mardi 28 mai 2019

lundi 27 mai 2019

Mes maîtres vivants


Dans l'idéal, il serait préférable d'avoir un maître.
Ou pas.

Dans les traditions, le maître est de fait un homme qui imite un génie spirituel. Par exemple, un lama tibétain est censé incarner la perfection d'un Bouddha. Un gourou imite Shiva, Vishnou, Krishna, Kâlî, etc. Un maître de Vedânta "représente" Shankara. Un directeur spirituel chrétien montre le Christ, un maître zen est censé être un Bodhidharma en chair et en os, etc. 

Mais, comme de fait bien souvent ce "maître vivant" (expression sikh/sant) est loin d'égaler le génie dont il se réclame, un ensemble de règles, de rituels et de symboles pallie cette infériorité. D'où la rigidité, le dogmatisme, la lourdeur des traditions.

Quand vous lisez Longchenpa et que vous vous retrouvez face à tel Rimpotché, fut-il doté d'un beau pédigré, un certain décalage est évident. En théorie, vous pourriez poser les questions que vous auriez toujours voulu poser à Longchenpa. En pratique cependant, les choses sont bien différentes. Le Rimpotché n'a souvent qu'une connaissance superficielle et passive de la pensée de Longchenpa. Quand vous le questionnez, vous avez l'impression d'appuyer sur un bouton et d'entendre une réponse toute faite. Le nombre des questions audibles par le Rimpotché est limité, de même que le nombre de réponses possibles. Si votre question ne rentre pas dans les cases, vous réalisez rapidement que votre interlocuteur ne fait que répéter, ne fait qu'imiter un ancêtre glorieux. Tel Rimpotché est un individu quelconque déguisé en Longchenpa. Mais il n'est pas Longchenpa.

Rares sont les gourous à la hauteur de leur tradition. Ils sont plus occupés à diriger la vie de leurs ouailles, à faire la promotion de leur tradition (ou leur propre promotion, la frontière n'étant pas toujours nette) et à gérer leur patrimoine.

Combien de maître "vivants" ai-je rencontré ? 
Pour moi, un maître vivant est un individu passionné par ce qu'il transmet, curieux et, surtout, capable de penser par lui-même et qui connaît à fond sa tradition, la philosophie dont il se réclame. J'ai connu peu de ces individus : Douglas Harding me vient à l'esprit en premier, et il portait, à sa manière, une certaine tradition de pensée ; ensuite Nyoshul Khenpo pour le dzogchen, l'un des rares, si ce n'est le seul, à paraître s'intéresser vraiment à son sujet. Et... je crois que c'est tout, parmi les "vivants" du moins. 

Mais cet adjectif convient-il ? 
J'ai d'autres maîtres, qui me parlent à travers leur parole, écrite dans des livres. Ces maîtres-là sont-ils moins vivants ? Quand vous faites l'expérience de la relative médiocrité des représentants de telle ou telle tradition glorieuse, vous revoyez - pourquoi pas ? - votre jugement sur les livres. 

De fait, dans ce rayon j'ai beaucoup de maîtres. Exigeants et puissants. 
On dit que d'un livre, on peut faire ce que l'on veut, et qu'il ne vous reprendra pas comme un "maître vivant" peut le faire. C'est faux. Combien de fois ai-je vu des "disciples" manipuler leur "maître" pour leur faire dire ce qu'il ne disait pas ? Alors qu'un livre est fixé : il dit ce qu'il dit. On peut lui faire dire autre chose, mais sa parole demeure, imprimée, obstinée. 
On dit aussi qu'un maître peut répondre à des cas particuliers. Mais comme je l'observais plus haut, c'est rarement le cas. Très rarement. Alors qu'un livre dit ce qu'il dit, et il invite ses lecteurs à penser par eux-mêmes, à aller au-delà de la lettre pour trouver des réponses à des questions nouvelles. Le "maître vivant" infantilise. Le maître-livre responsabilise (expression certes fort laide, mais vous m'avez compris).  

Parmi ces maîtres-livres, voici les principaux. En vérité, il y en a des centaines d'autres, dans toutes les traditions, mais je me concentre ici sur ceux qui me paraissent être ceux de toute une vie :

- Abhinavagoupta, la Lumière des Tantras, la Méditation sur le Poème pour la reconnaissance du maître, etc.
- Outpala Déva, le Poème pour la reconnaissance du maître (précisément).
- La Doctrine secrète de la déesse Tripurâ et la philosophie de la Reconnaissance en général.
- Douglas Harding, toute son oeuvre.
- Platon
- Plotin, Proclus, le "néoplatonisme" (un corpus énorme).
- Épictète, Sénèque, Marc-Aurèle, le stoïcisme (et ça remplace des wagons de "développement personnel" !).
- Hadewijch d'Anvers, Jean de la Croix, les mystiques catholiques, franciscains en particulier au XVIe/ XVIIe siècles. Une centaine d'auteurs.
- Longchenpa et quelques textes dzogchen.
- Les deux/trois principaux manuels de la Mahâmudrâ.
- Les Oupanishads, Shankara et Soureshvara.
- Tsongmi, pour le zen.
- Tchouang Tseu.

Voilà. Il me semble que ces auteurs sont de grands "maîtres vivants", vivants dans leur parole. Ce ne sont pas ceux que je "préfère" (je suis loin d'être toujours d'accord avec Platon ou les Stoïciens), mais, indépendamment de mes préférences, je constate en eux une grandeur singulière qui dépasse justement les questions de goût. Ils sont des maîtres. Pour toute une vie. Voire pour plusieurs. Ils ont une valeur objectivement universelle. Vous pouvez y revenir, encore et encore. Ils ne vous lâcheront pas. Ils sont toujours disponibles, silencieux, présents. En même temps, ils ne cèdent pas aux modes passagères et aux diktats du Marché. Ce ne sont peut-être pas des maîtres qui vous transmettent l'éveil d'un coup de baguette magique, mais ils font mieux à mon sens : ils nourrissent l'adulte en vous. Eveil et sagesse, simple, facile et accessible à tous : ils pointent votre essence parfaite et parlent d'une vie à partir de cette vérité. Ils sont les véritables maîtres vivants.


vendredi 24 mai 2019

Rien ne peut cacher la conscience - Coeur de la reconnaissance 4

Je suis tous les personnages. "Je suis", je me manifeste, je me réalise, je me perçois, je me désir, m'aime et me déteste, m'engendre et me tue, ainsi. Ce qui ne ruine pas la distinction entre Bien et Mal. 


La conscience est tout, créatrice, créature et création. Elle est le créateur. Elle est aussi bien l'acte de création. Et elle est l'objet créé. Tout cela est le même acte, la même activité, le même élan, analysé a posteriori
Et cette "vérité" est un fait. Comment la connaître ? En la reconnaissant en notre expérience. Cela suffit. Juste une attention spéciale. Le reste s'ensuit.
Quelles sont les conséquences ?
Voici la réponse de la philosophie de la Reconnaissance, résumée par Kshéma Râdja :

"De cette simple vérité, il s'ensuit que les formes, les moments et les lieux ne peuvent fragmenter l'essence de la conscience, puisque ces formes, ces moments et ces lieux ont leur source en la conscience et sont animés par elle. Cette conscience (présente à chacun de la manière la plus immédiate) est donc partout et toujours présente, toute entière et en sa plénitude."

En effet, si tout est conscience, rien ne peut cacher la conscience. Comment la lumière du soleil pourrait-elle cacher le soleil ? Comment les reflets pourraient-ils cacher le miroir ? 

Les trois états de conscience - veille, rêve et sommeil profond - ne peuvent cacher la conscience, car ils sont ses états, les manières dont la conscience se réalise, librement. Dualité (veille et rêve) ou unité (sommeil profond), la conscience dépasse et embrasse ces opposés, car elle est leur source. C'est elle qui choisit de se manifester ainsi ou autrement. La conscience est indépendante. Contrairement à une chose, qui ne peut qu'être ce qu'elle est, la conscience peut être autre chose que ce qu'elle est - car c'est justement ce pouvoir qu'elle est. Elle se ressaisit comme chose et reste pourtant elle-même, car c'est elle-même qui se manifeste librement comme chose. 

Comment le savoir ? Par l'expérience. En observant l'expérience. Dans la perception, je prends conscience de moi comme lumière qui se manifeste en manifestant les choses. Dans le souvenir, je prends conscience de moi comme au-delà du temps, libre à l'égard du temps, source du temps. Dans l'inconscience, je réalise ma liberté à l'égard de tout objet. Mémoire et oubli sont deux facettes de ma liberté. Création et destruction, vie et mort sont ma pulsation. 

Comment le savoir ? En observant l'expérience. Où apparaissent et disparaissent les chose ? En moi. Et dans le désir, dans l'élan, en particulier quand il semble violent, je réalise l'unité avec ce que je désir. Désirer, c'est être un avec ce que l'on désire. Cette unité est "recouverte" par les concepts, mais en réalité, il n'en est rien. 

Comment le savoir ? En étant attentif. C'est tout. Chaque instant est la preuve de la liberté de la conscience. Chaque instant est dévoilement de l'être, de l'essentiel, si vous préférez. Une vérité simple, des conséquences infinies. 

Rien ne peut me cacher. Je suis lumière qui jamais ne se couche. Je ne suis rien, mais j'embrasse et j'infuse tout. Je suis l'acte créateur, la racine, la souche insondable de l'arbre du monde. Simple et inépuisable. 
Rien ne peut me fragmenter : je n'ai pas de parties. Je suis simple. Mieux encore : la lumière simple que je suis se fragmente librement, sans cesser d'être simple. Je suis au-delà de toute fragmentation, mais je ne suis pas non plus prisonnier de ma simplicité, de mon unité. Je suis libre. Je suis liberté. Je me goûte, je me savoure sans attendre. Mais je suis aussi libre de jouer au jeu de l'attente. Je suis le présent que nul passé ne peut voiler, le présent qu'aucun avenir ne peut faire oublier. Mais je suis libre de jouer au jeu de la nostalgie, des regrets, de l'espoir et de la crainte, car je ne suis pas prisonnier du présent. Je suis libre. Je suis liberté. C'est cela "être conscient". Chacun le sait, chacun en fait l'expérience, car c'est l'expérience elle-même, c'est la vie elle-même. Mais moi, qui suis vous, nous, je joue à ne pas le reconnaître. Car je suis libre, libre de toute division ; mais aussi libre de me diviser, de ne pas rester confiné en ma simplicité. C'est le grand jeu, le grand drame, l'immense comédie que je suis, à la fois acteur et spectateur, bourreau et victime, auteur, spectacle, décor et personnage. 

Je ne suis pas une partie de la conscience universelle. Je suis toute la conscience universelle qui joue à se contracter, sans l'être réellement. Je me manifeste réellement ainsi, instant après instant. Chacun le sens bien, car la conscience ne peut jamais perdre entièrement conscience d'elle-même. Elle ne pourrait jouer à se perdre si elle se perdait complètement. Tout cela est donc l'illusion véritable d'un jeu réel, parfaitement sérieux et pourtant sans perte ni gains réels. Je suis la liberté même. Libre de me perdre, de me retrouver, de me perdre en me trouvant, de me trouver jusque dans ma perte. L'inimaginable est ma spécialité. 
Je suis libre. 

jeudi 23 mai 2019

La conscience est la voie, le moyen et le but - Cœur de la Reconnaissance 3

Circé la Magicienne


Dans le Cœur de la Reconnaissance, le maître cachemirien Kshéma Râdja (XIe siècle) nous transmet l'essence de l'enseignement de la Reconnaissance (pratyabhijnâ), qui est elle-même l'essence des tantras - de la réalisation de l'absolu :

"En ce monde, il y a des amoureux du divin qui, sous le coup de la grâce, aspirent ardemment à être tout entiers habités par le Maître suprême. (Mais) leur intelligence est bien faible, ils ne sont pas aguerris aux enseignements avancés de l'art de penser. C'est pour eux que je dévoile un peu de la vérité de l'enseignement  de la Reconnaissance du Maître en soi."

Hier comme aujourd'hui, les capacités intellectuelles varient. Beaucoup de gens sont effrayés par leur propre intelligence. Ils refusent d'en user et de l'exercer. Par peur, par inertie. Ou alors, ils ont vraiment une puissance intellectuelle moindre. 
Pourtant ils peut être de vrai "amoureux du divin" (bhakta) remplis d'un ressenti puissant. Mais il leur manque l'assurance d'une certitude rationnelle, fondée sur une claire reconnaissance du divin dans l'expérience commune.
Ne serait-il pas injuste que l'essentiel ne soit accessible qu'à certains ? Mais certains sont pris au piège de leur préjugés "Ah c'est intellectuel, c'est difficile, ça n'est pas pour moi". La Reconnaissance est pourtant une voie facile qui n'exige aucun effort de yoga, de postures, de technique de respiration ; elle ne nécessite l'adhésion à aucune religion, aucune dogme, aucune initiation ; elle ne requiert pas d'adopter des règles de vie spéciales. 
Mais la patience et la pédagogie sont à la mesure de l'infini. Alors le philosophe, en l’occurrence Kshéma Râdja, qui fut disciple et peut-être cousin d'Abhinava Goupta, résume pour "ceux dont l'intelligence est bien faible" l'essentiel de la philosophie de la Reconnaissance. 
Mais qu'est-ce que cette philosophie ? Quel est son but ? Sa méthode ? Que peut-elle nous apporter ? D'emblée, ce premier aphorisme, commenté par l'auteur lui-même, révèle tout cela :

"Pour cela, je révèle d'abord que notre propre Soi est la seule cause, partout et toujours, et aussi qu'il est le plus grand des fruits et qu'on peut l'atteindre facilement :"

Ainsi la Reconnaissance est la reconnaissance de notre Soi, de notre essence. Elle n'est pas la production d'un nouvel état de conscience, mais la pleine conscience de ce qui est déjà donné, à chaque instant, dans l'expérience la plus banale. Notre Soi, c'est ce qui ne peut pas ne pas être, c'est ce qui est toujours présent. Mais s'il est toujours présent, en quel ne l'avons-nous pas réalisé ? En ce sens que nous n'avons pas réalisé son étendue, l'étendue de ses pouvoirs (shakti). En réalité, nous sommes cette essence, ce Soi. Nous sommes ce pouvoir. Mais nous ne l'avons pas reconnu. Pourtant, c'est "facile" : cela ne dépend que de nous, et il n'est pas besoin d'une méthode spéciale. Il n'y a qu'à reconnaître ce qui est, mais que nous croyons être éloigné. Nous avons entendu parler de "Dieu" ou d'état sublimes ; mais nous croyons que ces réalités sont lointaines. D'autre part, nous connaissons notre Soi, puisqu'il est conscience ; mais nous croyons que la conscience est un phénomène parmi d 'autres, banal et sans rapport avec le divin. La reconnaissance consiste à détruire ces préjugés et à reconnaître le divin comme conscience :

"La conscience est libre. Elle est la source de toute réalisation. 1

Seule la conscience est la source, c'est-à-dire la cause (de tout). Elle est la Puissance suprême, la Maîtresse inséparable du Maître divin, car elle est simplement un pouvoir de prendre conscience, absolument libre et indépassable. Elle est la source de tout, depuis l’Éternel Shiva jusqu'à la matière solide. Elle est la source de toute réalisation, c'est-à-dire de la création et de manifestation de tout - manifestation qui consiste en manifestation consciente -, et aussi elle est cause de la résorption de tout, c'est-à-dire du fait que tout repose dans le Sujet suprême."

"La conscience est libre" : en fait, elle est la réalité même. Toute la Reconnaissance est tendue vers cette vérité. C'est sa spécificité. La conscience n'est pas seulement "libre de", c'est-à-dire transcendante, au-delà du changement ; mais elle est, en outre, "libre pour", capable de créer, d'agir ; ce qui suppose un désir d'agir.
Car tout est conscience. En effet, rien ne se manifeste jamais en dehors de la conscience. La conscience est donc tout. Et elle est aussi la cause de tout. Elle est donc omnisciente et omnipotente. Elle est donc souveraine, libre. Elle est donc Dieu.
Tout vient d'elle, subsiste en elle, et disparaît en elle, comme des vagues dans l'océan. Car qu'est-ce que c'est, "exister" ? C'est être objet pour moi, pour la conscience. Je suis conscience. Mais alors d'où vient l'objet ? L'objet, c'est moi, qui me manifeste librement ainsi, comme objet. Tous les états de conscience, depuis le plus élevé jusqu'à la matière, apparemment inerte et inconsciente, sont les manières dont la conscience prend conscience d'elle-même.
Elle est donc aussi la voie et la méthode : toute expérience est déjà la manière dont la conscience se réalise (siddhi) elle-même, car rien d'autre n'est possible. Une méthode pour réaliser la conscience ? Mais cette méthode dépendrait de la conscience ! A quoi bon une lampe pour éclairer le soleil ? Tout est déjà conscience, il ne peut en aller autrement. Je suis la Lumière du monde, de tout ce qui apparaît, réel ou imaginaire. Même le monde "en dehors de ma conscience" n'est qu'une représentation, une idée qui apparaît maintenant, dans l'éternel présent, dans la conscience. 
Et le but, le "fruit" (phala) est aussi conscience, car la conscience est liberté. Or, la liberté est félicité (ânanda), joie et extase créatrice, vertige de l'indépendance qui joue à être dépendante, délectation de cette profusion d'expériences qui surgissent spontanément.
La conscience est donc tout : réalité, voie et but.

Mais comment le sait-on ? N'est-ce pas là une affirmation dogmatique ? Une simple opinion parmi d'autres ?
Non, car l'auteur vient déjà de donner des arguments forts : rien n'est possible sans conscience, en dehors de la conscience ; donc tout est conscience et la conscience est cause de tout. Il n'explique pas ces arguments. Il est vrai qu'ici, il les mentionne de façon très elliptique. Mais dans les textes originaux de la philosophie de la Reconnaissance, dans le Poème pour la reconnaissance du Maître en soi (Îshvara-pratyabhijnâ) et ses commentaires, ces arguments sont détaillés. En fait, ils occupent la plus grande place. Ils consistent, en gros, en des "suppositions nécessaires" (arthâpatti). Une supposition nécessaire est un type de raisonnement qui consiste à montrer que A a pour cause B, parce qu'il n'y a pas d'autre façon de l'expliquer. Comme dans une enquête policière, on élimine les hypothèses, la dernière étant "nécessairement" vraie. Par exemple, si Pierre prend du poids, mais qu'il ne mange pas pendant la journée, alors il doit nécessairement manger pendant la nuit. Dans le cas de la conscience, les alternatives sont, de même, éliminées, et il ne reste qu'une seule possibilité : la liberté de la conscience. Les alternatives, ce sont la matière, les habitudes venues des vies passées, ou une conscience transcendante, mais comprise comme une substance inerte, à l'image d'un miroir qui reflète sans réfléchir. L'auteur y reviendra, car c'est important.
Cependant, la Reconnaissance ne se réduit pas à une inférence. La connaissance du Soi n'est pas seulement conceptuelle. Elle est directe. Les raisonnements par "supposition nécessaire" servent deux buts : éliminer les croyances erronées qui cachent l'expérience toujours déjà présente ; et contraindre la conscience à se retourner vers elle-même. Autrement, tous ces raisonnement ont un but précis : ramener notre attention vers l'expérience, nous forcer, en quelque sorte, à regarder ce qui se passe, que nous percevons certes, mais avec une attention superficielle. Il s'agit se revenir à l'expérience brut pour savourer ce qui se présente et prendre conscience du miracle d'être. Car la Reconnaissance ne s'appuie pas seulement sur des raisonnements, mais aussi sur l'observation de l'expérience. Kshéma Râdja nous guide dans cet examen :

En effet, quand la conscience se met en mouvement, le monde s'éveille et s'organise. Et, quand elle s'arrête, il s'endort. L'expérience de chacun suffit à faire voir cela. 
En revanche, ce qui est autre que la conscience - comme par exemple l'illusion de la dualité et la matière - n'est jamais la source de rien dans la mesure où, séparé de la Lumière consciente, cela n'existe pas, attendu que cela ne se manifeste pas. Mais si autre chose que la conscience se manifeste, alors, là encore, la conscience est la seule source, puisque cet "autre" se manifeste en étant Lumière consciente, et que justement la conscience est cette Lumière. Ce qui est autre que la conscience, en revanche, est incapable (de se manifester par soi-même ou de manifester autre chose).

Que nous révèle l'observation de l'expérience ? Tout.
"Quand la conscience se met en mouvement, le monde s'éveille et s'organise". Le monde commence avec la conscience. Son activité est conscience. Sa disparition est un acte de conscience. "L'expérience de chacun suffit à faire voir cela. " Cela n'est pas une vérité mystérieuse réservée à une non moins mystérieuse élite, mais un simple fait. Ça n'est pas une expérience spéciale. C'est l'expérience universelle, commune, celle de tous les êtres doués de conscience. 
Mais le monde n'existe-t-il pas en dehors de la conscience que j'en ai ? Là encore, l'expérience répond. Si une chose ne se manifeste absolument, alors elle n'est absolument pas une chose. Il n'y a aucun moyen de savoir si elle est monde ou néant, si elle "est" ou pas. Même le "x" le plus vague qui soit est encore un objet, quelque chose "pour moi". C'est donc un acte de conscience. Et si j'ai conscience de ce monde "indépendant de ma conscience", alors il est clair qu'il ne fait qu'une avec l'acte de conscience qui le manifeste, que cela s'appelle "perception", "imagination" ou "mémoire". Voyez par vous-même : pouvez-vous exclure la conscience ? Ce serait comme chercher un lieu, un espace... en dehors de l'espace. Un espace délimité, celui de cette pièce par exemple, a un "dehors". Mais l'espace lui-même est sans limites : parler d'un espace extérieur à l'espace ne signifie rien. Ce sont juste des mots. De même, tous nos discours sur un monde "à l'extérieur de la conscience", n'est qu'un discours qui a lieu "dans" la conscience, c'est-à-dire qui n'est rien d'autre que cette libre activité que l'on nomme "conscience". Il n'en a jamais été autrement, il n'en ira jamais autrement. Ça n'est pas un nouvel "état de conscience", c'est la conscience qui prend pleinement conscience d'elle-même. Ni plus, ni moins. C'est simple, facile, évident. Pas besoin d'attendre la grâce, le gourou, une méthode, la posture ou une expérience spéciale. Juste examiner ce qui est donné ici et maintenant.

mardi 21 mai 2019

La pratique du A

La lettre A en écriture "citadine"

La philosophie de la Reconnaissance (pratyabhijnâ) enseigne à travers des concepts. Le rituel de la Triade (trika) enseigne à travers des symboles.
L'un de ces symboles est le son A.

Dans le Tantra de la reconnaissance de soi (Vijnâna Bhairava Tantra), la pratique du A est ainsi décrite :

Déesse !
On doit réciter le [son] "a"
sans nasalisation ni expiration sourde.
Alors jaillit soudain le flot de connaissance sacrée,
le Maître des maîtres. 90

Le commentaire explique que le son A, récité sans "nasalisation" (sans "point", bindu) ni "expiration sourde" (sans "éjaculation d'air", visarga) symbolise l'absolu "qui consiste à ne penser à rien" et qui est indiqué par la Grande Oupanishad sylvestre (Brihad-âranyaka):

Ainsi est l'Immense, sans second.
En vérité, tout cela est l'Immense.

Mais c'est aussi un "ressenti". Il suffit d'énoncer A, physiquement ou non, pour entrer dans le "torrent de la connaissance sacrée", la simple présence qui est le fond vivant de toute chose. Ce "torrent immortel" (amara-ogha) est le flot de la conscience, l'extase qui est l'absolu qui crée toute chose en se créant lui-même. C'est une présence qui illumine les pensées (qui ne se laisse pas prendre en elles) et qui se manifeste comme ces penses (qui n'est pas enfermée en elle-même). Comme un miroir, elle est à la fois indestructible par ses reflets, et ouverte, réfléchissante, fluide, infiniment plastique. 

Ce A est l'absolu silencieux par excès d'éloquence dont parle ce vers :

Il le proclama par l'absence de paroles.
Ecoutez ! Il devint silencieux.

Vâmana a expliqué la pratique du A dans sa Réalisation non-duelle (Advaya-sampatti) :

Au centre du Cœur, il y a un lotus.
Sur sa corolle trône le Soi
[sous la forme de A].
A la fin de A, il y a ce que l'on peut décrire 
comme un frémissement :
la simple conscience, subtile, transcendante.

Mais l'absolu n'est pas un eunuque. Il est "accompagné de sa Puissance", symbolisée par HA, la conscience de soi, la prise de conscience, aussi appelée "vague", "désir", "élan", "pensée" :

Cette Puissance du souffle 
résonne pour ainsi dire
dans le corps comme HA.
Le yogî la reconnaît clairement
lovée au creux de l'oreille.

 Le A symbolise l'absolu comme silence, car A est présent en toutes les autres syllabes. Comme aucun corps ne peut exister si l'espace ne lui donne pas lieu, aucun son ne peut être proféré sans A.
De plus, A est le son le moins différencié, jaillissant, guttural, du fond de la gorge. Il accompagne et inspire la méditation de Shiva. Blanc, sa lumière brille dans le cœur et est ressentie comme une clarté qui jaillit par les yeux et l'ensemble du corps.
HA est la Déesse, inséparable de A. HA est réalisation de A. 
Or, quand A et HA s'unissent, ils engendrent l'individu, M,
noté par un point.
Et tout cela ensemble, AHAM,
signifie "je", car tout est réalisation de "je", 
toute expérience, instant après instant,
est réalisation de soi.

La pratique de A est donc la pratique du silence intérieur, absolument simple, paisible, limpide, transparent, nu, "sans penser à rien", sans soucis.

lundi 20 mai 2019

La connaissance intellectuelle est plus importante

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C'est un cliché de la spiritualité contemporaine mondialisée : la connaissance intellectuelle est, au mieux, secondaire ; au pire, elle est un poison.

Or, cette opinion est parfois propagée au nom du shivaïsme du Cachemire, comme si c'était la doctrine du shivaïsme du Cachemire.

Mais il n'en est rien. Bien sûr, l'expérience spirituelle est en partie immédiate, et donc non-intellectuelle, car l'expérience spirituelle, selon le shivaïsme du Cachemire, est l'expérience immédiate de la conscience. Mais pas seulement : cette expérience est toujours déjà présente, car tout est conscience. Pourtant, elle passe inaperçue. Pour que la conscience se réalise pleinement, il faut donc autre chose. Et cette autre chose, selon le shivaïsme du Cachemire, c'est une connaissance intellectuelle, discursive, verbale, qui seule a le pouvoir de contrecarrer l'ignorance intellectuelle, car elle opère au même niveau qu'elle.

Abhinava Goupta affirme explicitement la supériorité de la connaissance intellectuelle dans le premier chapitre de sa Lumière des Tantra (Tantrâloka, I, 43-45) :

"L'initiation rituelle et autres [moyens non-intellectuels] détruisent l'ignorance spirituelle (paurusham). Mais cette connaissance spirituelle ne se manifeste clairement qu'après la disparition du corps.
En revanche, quand l'ignorance intellectuelle disparaît parce que se manifeste la connaissance intellectuelle, alors la liberté en cette vie même [se manifeste clairement], présente comme [un fruit] dans la paume de la main !
L'initiation elle-même ne libère vraiment que quand elle est précédée par la connaissance intellectuelle. Même dans ce cas, la connaissance intellectuelle est le plus important."

Je n'invente rien. Ce point est suffisamment important pour qu'Abhinava Goupta le souligne dès le premier chapitre de son œuvre principale, consacré justement aux "bases", c'est-à-dire aux principes qui servent dans tout l'enseignement du shivaïsme du Cachemire.
N'en déplaise aux radicalisés du ressenti et autres ayatollahs du "percept pur", l'intellect joue un rôle central dans le shivaïsme du Cachemire.

Transcender et inclure.

jeudi 16 mai 2019

"Tout ça c'est des concepts !"

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La notion de "concept" est familière de ceux qui s'intéressent à l'éveil et à la non-dualité.
On entend de plus en plus dire "Mais c'est un concept !" Le plus souvent, c'est un usage rhétorique, une manière de dire que telle chose est "imaginaire", sans importance, pas réelle.

Le terme vient du sanskrit vikalpa, qui désigne "ce qui est construit". Mais construit comment ? 
Comme ce concept de "concept" est un concept bouddhiste, il faut aller du côté des grands philosophes bouddhistes pour le comprendre. La figure d'importance ici est Dharmakîrti.

Un concept donc, c'est une représentation construite en distinguant une chose, "x", de ce qu'elle n'est pas "non-x". C'est donc un objet élaboré par un acte d'exclusion, apohana. Par exemple, "vase" est un concept, car c'est un objet construit par exclusion de tout ce qui n'est pas le vase. Un concept est toujours accompagné de mots, exprimé par un ou plusieurs mots, mais un concept peut être une perception. Premièrement, parce qu'un concept peut lui-même être perçu de la manière la plus immédiate (j'ai conscience que je suis en train de penser à un vase), mais aussi parce que la plupart de nos perceptions, au quotidien, résultent d'une opération d'exclusion. Quand j'écoute une discussion dans le brouhaha, il faut bien que ce brouhaha soit exclu, "néantisé" comme dit Sartre, pour que les paroles qu'on m'adresse se découpent nettement et que la communication (vyavahâra, communication et vie quotidienne en général) puissent avoir lieu. Mais aussi pour percevoir ce vase, tout simplement. Le cerveau reçoit, à chaque instant, une masse incroyable de données (data). Ce chaos doit être filtré pour devenir praticable. Sinon, comme quand je suis ivre ou autiste ou paniqué, etc., je ne perçois plus le vase. Cela nous paraît évident quand nous sommes en bonne santé. En réalité, c'est un processus complexe et fragile, exploré par les philosophes bouddhistes et confirmé par les neurosciences. 
Donc tous les objets sont des concepts. Des constructions. Ce vase que je vois n'est, même au premier instant de la perception et avant tout jugement explicite, plus une totalité donnée, mais le résultat d'une opération d'exclusion. D'ordinaire, cela passe si vite que cela passe inaperçu.

Mais tout ce qui a un nom est-il un concept ?

Selon la philosophie de la Reconnaissance, il y a une exception : la conscience, ainsi que ses synonymes "désir", "liberté", "je", "élan", "émerveillement", "action" et ainsi de suite.

Et pourquoi la conscience n'est-elle pas un concept ?
En effet, à première vue, "conscience" n'existe qu'en relation d'exclusion à "inconscience". De plus, la conscience porte un nom. Elle a donc les caractéristiques d'un concept.

Mais selon les philosophes de la Reconnaissance (Outpala Déva et Abhinava Goupta), il n'en est rien. En effet, la conscience n'est pas et ne peut pas être un concept, pour une raison simple : il est impossible d'exclure la conscience de quoi que ce soit. Perception, imagination, souvenir, hallucination, méditation... tous ces actes de représentation sont des actes de conscience. Tout est conscience. Même l'acte qui exclut, apparemment, la conscience, comme "Ah, j'étais inconscient et je viens de me réveiller", n'est qu'un acte de conscience. Je prends conscience que j'étais inconscient, ce qui veut simplement dire que le flot habituel des objets s'est interrompu brusquement, avant de reprendre, tout aussi brusquement. Mais cette "inconscience", j'en ai bien conscience ! Impossible de nier la conscience, puisque même l'acte qui la nie ne fait encore que l'affirmer. Cet étrange pouvoir de se manifester jusque dans l'absence est la "liberté" qui est l'essence même de la conscience. Donc la conscience n'est pas un concept.

En outre, toujours selon la Reconnaissance, le premier instant de toute expérience est un élan dans lequel le sujet et l'objet sont indifférenciés : en portant attention à ce premier instant, qui reste présent ensuite mais qui paraît recouvert par les concepts, je fais l'expérience de l'absolu, de la véritable "pleine conscience", avant tout concept, source de tous les concepts.

Mais le plus important est peut-être de réaliser que moi, conscience, je suis la source des concepts. Soit, en effet, je crée ces concepts (=ces objets) directement en tant que conscience universelle (c'est le cas dans la perception ordinaire et dans les songes qui échappent au contrôle individuel), soit secondairement, en tant que conscience universelle identifiée à telle personnalité (sachant qu'un même individu peut héberger des personnalités multiples). Un concept n'est pas une pure erreur (car alors, comment expliquer son efficacité ?) ni une illusion irrationnelle, mais une manifestation de la conscience : conceptualiser, c'est être l'absolu qui se réalise ainsi, de cette manière, par jeu et non par manque.

mardi 14 mai 2019

Rencontres mai-juin 2019




                               


Du 18/05/2019 au 19/05/2019 - Domaine de Chardenoux (Saône et Loire)



Rencontres multitraditions
« Le désir,
ami ou ennemi ? »

Quand on entre sur la voie spirituelle, on se rend vite compte que la question du désir est centrale. Que faire ? Comment le considérer ? L'accueillir et le vivre comme le sel de la terre ? Ou le bannir comme le poison qui nous coupe de l'essentiel ? Le chérir, et s'écrier « sans désirs, je meurs » ou le rejeter complètement par les trois grands vœux de pauvreté, chasteté et obéissance, comme le font les moines de beaucoup de traditions.
Mais qu'est-ce que le désir ? D'où vient-il ? Quelle est sa raison d'être ? On ne peut apprendre à le gérer sans d'abord répondre à ces questions. Ensuite, on se rendra compte qu'il y a plusieurs voies, plusieurs façons de faire pour le gérer, et il faudra choisir. Chaque voie spirituelle a sa propre stratégie - et elles peuvent être contradictoires.
C'est de cela qu'il va être question pendant ce weekend pour lequel nous avons invité 5 intervenants de traditions différentes.

Une large place sera consacrée aux échanges, entre intervenants et avec les participants.


>>> David Dubois
Philosophe, spécialiste du Shivaïsme du Cachemire

>>> Marguerite Kardos
Orthodoxe, disciple d’un maître égyptien, spécialiste des
Dialogues avec l’Ange.

>>> Philippe Dautais
Directeur du Centre Sainte-Croix en Dordogne, prêtre de l'Eglise orthodoxe, délégué de l'Eglise orthodoxe à l’œcuménisme et à l'inter-religieux et auteur de plusieurs ouvrages.

>>> Yacine Demaison
Initié à la voie spirituelle soufie, transmet les enseignements de la Tradition reliée à l’Unité du Vivant. 

>>> Lama Lhündrup
Lama du bouddhisme tibétain, relié à Karma Ling

>>> Paul Grant
Grand spécialiste du santoor et sitar, il donnera un concert le samedi soir.





Du 29/05/2019 au 02/06/2019 - Domaine de Chardenoux (Saône et Loire)

20eme Festival Lumières de l’Inde
L’héritage spirituel et artistique de l’Inde
Ce programme de quatre jours est une célébration de la Vie et des Valeurs éternelles à travers les formes spirituelles et artistiques de l’Inde. Il est composé d’une alternance d’enseignements, d’ateliers, de concerts de musique et danse, et d’un rituel. Avec la participation de 14 intervenants.

Philosophie et sagesse
• Swamini Umananda
« Comment réussir sa sadhana tout en ayant une vie professionnelle et familiale »
• David Dubois
« Le Shivaïsme du Cachemire et ses spécificités »

Musique instrumentale et chant

• Barun Kumar Pal - Hansa veena
• Prabahat Rao - Chant indoustan
• Radhika Samson - Sitar
• Sougata Chowdhury - Sarod
• Nabankur Battacharya - Tablas
• Pulkit Sharma - Tablas
• Massoud Raonaq - Chant dhrupad et ghazals
• Alain Chevillat - Kirtan

Danse et yoga

• Maitreyee - Danse kathak
• Radhika Samson - Danse Odissi
• Dominique Lemaitre - Yoga
Saptah dansant
 
Installation par deux prêtres indiens
d’un temple à Hanuman dans les bois de Chardenoux.
Cérémonie d’insufflation du Prana consacrant la murti.








Du 07/06/2019 au 10/06/2019 - Pierre Chatel

L’Art du désir : comment jouer la vie selon le Tantra du Cachemire 
les 8, 9 et 10 juin 2019 infos et inscriptions : cliquer ici 


Ce weekend d’initiation et de méditation aura lieu dans le magnifique monastère de Pierre-Châtel


Le désir... lui présent, nous souffrons. Mais lui absent... nous souffrons aussi ! Le désir se fait désirer. Mais il semble aussi nous rendre esclaves de toutes sortes de choses et d'être, à commencer par notre ego. Faut-il se résigner à le satisfaire ? Ou travailler à s'en détacher ? Ou bien l'orienter vers des buts meilleurs ? Que faire du désir et des émotions dans un quotidien éclairé par une recherche spirituelle ?
Face à ce problème de chaque jour, la tradition du Tantra du Cachemire nous propose une approche par l'expérience directe, par le ressenti viscéral. Quand on plonge en sa source, le désir n'est plus séparation, mais nectar d'unité.

Durant ces trois jours, nous méditerons les enseignements précis de la tradition et nous explorerons ce ressenti dans la méditation, afin de le reconnaître en son jaillissement jusqu'au cœur du quotidien, pour toute la vie. Le désir et les émotions seraient-ils l'énergie de l'éveil ?

David Dubois est philosophe, étudie le sanskrit et le Sivaïsme du Cachemire depuis 1990 et a séjourné plusieurs années en Inde au cours de nombreux voyages.  
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