvenir à l'accomplissement intérieur. Mais en réalité, elles sont un obstacle à cet accomplissement. 
Non seulement parce qu'elles sont corrompues par leur pouvoir, mais encore parce qu'elle cachent la vérité simple sous une multitude de rites et d'obligation qui sont censées assurer une forme de sécurité : "Purifiez-vous ! Préparez-vous ! Faites ! Pratiquez ! Obéissez ! Ne réfléchissez pas !" Tel est le message de tous les prêtres, de tous les gourous, lamas et autres bergers. Ils cherchent à effrayer leurs ouailles, plutôt que de les encourager à faire usage de leur liberté. Sous couvert de leur assurer la survie, ils les empêchent de grandir.
Le doigt, censé pointer vers la lune, la cache bien plutôt.
C'est ce que dit ici un moine Carme, mais mystique :

"Je ne puis m’empêcher de croire que toutes les grandes méthodes qu'on a inventée pour conduire à la dévotion, ne soient cause que si peu de personnes trouvent et cherchent Dieu purement et en vérité, ou bien c'est après un si long temps que la plus grande partie de la vie se passe à les apprendre ; et, après les avoir bien routinées, le plus souvent on voit ces pauvres âmes autant attachées à leur propre intérêt et au service de leurs appétits et passions, qu'elles aient jamais été."

Tout est dit. Parti à la recherche de Dieu, on revient avec un nouvel ego, spirituel ou religieux ou autre. On devient expert en yoga, en méditation, en tantra, en thérapie-ceci, thérapie-cela, on a fait de milliers de prosternations, récité des millions de mantras, visité tant de sanctuaires... Et l'on est d'autant plus attaché à soi, à ce faux Soi, à cette image de soi, qui ne vit que pour le regard des autres; C'est la religion. Comme dit Longchenpa, "une chaîne dorée entrave autant qu'une chaîne de fer".

Notre Carme poursuit :

"La raison, à mon avis, de leur défaut est qu'elles s'étudient plus à se rendre parfaites dans leurs artifices et méthodes qu'en Dieu et pour Dieu.... C'est ainsi que les hommes s'aveuglent dans la lumière, et qu'ils se bâtissent des cachots de servitude dans le palais de la vraie liberté, et s'attachant plus fortement à leur propre dévotion qu'à Dieu même, ils s'empêchent de parvenir à la jouissance par les mêmes moyens qui les y devraient conduire."

Maur de l'Enfant Jésus, Théologie chrétienne et mystique, p. 49

Alors détournons notre attention de ces prétendus moyens, tout "traditionnels" soient-ils, et retournons-là vers notre centre, simplement et sans fioriture. Non pour y trouver le bonheur, la paix ou autre chose, mais parce que c'est la vérité. Que le doigt accomplisse enfin sa fin !


samedi 16 janvier 2016

Le retournement du désir

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Une vie sans connaissance de soi vaut-elle la peine d'être vécue ?
Et, de même, à quoi bon une vie de désir sans retournement du désir ?

Je veux dire, la fin de la connaissance est la connaissance de la connaissance, la connaissance de ce qui connaît tout le reste, et que j'appelle "conscience" ou Lumière consciente. La conscience se néglige, s'oublie, s'ignore, ne se connaît elle-même qu'à travers les choses qu'elle connait, et jamais directement elle-même. D'où une grande souffrance d'un genre particulier. 
Mais nous ne sommes pas que connaissance. 
Nous sommes aussi désir. 
Or, nous désirons les choses et nous nous égarons dans ces désirs multipliés, sans nous désirer nous-mêmes. Il y a bien des narcissiques. Mais eux ne désirent que des images d'eux-mêmes. Ce n'est donc pas eux-mêmes qu'ils aiment, mais leur reflet. 
A quoi bon cette chaîne, cet enchaînement de désirs, l'un menant à l'autre, sans fin ? La fin du désir n'est pas dans l'obtention de la chose désirée, mais dans le retournement du désir vers sa source, comme un saumon. Car en son jaillissement, le désir ne fait qu'un avec son objet, de même que la perception, en son premier instant, ne fait qu'un avec l'objet perçu. 

Et, au fond, connaissance et désir ne font qu'un, il n'y a pas de perception qui ne soit habitée par un élan, ni de désir qui ne soit aussi conscience. Au premier instant, tout désir est désir de soi, toute connaissance est connaissance de soi. Et, en vérité, ce qui se révèle ainsi à nu au premier instant, ne disparaît jamais, mais se trouve seulement comme recouvert par des choses, et provisoirement. Le désir de soi devient désir d'une carotte (par exemple). La conscience de soi devient conscience de la carotte (par exemple). 

Ainsi, chaque désir, chaque perception est l'occasion d'une révolution radicale de tout l'être et de se reposer en la fin à laquelle nous aspirons vraiment. Ce n'est que par précipitation et ignorance que nous passons outre, pour nous perdre tout entiers dans les choses. Au lieu que, si nous nous offrons à la révolution intérieure, à la conversion du désir-regard, nous serons comblés avant même d'être satisfaits - ou non. Ainsi, au lieu d'être un manque, le désir sera débordement de plénitude. Notre existence deviendra ainsi de plus plus conforme à notre essence, la pratique rejoindra la théorie. 

jeudi 14 janvier 2016

Ce que je crois



Réponses, en vrac, à des questions qu'on me pose souvent, et auxquelles je réponds rarement :

- Je crois que tout est en Dieu, de Dieu, par Dieu. Quelque soit le nom, etc.
- Je crois que Dieu n'est pas tout-puissant, mais qu'il est amour.
- Je crois que l'individualité persiste à jamais.
- Je crois que chacun continue de vivre, personnellement, après la mort.
- Je ne crois pas en un enfer perpétuel. A la fin, il n'y aura que le paradis.
- Je crois que tous ce qui est beau et bon est éternel et sera sauvé dans l'au-delà, même les instants éphémères, même les plus petits gestes, les souvenirs, les moments rares, les regards, les sourires.
- Je crois que seul le mal périt réellement.
- Je crois que l'au-delà est la perfection, inconcevable, mais qui paraîtra évidente quand on y sera.
- Je crois que la vie spirituelle, ici-bas, est un avant-goût de l'au-delà, mais déjà plein et parfait en un sens. Comprenez :)
- Je crois que notre but - Dieu - est toujours déjà atteint, et qu'en même temps nous n'en finirons jamais de nous émerveiller, de mourir et renaître toujours plus profondément.
- Je crois au libre-arbitre, qui n'est pas opposé au déterminisme, mais à la croyance au destin.
- Je ne crois pas à la réincarnation. En tous les cas, je n'ai pas de certitude à ce sujet.
- Je crois que notre être individuel est aussi précieux que notre être universel, même si cela doit rester un mystère pour notre entendement.
- Je crois que la démocratie est la moins mauvaise des manières de vivre ensemble.
- Je crois aux valeurs modernes de liberté d'expression et de conscience, au droit de disposer de son corps, à l'égalité des sexes, à la raison dans le quotidien, au progrès, en la valeur de la science comme méthode.
- Je crois en l'humain.
- Je crois en l'avenir.
- Je crois en l'amour.
- Je crois que la réalité est belle et bonne.
- Je crois qu'il y a un sens à la vie, qu'on peut le sentir, mais pas le dire sous forme de système.
- Je ne crois pas à un passé idyllique.
- Je ne crois pas à plein de choses, mais on en restera là pour le moment :)

dimanche 10 janvier 2016

Entre vide et plénitude

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Touché par la grâce, allant d'extases en extases, l'âme intérieure perd peu à peu ses points de repère, jusqu'à un état de vide total, privé de tout appui. Mais en réalité, Dieu est l'appui; Cet état est simplement décrit comme "vide" par rapport aux états précédents. L'âme est alors comme un miroir immobile, comme un vitrail transparent :

"L'âme ne voit plus rien d'elle-même, elle ne voit rien de Dieu, elle ne peut plus agir, plus s'abandonner, plus vivre ni plus mourir ; elle ne conçoit ni ténèbres ni lumière, elle ne voit ni sortie ni entrée, elle ne peut ni désirer ni fuir, elle ne peut se plaire dans sa perte ni s'en attrister. Tout ce qu'on en peut dire, c'est qu'elle est dans un désert infini, suspendue comme entre le ciel et la terre, sans avoir un seul cheveu sur quoi s'appuyer. Elle est sans foi, sans espérance et sans amour, ce lui semble, d'autant qu'elle ne peut réfléchir là-dessus, mais pourtant jamais elle n'aima si fortement ni si parfaitement... Si elle doit faire quelque chose, c'est se rendre attentive sans aucun sien effort et ne mettre aucun empêchement à ce que Dieu fait en elle, ni par de subtiles réflexions, ni par soupirs, ni par admirations, mais comme une eau très belle et claire qui est arrêtée, reçoit sans émotion ce que Dieu fait en elle."

Maur de l'Enfant-Jésus, Exposition des communications divines, p. 175

Cet état est l'état de silence ultime, juste avant la plénitude parfaite, car vides et plénitudes alternent et vont s'approfondissant l'un l'autre jusqu'à leur perfection. 
Les états de vide correspondent à la méditation de Shiva, plongées dans un silence de toute pensée propre, les sens grands ouverts ou non. Les état de plénitude correspondent à la méditation de Shakti, quand le désert est ensemencé par une coulée d'amour et de félicité, elle aussi plus ou moins puissante. 
L'espace ne change pas. 
Le soleil brille, toujours égal à lui-même.
Mais les nuées se dissipent peu à peu.

Cet avant-dernier état est le dernier des "moyens". Là, on "ne peut bonnement donner aucun précepte, ni pour y arriver ni pour y demeurer...parce que la créature ne fait ici que suivre les actions de Dieu."

Et cet état de vide total est de durée indéterminée :
"C'est assez de dire qu'ici l'âme n'a plus rien, et dans les autres qu'elle a encore quelque chose. Pour la durée de cet état, elle est aussi longue qu'il plait à Dieu ; car il n'y a que lui qui puisse ressusciter l'âme de cette mort à la vie."

samedi 9 janvier 2016

Yoga de l'espace

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L'esprit d'éveil
est vacuité et compassion inséparables,
puissance qui dévore être et non-être,
paix sans origine ni cause.

...

Les choses ne naissent pas :
dès lors, il n'y a ni pratique,
ni état à atteindre.
Tel est l'état que l'on célèbre
et que l'on atteint
par le yoga de l'espace.

...

Les choses sont claire lumière,
elles sont transparentes depuis toujours,
pareilles au ciel :
cet éveil est la profonde et solide
voie de l'éveil.

...

L'esprit d'éveil :
pas d'autre bonheur dans les trois mondes !
Ce bonheur de l'esprit d'éveil
est la porte de tous les bonheurs !

Tantra final de la Quintessence des mystères

Traduit du sanskrit par un ragondin égaré sur les rives de la Marne.

"Les choses ne naissent pas" : quand l'esprit s'arrête.
"L'esprit d'éveil" : jargon bouddhiste, silence intérieur, transparence, conscience nue, toute simple.

vendredi 8 janvier 2016

La science savoureuse

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La théologie mystique est "une secrète et très intime conversation de l'âme avec Dieu". Ici Dieu enseigne, alors que dans la théologie humaine, c'est l'homme qui essaie de connaître Dieu par ses propres efforts. 
Cette théologie du silence est une "science savoureuse". On laisse Dieu imprimer son image en nous, si bien que la seule action du pratiquant est de se laisser faire par Dieu.

"Cette théologie est une théologie du cœur, beaucoup plus que de l'entendement, plus dans l'expérience que dans la science, presque toute de Dieu et très peu de la créature : car c'est lui-même qui en est le maître et l'objet tout ensemble, et qui l'enseigne par l'application réelle de ses impressions dans le fond de l'âme, lesquelles servent de principes à cette toute divine théologie, et se répandent du centre dans la circonférence des puissances, pour les émouvoir à agir tout divinement et à recouler sans cesse vers la source qui les a remplies."

Martial d’Étampes, Entrée à la divine sagesse, 1651, p. 32

Le "centre des puissances", c'est le cœur ou volonté, c'est-à-dire la faculté d'aimer. Le coeur est le point de contact entre le "je" et Dieu, voire Dieu lui-même. En tous les cas, c'est de là que commence la transformation qui va ensuite toucher les autres facultés, l'entendement, la mémoire, puis les cinq sens. On sent ainsi comme une fontaine d'amour qui s'écoule du centre de soi, qui envahit tout l'être, et qui le pousse à aimer en retour, de plus en plus, ce qui se donne ainsi gratuitement dans le silence. On goûte d'abord, on connait ensuite.

jeudi 7 janvier 2016

Cercle de méditation du dimanche 17 janvier 2015



Communier en silence, savourer ensemble la joie simple d'être.
Quoi de plus beau ?
Gratuit.
Limpide.
Profond.

Sur ce chemin, nous avançons jour après jour.
Pas de technique, point d'assurance, nous marchons sans savoir, en nous abandonnant à ce je-ne-sais-quoi insaisissable mais bien réel qui s'empare de nous quand nous lâchons prise.

Je vous propose de partager un moment de calme, 
sans rien faire, juste nous laisser faire.

Entrée libre. Tous sont les bienvenus pour ce temps de partage en silence, suivi d'un moment où chacun pourra, s'il le sent, partager son expérience, en sirotant un thé chaud.

C'est aussi l'occasion de découvrir la méditation et la vie intérieure, en toute simplicité, entre amis.

Pas de maître, pas de système, pas de recettes, pas de prêchi-prêcha, juste se laisser prendre par le mystère.

Dimanche 17 janvier 2016
de 15h à 17H

Pour connaître l'adresse exact, écrivez juste un petit mail :

deven_fr@yahoo.fr

A bientôt !

David Dubois

mercredi 6 janvier 2016

Embrasser l'espace



La méditation de Shiva consiste à rester les sens ouverts, sans commenter, comme un enfant qui regarde un paysage. Le regard est posé dans l'espace, l'intérieur et l'extérieur sans séparation. 
La présence semble alors émerger des profondeurs, comme un réveil. 
Puis ce silence saisissant se poursuit dans la vie de tous les jours. 
On vit dans l'espace, l'espace vibrant en nous.

L'équivalant dans la tradition tibétaine du dzogchen consiste à "larguer les amarres". Un adepte du XIVème siècle, Longchenpa, la décrit ainsi :

"Le corps immobile, les jambes croisées... Votre regard ne vacille pas, il est clair et droit. Vous ne bloquez pas les perceptions, elles se manifestent clairement, dans tous leurs détails. Votre esprit est sans concept, car le bavardage, l'apparition et la disparition des pensées se dénouent d'elles-mêmes. Vous reposez dans une conscience limpide...
Il s'agit simplement de reconnaître, sans forger une habitude en "méditant". Votre torse est droit. Laissez votre regard ouvert en posant vos yeux dans l'espace devant vous ou bien au loin, vous pouvez alterner. Laissez votre conscience se dilater. Laissez vos cinq sens s'épanouir d'eux-mêmes. En méditant ainsi, vous vous retrouvez dans une ouverture en laquelle il n'y a pas de séparation entre extérieur et intérieur, ni même d'entre-deux. Des expériences surgissent : votre corps se fond dans l'espace, des états de félicité de clarté, d'absence de pensée, ou encore un état excellent de conscience nue. Il se peut que vous sentiez que les apparences deviennent transparentes, ou que votre conscience est limpide et totalement ouverte, sans aucune trace de pensée, où que tout apparaît dans un état qui, en lui-même, n'est rien, car vous avez réalisé que tout était vide, sans définition, transparent. Il se peut que vous sentiez que vous ne pouvez trouver aucune pensée, quelque soit votre effort pour en trouver, qu'elles ne peuvent plus apparaître, qu'elles ne sont jamais apparues, et que nul ne pense. Vous pourriez vous demander : "De quoi parlent-ils quand ils parlent du "flot des pensées" ?
Des expériences de conscience transparente surgissent d'une manière qui défie toute expression."

Le Précieux trésor des Écritures sacrées, x 

Ainsi, toutes sortes d'expériences peuvent apparaître dans la méditation. 
Mais, au bout d'un moment, on réalise que ces expériences apparaissent dans la méditation, et que la méditation est l'espace de conscience que nous sommes, en lequel tout passe, et qui ne passe pas. 
C'est l'entrée dans la vie intérieure.


lundi 4 janvier 2016

Bavardage sur la vie intérieure

Georges de La Tour - St Sebastien Attended by St Irene - WGA12342.jpg

Comme toute vie, la vie intérieure est alternance, cycles. 
De vides et de plénitudes.

Il y a deux vides et deux plénitudes.

Le vide peut être le silence serein, une paix goûtée au plus profond de soi. Mais le vide peut aussi être un vide insipide ou l'on ne ressens plus les plaisirs du monde, mais pas encore la paix et la joie divine. D'où une souffrance intérieure plus ou moins profonde. Cette souffrance ne vient pas du vide lui-même, mais des résistances qui refont surface dans ce vide. Mais, avec l'expérience et un certain je-ne-sais-quoi, nous finissons par lâcher, et le vide comme manque devient un vide libre, qui ouvre à la plénitude. Comme nos résistances sont diverses et plus ou moins profondes, le vide est plus ou moins profond.

La plénitude est la félicité du cœur, le ravissement, une sorte de touchement intérieur. Lui aussi peut être plus ou moins doux, ou violent, profond ou superficiel. Il peut se présenter comme simple joie d'être, comme coulée d'amour délicate. Mais aussi comme un feu qui brûle où l'âme ressent à la fois ce qu'elle désire et la distance infinie qui l'éloigne de ce qu'elle désire. Il y a alors, à la fois, amour et langueur, douceur et douleur. Si l'amour est plus fort, on peut également se sentir balloté, remué, comme travaillé de l'intérieur, corps et âme, comme si l'on subissait une sorte de chirurgie psychique. Là aussi, il existe une infinité de degrés et de nuances, depuis le simple amour, languissant mais doux, jusqu'à la souffrance la plus profonde de se sentir ainsi séparé, et en même temps plongé dans l'extase la plus intense.

Tout cela arrive après que l'on soit déjà entré dans l'intérieur. Cette vie est une succession de morts et de renaissances, où l'on apprend à ne plus faire, mais à se laisser faire. 
Et on y goute à la fois une incroyable paix et des douleurs de plus en plus profondes, au fur et à mesure que les résistances sont plus profondes, jusqu'à ce que notre être se fonde en l'océan de la divinité. 
Dans cet état, notre énergie est passée en Dieu, bien que nous conservions notre personnalité. Nous sommes comme des miroirs limpides qui reflètent telle qu'elle est la lumière du soleil. Nous continuons à être, mais toutes nos actions sont celles du divin en nous, à travers nous. Notre personnalité est transformée, toujours plus, mais pour le meilleur, bien que cela puisse passer pour folie aux yeux des hommes. Et le monde ne disparait pas. Il est... une sorte de chant. La douleur existe encore. Mais elle est immergée dans une paix insondable, dans une vie de célébration. Nous découvrons que le but de la vie n'est pas le bien-être tel que nous l'imaginions, mais l'amour. Nous n'existons pas par nous-mêmes, mais pour notre centre qui est aussi le centre de tout et le cœur de tous les êtres.

La relation entre vide et plénitude est vivante : le vide accueille le plein. Le plein donne des forces et permet de lâcher les résistances apparues dans le vide. Plus nous sommes vides, plus nous sommes remplis. Morts et renaissances. Expirs et inspirs. Nous nous quittons, jusqu'à nous perdre. Et quand nous sommes totalement ensevelis, la vie parfaite nous est insufflée. Mais cela se fait peu à peu. En général, nous recevons une certaine plénitude, nous nous l'approprions, et la vie nous conduit à mourir à nouveau, plus en profondeur, puis nous recevons une nouvelle joie, et ainsi de suite, jusqu'à la mort complète et la renaissance complète.

Notre seul choix, dans cette vie, est soit de continuer à vivre en nous-mêmes, séparés de la Source, dans une vie matérielle ou "spirituelle", peu importe ; ou bien à nous laisser faire, à mourir pour renaître, nous ouvrir à cette autre vie, bien différente de la vie ordinaire, mais véritable. La Source ne nous fait vraiment mourir que si nous y consentons.

Voilà tout l'intérieur : nous laisser faire, comme si nous n'avions jamais existé. Alors tout nous sera donné à l'infini.