dimanche 1 octobre 2017

Que retenir du "tantra" ?

Je viens de lire deux biographies de maîtres tibétains.


D'un côté, un gros volume sur Khyentsé Lodreu, maître notamment de Sogyal,
et figure du bouddhisme tibétain en exile. 
Un personnage fascinant,
initié à toutes les traditions. Ses biographies (il y en a plusieurs deans ce volume)
énumèrent ses exploits tantriques, ses visions, sa puissance, 
ses dons, ses pouvoirs magiques, ses aventures politiques,
les rivalités avec les autres écoles, sa célébrité,
ses oeuvres, son autorité,
ses ambitions, ses réussites.
Sa "biographie intérieure" n'est qu'une suite de visions
spectaculaires. Sa "biographie secrète" concerne 
sa vie sexuelle.
Mais rien sur la vie intérieure.

De l'autre, un petit volume d'anecdotes sur Patrul, rassemblées patiemment  par Mathieu Ricard. 
Un portrait à travers des témoignages,
 où transparaît
un personnage humble, attentif aux autres,
exigeant avec lui-même, effacé, tourné vers l'intérieur.

Je vois, dans ce contraste, le rappel d'un fait :
malgré toutes mes sympathies et attirances pour le "tantrisme" (ou le "tantra",
comme on voudra),
le fait est que les personnages charismatiques, puissants,
les saints remplis de visions et de prodiges,
les missionnaires surhumains, les avatars et autres 
dispensateurs de la grâce dans ses formes les plus spectaculaires,
ne me touchent guère.
Et j'ai le sentiment de ne pas être le seul.
Si je reviens sur les figures qui m'ont marqué,
force est de constater qu'elles ont un point en commun :
une sorte d'humilité, une certaine méfiance
vis-à-vis des institutions, des groupes,
de tout ce qui est brillant et spectaculaire.
Je pense à Patrul, Shabkar, Ramana, Harding,
Nyoshul Khenpo.
Sans doute est-on frappé par les qualités qui nous manquent,
et sans doute je manque d'humilité...
En tous les cas, c'est un fait qui me fait réfléchir.

Même dans le shivaïsme du Cachemire,
je ressens ce même contraste
entre l'humilité d'une part, 
et la brillance charismatique, de l'autre.
Ainsi le contraste entre un Outpaladéva
qui s'efface, qui doute, qui confesse ses limites,
et un Abhinava Goupta qui, tout brillant qu'il soit,
invective souvent son interlocuteur,
le ridiculise parfois, n'hésite pas à se vanter
et ressemble parfois à un écrivain qui se regarde écrire.

D'où la figure de Jésus, aussi, et d'autres dans le même esprit.
Pauvreté, nudité, humilité.
Notez bien que je ne dis pas cela dans un sens anti-intellectuel. Du tout.
Outpaladéva est un philosophe génial et original.
Mais il est entier.
Or, dans le tantrisme, on est rarement entier.
J'observe le même trait dans le néotantra.
"On s'aime", en croyant semer...
Mais souvent, on se regarde juste le nombril.

Donc voilà, je me demande qu'est-ce qui est vraiment indispensable dans tout ça.
Que faut-il retenir du tantra ?

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