jeudi 14 février 2019

Un je ne sais quoi



Méditer, c'est simplement s'ouvrir à la subtile vibration au centre de nous, au cœur du corps. Jaques Bertot, un maître d'oraison de repos (comme on appelait alors la méditation) du XVIIe siècle, décrit ainsi ce fin ressenti viscéral :

"Continuez à faire oraison autant que vous le pourrez et que vous y avez de facilité, en sorte que le corps ni la tête n'en souffre pas. Ce je ne sais quoi qui assurément vous est Dieu en votre état, est vraiment ce qu'il vous faut pour faire oraison, et pour vous occuper tout le jour si vous le pouvez. 
Il n'y a qu'à vous laisser doucement conduire et occuper par ce je ne sais quoi, qui dans la suite fera bien voir que c'est quelque chose, puisque ce je ne sais quoi sans forme et idée, qui occupe en paix l'âme et la nourrit sans aliment, devient une beauté et un bonheur inconcevable, renfermant tout bonheur et toute beauté.
La semence de chaque chose n'a nulle figure de ce qu'elle produit et dans la suite elle donne un effet admirable. Ces graines que l'on met en terre, pourrissent ensuite et deviennent de belles fleurs. Il en va de même de cette occupation secrète en l'oraison, que l'on ne peut bien exprimer que par ce terme un je ne sais quoi. Quoique ce je ne sais quoi soit si petit et si obscur, cependant c'est une très grande lumière, non en la manière de la créature, mais en la manière de Dieu."

Jacques Bertot, Le Directeur mystique, Editions du Carmel, p. 144

C'est cette vibration qui emporte dans le silence. Le silence à son tour affine la vibration, qui à son tour emporte dans un silence plus profond, et ainsi de suite.
Et c'est ainsi que, comme dit encore Bertot, "vous trouverez le tout caché dans le fond du rien" (p. 146). Il rejoint le Vieux Sage qui lui aussi invite à épouser l'Esprit de la vallée, la Femelle mystérieuse, cette "noble vacuité" dont parlait Hadewijch d'Anvers, le silence simple où brille l'étoile du cœur. 

1 commentaire:

Pas de commentaires anonymes, merci.