vendredi 26 avril 2024

La non-dualité, c'est de la dualité !

 

C'est quoi la non-dualité ?

Dans la spiritualité indienne, on dit que "je ne suis pas un objet". Par conséquent, je ne suis pas le corps, car le corps est un objet parmi d'autres. Alors que suis-je ? Je suis le sujet. 

En d'autres termes, je ne suis pas un objet perçu sur le mode du "cela" objectif, mais je suis le sujet percevant, qui se perçoit soi-même (âtmâ) sur le mode du "je suis", au-delà de tout objet.

Cette discrimination (viveka en sanskrit) est une désidentification nécessaire, car d'ordinaire je m'identifie à des objets : le corps, la sensation, la pensée, voire le néant. Toutes les traditions de l'Inde sont d'accord pour dire que cette étape est indispensable.

Cependant, ce retour sur soi par discernement entre le sujet et l'objet débouche sur un état de dualité : il y a le sujet, le Soi, la conscience, d'un côté ; et il y a tous les objets, dont les corps et les autres, de l'autre. 

Cette situation de dualité est celle du Yoga de Patanjali, du Sâmkhya et du Vedânta. 

Elle est libératrice dans une certaine mesure, car le réalise alors que je transcende tous les objets, dont le corps. Je perçois ma tristesse ? Je ne suis pas ma tristesse ! Je perçois ma douleur ? Je ne suis pas la douleur ! Je ne suis rien de ce qui est perceptible, rien de ce dont je fais l'expérience. Je suis transcendant, au-delà de tout, ce qui représente un soulagement. Je suis moche ? Je ne suis pas ce corps ! Je fais des bêtises ? Je ne suis pas ces bêtises ! Je commets des erreurs ? Je ne suis pas ces erreurs ! Je regrette mon passé ? Je ne suis pas mon passé ! Et ainsi de suite.

De plus, cette discrimination n'exige que peu d'effort, dès lors que l'on a des capacités cognitives, que l'on n'est pas débile profond. La plupart des gens peuvent donc y accéder. Peut-être.

Enfin, cette discrimination présente l'avantage, aux yeux de certains, de mettre tous les objets - toutes choses - sur le même plan. L'or est un objet, comme la boue. Tout est égal. Ou plutôt, tout est égalisé. A la suite de cette discrimination radicale, il n'y a donc plus à discriminer quoi que ce soit. En ce sens, il n'y a plus "dualités" ni hiérarchies. Ce qui n'est pas sans complaire aux mentalités égalitaristes.

Toutefois, ce soulagement a son prix : tout est réduit à des objets, de simples choses inertes, privées de conscience, d'énergie et de vie. En sanskrit, on emploie le mot jaḍa qui signifie à la fois "inerte", mais aussi "idiot, stupide, imbécile". Donc, tout (et tous !) devient inerte, stupide et imbécile. Certes, j'acquière une certaine paix, mais au prix de tenir toutes choses, l'univers, et les autres, pour des substances inertes, stupides, impersonnelles, privées de liberté. Seule la conscience est libre, mais... elle est totalement inactive.

Or, le Tantra nous propose une autre voie, qui passe par ce moment de transcendance, mais qui va au-delà. 

Transcender la transcendance. 

Aller au-delà de cette dualité que beaucoup confondent avec la non-dualité. 

Le Tantra voit dans cette non-dualité exclusive (à laquelle on arrive en excluant toutes choses) une impasse, car c'est un état conditionné : j'y suis libre de tout, à condition... de ne rien faire, de ne toucher à rien. Mon seul choix est alors de ne pas choisir ("il n'y a pas de libre-arbitre"). 

Pourquoi ? Parce que dès que j'agis, j'ai le sentiment de perdre cette transcendance, mon "éveil". Je m'embourbe à nouveau dans les méandres des problèmes du monde, dans la dualité. Donc je suis dans un dilemme : Soit j'agis, mais je me sens conditionné ; soit je suis libre ("inconditionné") mais je ne suis pas libre d'agir. Je suis donc libre... à condition de ne rien faire ! 

Ce qui, manifestement, n'est pas un état inconditionné, mais un état de dualité, un état construit en posant une chose par élimination de son opposé. En l'occurrence, j'élimine tout et je garde une conscience amputée de ses pouvoirs, une conscience stérile. Paralysée. Dans le déni d'elle-même. Et donc aussi dans le déni de mon incarnation.

C'est pourquoi le Tantra propose de transcender cette transcendance. 

Comment ?

En plongeant dans le cœur. Et là, RESSENTIR que "je suis" est la source de tout activité, de toutes choses, car Je Suis est la vie. 

Je Suis n'est pas une conscience statique, un Témoin passif, mais l'Acte pur, total, d'exister, qui est à la racine de tout ce qui existe. La vibration continue à la racine de tout mouvement. 

Tout est le prolongement de cet Acte pur, comme les vagues sont des parties du mouvement total de l'océan. Il n'y a véritablement aucune séparation. Seulement une merveilleuse variété, un miracle de diversité.

Un maître du Tantra résume ainsi :

"Tout objet est comme le CORPS du Soi (âtmâ) qui est la conscience, la Lumière qui se manifeste en manifestant ces objets".

Le corps est un objet, mais il n'est pas QUE cela !

Quoi encore ?

Il est un objet vivant, infusé de conscience de sensibilité. 

Et tous les objets sont, en puissance, ainsi. 

Ils sont le visage de la conscience, 

son évolution, 

son histoire, 

on déploiement, 

son récit, 

sa mémoire, 

son imprévisible liberté.

Et cela change tout.

Bienvenu au banquet des yoginîs !

vendredi 12 avril 2024

Qu'est-ce que le yoga ?

Valkyrie en état de yoga


Les variétés de yoga sont nombreuses aujourd'hui.

Mais en Inde ?

Nombreuses aussi.

Aujourd'hui, le yoga de Patanjali est ses fameux "Yoga Sûtras" sont pris pour référence au yoga.

Pourtant, sa vision du yoga va à l'encontre de la plupart des yogas indiens.

En effet, le mot sanskrit yoga signifie "union", le fait de mettre, placer ou tenir deux entités ensemble. Selon la plupart des traditions, shaiva ou vaishnava, cette union est celle de l'âme individuelle avec l'âme créatrice, divine. Le yoga est donc l'état d'union de l'individu avec sa source divine.

Or, pour Patanjali, au contraire, le yoga n'est pas union, mais séparation, vi-yoga (par ex. 4, 34). Il s'agit d'arriver à un état d'immobilité totale du corps, du souffle et de l'esprit afin de réaliser que nous avons toujours été séparé de tout, car nous sommes pure conscience, témoin des choses. C'est par confusion entre les deux que nous croyons que nous bougeons, nous agissons, nous pensons. En réalité, nous sommes les témoins de tout cela. Rien de plus. Le yoga consiste alors à voir cette éternelle séparation, à réaliser que nous sommes séparés de tout, kaivalya.

Ce "yoga" est donc, en réalité, l'opposé du yoga !

Dans le véritable yoga, il y a certes un moment de séparation : le moment où l'on réalise que la conscience, le Moi, notre vraie nature, ne se réduit pas au corps ni à une personnalité. Cependant, cette séparation n'est qu'un moment en vue de l'union avec le divin, et non le but final.

De fait, il y a bien d'autres conceptions du yoga.

Pour Patanjali, le yoga est donc cet état de séparation absolue et définitive, ainsi que la méthode pour y parvenir.

Pour les jainas, il s'agit aussi d'arriver à un état de séparation entre la conscience et la matière subtile, le karma.

Pour d'autres, le yoga est un état de parfaite concentration, samâdhi.

Selon le shivaïsme du Cachemire, le yoga est un moyen d'adorer le divin, une sorte de rituel intérieur. De même, les vaishnavas. C'est le yoga comme état d'union au divin, et c'est là la vision majoritaire du yoga, presque complètement oubliée aujourd'hui.

Selon Gorakhnâth, fondateur du hatha-yoga, le yoga est l'union des contraires, notamment l'union de l'inspir et de l'expir.

Selon le Tantra, le yoga est la Shakti, la puissance divine, et non une voie ou une méthode spirituelle. Yoga désigne aussi shiva-jnâna, la connaissance divine.

Selon le Tantra non-duel enfin, le yoga est l'éveil à la non-dualité : l'union a toujours été le cas, et la séparation n'est qu'une illusion qui fait partie du libre jeu de la conscience.

Il y a donc bien des visions variées au-delà de Patanjali !

Bien des trésors restent encore à découvrir.

mercredi 27 mars 2024

L'enseignement le plus choquant du Tantra ?


Vous croyez que les enseignements les plus transgressifs du Tantra sont le yoga sexuel ou le cannibalisme ? 

Détrompez-vous !

Voici l'idée la plus difficile à admettre transmise par le Tantra :

Selon le Tantra, l'ignorance, avidyâ, est la cause de toutes les souffrances. 

Jusque-là, le Tantra semble enseigner la même chose que les autres traditions de l'Inde.

Mais il y a deux sortes d'ignorances selon la révélation shaiva (=Tantra) :

- l'ignorance conceptuelle, les fausses croyances.

- l'ignorance non-conceptuelle, l'angoisse fondamentale, la contraction originelle.

Or, cette dernière sorte d'ignorance n'est pas causée par le mental, car elle intervient avant le mental, lequel n'en est qu'un effet. Donc, la connaissance conceptuelle ne peut rien contre cette ignorance plus subtile que le mental.

Aujourd'hui, la plupart des enseignements non-dualistes affirment que le "mental" et ses "concepts" sont la cause du "sentiment de séparation", qui est la cause de toutes les souffrances.

Le Tantra enseigne que cette ignorance mentale n'est pas la cause du sentiment de séparation. C'est, au contraire, ce sentiment qui est la cause des fausses croyances et autres concepts erronés. La connaissance mentale ne peut donc éradiquer cette ignorance subtile, plus subtile que le mental.

Mais alors, d'où vient le sentiment de séparation, cette ignorance subtile qui est plutôt une sensation vague, qu'une croyance ? 

Elle vient de la Source, directement. La conscience universelle choisit, librement, de se contracter.

Oui, vous avez bien lu. Seule la conscience se contracte (=s'ignore, s'oublie) et donc, en toute logique, elle seule peut se décontracter, s'éveiller. C'est la grâce. En elle-même, aucune connaissance conceptuelle et aucune pratique ne peuvent faire cela. 

Certes, cette idée est difficile à admettre. Car alors, comment s'éveiller ? Si cela ne dépend d'aucune de mes facultés individuelles, mais seulement de la conscience universelle, que faire ?

Notez la cohérence de ce message : Si "tout est conscience", une et même, alors l'ignorance, la contraction, le sentiment de séparation, la dualité, ne peut venir que de la Source elle-même, car il n'y a pas d'autre source, pas d'autre cause.

Alors, que faire ?

samedi 16 mars 2024

Qui était Ramana Maharshi ?

Ramana et Ganapati : amis ou ennemis ?

Ramana est le "sage" indien le plus important di XXème siècle. Chaque jour son influence grandit. Dans un monde dominé par les écrans limités, il attirait l'attention sur l'Ecran sans limites dans lequel apparaissent tous ces écrans limités.

De plus, il a vécu une vie simple en accord avec ses enseignements. Dans un pays où les gourous font souvent scandale, Ramana se démarque par sa cohérence.

Cependant, les interprétations de son enseignement sont diverses et parfois opposées.

En schématisant, deux camps apparaissent :

- A une extrémité, les partisans du Vedânta. Les deux principaux représentants de cette ligne sont Muruganar et Lakshman Sharma. Ils ont tous les deux composés des oeuvres écrites sous la supervision de Ramana.

- A l'autre extrémité, les partisans du Tantra. Les deux principaux représentants de cette ligne sont Ganapati Muni et Kapali Shastri. Eux aussi ont composé des oeuvres écrites sous la supervision de Ramana.

Entre les deux, on trouve les oeuvres rédigées par Ramana lui-même. La principale et la plus sûr est l'Upadesha-sâra, l'Essence de l'enseignement (de Ramana). C'est pourquoi j'ai choisi de principalement traduire cette oeuvre dans mon recueil d'Œuvre sanskrites de Ramana, paru chez Almora.

Cependant, il reste les autres œuvres, composées par des auteurs "autorisés" par Ramana et son ashram (organisation), mais qui présentent des visions contradictoires.

Sans entrer dans les détails, le problème principal qui les divise est le suivant :

- Le monde est-il une illusion destinée à disparaître après l'éveil (Vedânta) ? Ou bien est-il une manifestation de l'absolu, manifestation destinée à être transformé par l'éveil spirituel (Tantra) ?

Les implication éthiques sont importantes. Ce ne sont pas des questions creuses. Ramana a dit, rapporte-t-on, que Hitler était peut-être un éveillé et un instrument du Divin. Il a dit aussi que, même si "cinq millions de personnes sont massacrées, cela laisse l'éveillé indifférent". Pourtant, il était plein de compassion pour les animaux.

Comment expliquer ces affirmations et ces comportements ?

Quel est le véritable message de Ramana ?

A ma connaissance, il n'existe pas d'étude vraiment complète sur la question. La plupart des interprètes sont partisans d'un camp ou de l'autre.

A la suite de mon premier livre sur Ramana, j'ai donc le projet d'en écrire au moins deux autres : Un sur l'interprétation védântique de Ramana ; et l'autre sur son interprétation tantrique.

lundi 11 mars 2024

Quelles sont les méthodes du Tantra ?


 Dans cette entrevue récente, le Swami Sarvapriyananda, excellent enseignant de l'Advaita Vedânta, décrit les méthodes (upâya) du Tantra :

vidéo

Ses définitions ne sont pas exactes. Selon lui l'Anupâya ou Non-méthode est le Yoga de la Connaissance, jnâna-yoga. Le Shâmbhava-upâya ou Méthode de Shiva est aussi Yoga de la Connaissance car il consiste à méditer sur des formules telles que "Je suis Shiva". Le Shâkta-upâya ou Méthode du Pouvoir consiste à méditer et réciter des Mantras. Enfin, l'Ânava-upâya ou Méthode de l'Individu consiste à pratiquer tout le reste : yoga, rituels, dévotion, etc.

Cette description est erronée. Il est important de rectifier, car des erreurs circulent depuis longtemps. Déjà, le Swami Lakshman Joo et Lilian Silburn avaient commis ces erreurs.

Abhinava Gupta est le maître qui a le plus développé l'enseignement sur ces quatre Méthodes ou Moyens. Dans son Tantra-âloka, il les définit ainsi :

1 - An-upâya ou Non-Méthode est aussi appelé Alpa-upâya ou Méthode minimaliste ; ou encore Âtma-upâya "Prendre le Soi comme moyen" ou, enfin, Ânanda-upâya "Prendre le plaisir comme méthode", le plaisir étant la Présence (caitanya) elle-même. Cette approche consiste donc à prendre le but comme moyen. Mais il ne s'agit pas d'une absence totale de moyens. Le Tantra, de manière générale, exclut rarement. Concrètement, cette Méthode est celle de la bhakti ou amour divin. C'est approche mystique, directe dans son rapport à l'absolu, mais qui est graduellement dans la manifestation de ses effets. Son enseignement est une sorte de Yoga de la Connaissance, mais épuré à quelques affirmations du genre "La réalisation spirituelle ne dépend pas des méthodes, ce sont les méthodes qui dépendent de la réalisation spirituelle", presque comme des koâns.

2 - Shâmbhava-upâya, aussi appelé Icchâ-upâya ou "Prendre l'élan avant les pensées, comme moyen". Ce moyen est comme le précédent, mais il met davantaga l'accent sur l'énergie et quelques symboles, principalement l'alphabet. 

Le Moyen 1 est Shiva, le 2 est plus Shakti.Mais ils sont proches dans le style épuré et minimaliste.

3 - Shâkta-upâya est aussi appelé Jnâna-upâya ou "Prendre le pouvoir de connaissance, comme moyen (pour s'éveiller)". Il est le Yoga de la Connaissance, c'est-à-dire la philosophie, le travail sur les croyances. Il consiste à examiner les fausses croyances pour les remplacer, peu à peu, par des croyances vraies qui ne font plus obstacles à l'attention à soi. Selon le Tantra, en effet, toutes les croyances ne sont pas à rejeter. Certaines sont compatibles avec l'éveil et expriment la vérité, comme par exemple "Je suis Shiva".

4 - Ânava-upâya aussi appelé Kriyâ-upâya ou "Prendre l'activité comme moyen" regroupe TOUTES les autres pratiques : yoga, méditation,  respiration, Mantras, rituels, danse, chant, mais aussi le yoga "sexuel" et autres pratiques transgressives. Autant dire, 99% des pratiques, que ce soit dans le Tantra ou hors du Tantra (en effet, selon le Tantra, toutes les autres traditions sont des préparation au Tantra, qui lui-même comporte différentes étapes ou degré de dévoilement de la vérité complète).

Vous pouvez maintenant comparer les deux définition, et aussi les comparer avec le Tantrâloka lui-même, si vous souhaitez approfondir.

Ces Moyens ne sont pas absolument hiérarchisés. Le 4 est "L'Individu comme moyen", mais attention ! Le Tantra ne méprise pas l'âme individuelle. Et dans sa tradition ultime, appelée Trika ou Triade, l'Individu est l'un des trois Mystères sacrés, à égalité avec Shiva et Shakti. De fait, ce "Moyen" qui regroupe 99% des pratiques comporte les pratiques les plus puissantes, appelées "absolues" (anuttara) car elles débouchent directement sur l'éveil.

Pour conclure, notons donc clairement en nos esprits que, selon le Tantra, l'éveil est possible à tout instant, pour n'importe qui, indépendamment de la Méthode, des pratiques ou de leur absence, sans dépendre du karma. Il n'y a qu'une seule Déesse, et elle est absolument libre. La liberté ne dépend pas du karma ; c'est le karma qui dépend de la liberté.

dimanche 3 mars 2024

Nous sommes les enfants de l'éveil


 

Shiva et Shakti sont les parents de l'Individu.

Tel est l'éveil : reconnaître nos parents à la racine de notre être, au cœur de toutes nos filiations, de ce monde oud es autres. 

Le père-espace, la mère-énergie (=le corps) et l'enfant-vibration-du-cœur.

La tradition Kaula n'est rien d'autre que cette triade. Réintégrer la Famille divine est l'initiation qui ne dépend pas de Mantras, de Mudrâs et de Mandalas, parce que cet acte de réintégration lui-même est la source des Mudrâs et des Mantras, des dieux et des déesses, avec tous leurs Mandalas. 

Kula est la Famille divine : Père, Mère, Enfant. 

Père = infini de silence

Mère = conscience de ce silence qui s'écoute à l'infini

Enfant = synthèse du Père et de la Mère, incarnation universelle à l'infini

Nous sommes tous des enfants de cette famille, de cette constellation triadique, de cette auguste trinité immortelle. Chacun la porte en soi, mais la cherche au dehors.

Puisse notre regard se retourner !

mardi 20 février 2024

La clé de l'éveil


 Les méthodes d'éveil spirituel semblent très différentes, entre celles qui prônent la chasteté et celle qui invitent à la sensualité, par exemple.

Mais cette apparence cache une réalité : Il existe une clé de l'éveil.

Même dans les traditions réputées sensuelles, comme le Tantra, cette même clé est transmise.

Cette clé, c'est le retournement de l'attention vers soi. 

L'enseignement est simple :

Plus je suis tourné vers les choses, plus je suis malheureux.

Plus je suis tourné vers moi, plus je suis heureux.

Attention : "moi" ici ne désigne pas mes pensées, mes impressions, mes sentiments, mes envies, mais bien moi, purement et simplement. Il ne s'agit donc pas de se "replier sur soi" ou de se contempler le nombril, de tomber dans le narcissisme ou de cultiver l'égoïsme, mais de plonger dans le Moi pur. "Pur", c'est-à-dire sans identification aucune. "Je suis", sans m'identifier à ceci ou à cela. La pure et simple conscience de soi, sans saisie d'aucun objet. 

En pratique, je reviens vers moi, non vers une idée. Et, à chaque fois que je prends conscience que je m'identifie ou que je m'accroche, même subtilement, à une pensée, je lâche, doucement et je replonge en moi, comme les rayons de lumière se résorbent dans le soleil. A chaque fois que je prends conscience que je "dis" quelque chose mentalement, même de manière subtile, je cesse et je plonge en moi.

Encore une fois, il ne s'agit pas de "m'intéresser à mes problèmes".

Or, cette clé de l'éveil est transmise aussi dans le Tantra.

Prenons l'exemple d'un yogi de la tradition de Kâlî, Râmyadeva (Bhāvopahāra) : 

 "Plonger l'attention en soi en retournant le regard quand on atteint la fusion totale" (pratyāvṛttyinayena svāvadhānaṃ vidhyāya, prāpte mahāsāmarasye, 17).

De même, le geste sacré (mudrâ) "est la Terrible (bhairavî) qui est à la fois lâcher-prise du regard tourné vers l'extérieur et stabilité de l'attention tournée vers l'intérieur" (iyam eva cāntarlakṣyabahirdṛṣṭibhāvena tyāgagrahābhyāṃ bhairavī, 31).

Donc, partout et toujours, tournons notre attention vers soi, vers la source même de l'attention.

mardi 13 février 2024

L'Occident a-t-il corrompu le yoga ?

Le yoga est-il "contrefait par les Blancs" ? C'est ce que dit le Monsieur dans cette vidéo (cliquer).

Or, le propos de ce Monsieur est abject.

Non seulement il dit des âneries, en plus il est raciste. Tout simplement.

Mais le plus grave n'est pas là. 

Le plus grave, ce sont les réactions des "Blancs" visés par ses insultes qui, non seulement se font rabrouer par ce personnage mal éduqué, mais en plus opinent du chef et trouvent bienséant de se faire ainsi chapitrer de la plus vile manière.

Or, de cela, je vois des exemples chaque jour. 

Et récemment même, dans les milieux spirituels autour de l'Inde. 

"Occidental" est systématiquement employé dans un sens péjoratif. Ce racisme qui ne dit pas son nom n'en est pas moins un racisme. Or, l'amour inconditionnel ne consiste certes pas à tolérer sans condition n'importe quel ignominie. 

Je vous aime tous. Mais j'aime encore plus la justice, la vérité et la dignité. Je ne vais donc pas me taire.

Où est-elle donc passée, la dignité de ces "Blancs" qui se laissent gifler par ces mains mensongères, sans moufeter, un sourire contrit aux lèvres et l'air penaud ?

Car enfin, le yoga est-il "contrefait", c'est-à-dire corrompu par les "Blancs" ?

C'est mensonge éhonté ou c'est ignorance crasse que d'affirmer cela !

N'en déplaisent aux contempteurs de l'Europe, c'est la tradition du yoga qui a inventé la quête assoiffée des pouvoirs surnaturels et "perfections" (siddhi) diverses. 

C'est la tradition qui a, la première et encore jusqu'à aujourd'hui, et sans attendre le vilain Occident, à commencé à proposer un yoga "mis à toutes les sauces" : 

yoga pour la santé, pour les pouvoirs occultes, pour voler, pour trouver des trésors, pour manipuler, pour séduire, pour rendre fou, pour tuer. Pour provoquer des fausses couches, pour pénétrer le corps d'autrui, pour ressusciter les cadavres, pour espionner, pour gagner les batailles, pour provoquer des fausses couches, pour aveugler, pour faire perdre la mémoire. 

Mais aussi... pour s'enrichir, pour devenir célèbre, pour rester jeune. Innombrables sont les pratiques de yoga pour vaincre le mal de tête ou de dent. Pour rendre la peau plus claire (tiens donc !), pour éliminer les cheveux blancs, pour augmenter la puissance sexuelle.

Combien de dynasties "royales" fondées par des yogis ? 

Ainsi, le chef actuel de l'organisation traditionnelle qui se targue de mettre le yoga au cœur de sa transmission, Yogi Adityanâth, est-il aussi le Premier Ministre de l'Uttar Pradesh en Inde, après une longue carrière politique. 

Cette "corruption" qui serait l'œuvre des "Blancs" est en réalité au cœur de la tradition du yoga, et ce depuis toujours.

Il y a un dernier argument en ce sens, et non des moindres : Les critiques adressées aux yogis et au yogas depuis l'intérieur même de ces traditions. Et aussi, les satires des moralistes sanskrits comme Kshemendra. Et de tant d'autres... Le Kali-yuga aurait-il donc débuté avec l'arrivée des Occidentaux en Inde ?

Enfin, il est bon de rappeler qu'une grande partie de la civilisation indienne est d'origine indo-européenne et, donc, "blanche". Au reste, innombrables sont les marabouts indiens (tântrikas, yogis, vaidyas...) qui proposent des remèdes miracles pour "blanchir" la peau, et il en a toujours été ainsi. Quelle hypocrisie d'accuser ensuite les "Blancs" de "contrefaire" une culture obsédée par la clarté du teint !

Est-ce à dire que le yoga hors de l'Inde ne prête le flanc à aucune critique ?

Nullement !

Et je me place au premier rang de ces critiques, comme ceux qui suivent mes écrits le savent.

Néanmoins, le phénomène de la "corruption" ou "marchandisation" du yoga :

1) il n'est pas nouveau, il existait bien avant l'arrivé des "Blancs" (mais lesquels ? les Indo-européens ? les Grecs ?).

2) il touche toutes les classes moyennes de la planète, dont les classes moyennes indiennes ; voyez par exemple "Sadhguru", champion de ce genre d'entreprise mondialiste ; son patriotisme affiché ne l'empêche nullement de ratisser "mondial".

D'autre part, le yoga "moderne" a apporté beaucoup à la tradition du yoga :

1) des pratiques, des postures, une finesse technique, 

2) une exigence éthique (voyez l'exemple de l'Ashtanga), des prolongements qui n'existaient pas dans la tradition, 

3) moins de superstitions (on ne mange plus de pilules au mercure),

4) une émancipation du féminin (alors que le yoga traditionnel est misogyne), et mille réflexions nouvelles.

J'ai entendu ce genre de propos racistes pendant des décennies. Depuis ma naissance, en fait. Je suis de cette génération qui a grandi dans le déni de soi. Mais je ne peux le tolérer, car c'est injuste et faux.

De plus, l'Occident est riche de bien des qualités et vertus que la "tradition du yoga" nous envie ou devrait nous envier. De fait, "l'Inde éternelle" ne craint pas d'imiter ou de plagier le vil Occident quand cela lui paraît servir ses intérêts.

Enfin, je ne marque même pas les erreurs de ce Monsieur sur la prononciation de "yoga" et "âsana", tant le ridicule est évident.

Donc, cessons de nous culpabiliser, de nous laisser insulter. 

Reprenons courage et dignité, fiers de notre héritage, le cœur et l'esprit ouverts, mais sans naïveté face aux envieux de tous bords.

mercredi 7 février 2024

Réconcilier ombre et lumière dans le Tantra ?

 Dans les stages de Tantra et dans la spiritualité contemporaine, on aspire à "accepter ses ombres et ses lumières". Il est parfois dit que c'est cela, l'idéal visé par le Tantra.

Mais dans les textes, les tantras, je ne vois rien de tel.

La non-dualité ne consiste pas à accepter sa part d'ombre avec sa part de lumière. En fait, je ne vois même pas à quoi cela correspondrait dans les tantras. La non-dualité consiste à réaliser la conscience d'unité au-delà des différences, puis à réaliser que les différences sont la manifestation de cette conscience une. Ensuite, on cultive cette conscience une dans les différences, et les différences (le monde, etc.) sont transformés en manifestations de l'unité pour de bon. 

Il n'est nulle part question de m'accepter "tel que je suis", de m'aimer, de m'admirer, de m'accepter dans toutes les facettes de ma personnalité. Il n'est as question de se répéter "j'en ai rien à foutre" comme un mantra salvateur.

Mais alors, pourquoi n'y a-t-il pas de coïncidence des opposés dans le Tantra ? Pourquoi n'y troue t-on pas cette doctrine de la réconciliation des différentes parties de la personne qui est devenu la marque distinctive du Tantra contemporain ? 

Tout d'abord, remarquons que cette doctrine, faussement attribuée au Tantra, provient d'un psychanalyste autrichien, K G Jung, disciple de Freud et fasciné par les phénomènes occultes. C'est aussi lui qui a popularisé l'idée selon laquelle la Kundalinî est une énergie psychique qui ouvre les sept chakras.

Dans le Tantra traditionnel, le but est tout autre. La Kundalinî est la conscience en tant qu'elle est parole créatrice, source de toutes choses, des langues humaines et du mental individuel. Les chakras sont un panthéon intériorisé, avec souvent moins de sept chakras.

Enfin, il ne vient à l'idée de personne d'accepter sa part d'ombre. Car l'ombre, c'est le Mal, et le Mal n'a pas sa place dans le Bien. Dans la lumière, il n'y a pas d'absence de lumière, pas d'ombre. En tous les cas, je ne vois pas, dans le tantras, l'idée de s'accepter tel que l'on est, avec tous ses défauts, égocentré, etc. Il n'y a néanmoins une affinité possible, mais basée sur une mécompréhension du Tantra. Le Tantra parle d'amour du Soi, non d'amour de soi. Il parle de se désinhiber, donc de laisser libre cours à ses tendances égoïstes, en un sens. Mais en les mettant au service du divin. Au fond, il s'agit de se mettre au service du divin, non de mettre le divin au service de ma personne. 

Cependant, le Tantra évoque des pouvoirs et, par ce biais, il peut sembler nourrir une forme d'égoïsme. De fait les tantras ne proposent pas seulement des méthodes de libération spirituelle, mais aussi des recettes magiques. Cela étant, il est bien précisé que la magie se paie par des rétributions karmiques fort douloureuses et longues. La magie est découragée. 

Le but du Tantra n'est pas de se résigner à être égoïste, mais de transcender l'égoïsme dans un Moi infini qui est la source de moi et de tous les autres. Il n'est donc pas question d'un compromis entre "le Bien et le Mal", une sorte de réconciliation, dont on ne voit d'ailleurs pas à quoi elle ressemblerait. Il est plutôt question de dépasser le bien et le mal dans la Source qui est le Bien parfait. Le but du Tantra n'est pas de me réconcilier avec mes remords ou de les endormir dans une profonde nuit où toutes les vaches sont grises, mais de reconnaître la Lumière et tout réintégrer en elle. Les sorcières sont alors transformées en fées. Mais elles ne restent pas sorcières.

Pour ce faire, une certaine transgression des conditionnements est légitime. Mais seulement en vue d'un Bien plus grand, plus fort, plus altruiste.

mercredi 31 janvier 2024

Se moquer de Descartes ?

 J'entends et je lis souvent des moqueries au sujet de cette phrase, que l'on attribue à Descartes : cogito ergo sum "je pense donc je suis". Selon certain, cette proposition voudrait dire que j'existe parce que j'ai des pensées. Ce qui impliquerait que je n'existerais pas si je n'avais pas de pensées. Ainsi, Descartes serait un imbécile. On se croit sage de le moquer. Il est vrai qu'aujourd'hui nous sommes tellement plus "inclusifs"... Descartes : un blanc, un Français, un mâle, un intello, un philosophe, un scientifique... Il est bien dans l'air du temps de se défouler sur lui.

Pourtant, qu'a-t-il dit vraiment ?

Si l'on cite le latin, on devrait citer ses Méditations métaphysiques. Que dit exactement Descartes ? Il cherche une certitude absolue, contre les sceptiques, pour fonder la connaissance. Pour cela, il doute de tout.

Finalement, il réalise que, s'il doute de tout, c'est qu'il existe. Mais qu'est-il ? Une conscience. Un pouvoir de réfléchir. Car en français, "penser" ne signifie pas "avoir des pensées discursives", avec des mots qui vous traversent la tête ; mais bien plutôt, "penser" vient de "peser", évaluer, estimer, apprécier, juger, et donc, réfléchir, méditer, cogiter, "prendre conscience de".

Regardons ce passage, dans la Méditation seconde :

"Nutriri uel incedere ? (...) Sentire ? (...) Cogitare ? Hic inuenio : cogitato est ; aec sola a me diuelli nequit. Ego sum, ego existo ; certum est."

D'abord, ce que je suis, "est-ce se nourrir, marche ?" Non.

Est-ce "sentir ?" Non

"Est-ce penser ? J'ai trouvé : c'est la pensée ! Elle seule ne peut être séparée de moi. Je suis, j'existe, c'est certain !"

Premièrement, il ne dit pas "cogito ergo sum" "je pense donc j'existe", mais "ego sum, ego existo" "je suis, j'existe". Il n'y a pas de "ergo" "donc". Ainsi, cela n'est pas un raisonnement : c'est une évidence. C'est l'individu qui se réalise comme conscience, plus immédiate que la chose la plus immédiate. En outre, "cogitato" c'est la "pensée", c'est-à-dire la faculté de "peser", de réfléchir : c'est la conscience.

Descartes n'est pas un imbécile. Fénelon, intellectuel rigoureux, mais aussi mystique accompli, l'avait bien vu.

Enfin, notons que ce mot de "cogitare" "penser" correspond au sanskrit "vimarsha" avec une remarquable exactitude. "Vimarsha" désigne en effet l'acte de penser, de juger, d'évaluer, d'apprécier, etc.

Or, c'est ce mot qui a été choisi par Utpaladeva, le grand philosophe du Tantra, pour décrire Shakti, inspiré en cela par l'emploi de ce terme dans les enseignements de la tradition de Kâlî. 

Les traducteurs du Tantra ont toujours affirmé que ce mot était intraduisible. Ils l'ont donc rendu par des paraphrases : "prise de conscience", "ressaisissement infini", "réalisation de soi". 

Mais cet embarras affiché n'est-il pas du au rejet de l'intellect et de la pensée qui caractérise les mentalités contemporaines ? 

Car enfin, "vimarsha" signifie simplement "pensée". C'est ce que les dictionnaires nous apprennent. Et ce que font le Tantra et Utpaladeva er Abhinavagupta, c'est seulement d'approfondir ce que signifie "penser". Shiva est "Apparaître", Shakti est "Pensée". Tout est Apparaître et Pensée, tout est engendré par cette relation.

Donc, je propose que l'on cesse de se moquer de Descartes - ce qui ne fait que nous ridiculiser - et que l'on commence à traduire "vimarsha" par "pensée", ce qui est la juste traduction. 

Ainsi commencerons-nous à mieux penser le Tantra. Ce qui ne serait peut-être pas de trop, à une époque où, pour la première fois dans l'Histoire de l'humanité, l'intelligence semble régresser.

dimanche 21 janvier 2024

La sagesse, à côté ?

Quand Zeus protège le Bouddha

 L'histoire de ces deux dernières générations nous a persuadé que la sagesse était Ailleurs - en Orient, en Amazonie - partout sauf ici. Remarquez ce deux poids, deux mesures : si un Français est fier de sa tradition, il est "ultra droite". Si un Sikh, par exemple, est prosélyte, ça passe tout bien, même auprès des adeptes de l'ultra-gauche !

Je propose un retour aux sources, basé sur les faits et raisonnable.

Notre source principale, c'est la civilisation gréco-romaine. Ainsi, savez-vous que la culture hellène avait existé en Inde ? Les plus anciennes sculptures bouddhistes sont grecques ! Le vajra, emblème du bouddhisme tantrique, c'est la foudre de Zeus. Et les plus anciens papyrus grecs ont été découverts en Inde à Aï Khanoum, ancienne cité grecque. L'un des papyrus s'est imprimé sur la terre sèche (!). Et vous savez de quoi il parle ? De la participation des choses de ce monde aux Essences divines. La théorie de la participation de Platon ! Selon les spécialistes, il s'agit peut-être d'un dialogue écrit par Aristote. En Inde : c'est là qu'on a trouvé les manuscrits les plus anciens de la philosophie grecques.

Et dans la cité grecque d'Aï Khanoum étaient aussi inscrites des stèles avec des maximes de la sagesse grecque, du genre "Rien de trop". La Grèce a ainsi légué à l'Inde l'astrologie, mais aussi de l'alchimie, et peut-être de la philosophie.

Nous avons aussi un dialogue entre un roi grec et un moine bouddhiste, les Questions de Milinda.

Il y a un très riche patrimoine, de nombreuses traces d'échanges entre l'Orient et l'Occident.

Mais notre patrimoine est lui aussi très riche.

Par exemple :

- le platonisme

- la tradition orphique, Empédocle

- Pythagore

- les présocratiques

- le néo platonisme

- l'hermétisme

- le stoïcisme

- la philosophie ancienne en général

- la mythologie

- la littérature grecque et latine

- l'alchimie

- l'astrologie et l'astronomie

- le gnosticisme

- la mystique catholique

- les vestiges de la spiritualité gauloise (Cernunnos, etc.)

Chaque jour je m'étonne un peu plus de la richesse de ce patrimoine et de la négligence dont il est victime.

Il ne tient qu'à nous d'être à la hauteur de cet héritage !

Socrate en Inde

___________________________


Traduction du fragment d'Aï Khanoum par le grand Pierre Hadot :

  < … nous affirmons que ce ne sont pas seulement> les choses sensibles <qui

5       participent  des Idées>, mais que les Idées <participent> aussi les unes des

         autres.

— Nous l'affirmons en effet, dit-il.

                   — Donc, <…> (ce Principe) <…>, qui est cause, ne participe pas des

10     mêmes êtres que sont les Idées, <…> il est cause de ce que les premières (les

         choses sensibles) <…> participent de celles-ci (les Idées), <…> semblablement (?)

         <…> 

Suivent 18 lignes, très corrompues (c'est-à-dire environ 80 mots) dans lesquelles on peut lire aition (Principe), heter[ais?] kath'ekastên [ideai?]s (les autres Idées prises individuellement), puis deux fois eidôn (Idées), probablement isotêtos (égalité), et aisthêtôn (choses sensibles).

Col. III

5       … de sorte que, à cause de ces mêmes raisons, la cause de la participation est nécessairement <…>, car chacune des Idées est immobile pour les raisons susdites

10     et aussi parce que la génération et la corruption des choses sensibles sont éternelles.

                   — Cela est nécessaire, dit-il.

15               — Mais alors il semblerait bien que ce dont nous parlons fût la principale et la première des causes.

— Il le semblerait à bon droit, dit-il.

20               — Car ce dont nous parlons <est> cause pour toutes choses et pour toutes les Idées … des unes des autres.

Suivent treize lignes très corrompues (c'est-à-dire environ cinquante mots), dans lesquelles on peut lire notamment outhen outhenos.

Col. IV

6       … car tu comprends, je pense, ce que je veux dire.

— Tout à fait, dit-il.

10               — Mais alors, si … sera premier … ne participe pas.

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Stèle et maxime grecque en Inde, du philosophe Cléarques de Chypre :

«Dans l'enfance, sois modeste. 
Dans la jeunesse, sois robuste. 
A l'âge mûr, sois juste. 
Dans la vieillesse, sois judicieux. 
A l'heure de la mort, sois sans affliction.»



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