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Chapitre 11 : conclusion
Un être qui qui considère tout ceci
Avec l'attention qui convient
En viendra bientôt à se dire cela : 1
"Parce que je suis libre,
J'ai joué à oublier que je suis Śiva.
C'est alors que, ne voyant que la dualité,
Je suis devenu captif des chaînes
Du péché et du vice et autres (couples de contraires),
Je vis des expériences de bonheur et de malheur,
Transmigrant que je suis,
Résigné à la faiblesse[1]. 2
Heureusement, Śiva a maintenant
Déversé sa grâce sur moi,
Puisque je m'intéresse à (son) enseignement.
Puisse mon amour pour Śiva
Croître encore et encore ! 3
Puissé-je me dévouer au service
D'un vrai maître avec amour
Et recevoir l'initiation de Śiva[2].
Puis, méditant[3] sur la voie de Śiva,
Puissé-je pacifier mes difficultés sans exception.
Obtenant alors une relative liberté[4],
Aimant aussi mon pays
Et participant au bonheur de ma nation,
Puissé-je réaliser directement
Mon essence suprême. 4-5
Aspirant au bien de tous,
Respectant les coutumes enseignées dans le Pays des Seigneurs[5],
Faisant ce qui doit être fait,
Puissé-je obtenir
En contemplant de toutes parts
Le jeu du Soi". 6
De fait, les obstacles s'aplanissent peu à peu
Devant qui a la foi[6]
Et l'intelligence devient limpide.
Alors, alors, son amour
Pour Śiva devient profond[7]. 7
Le chemin de sa vie
Est alors tissé de bien-être.
Il atteint le contentement
Et il se détache (sans effort) des plaisirs des sens[8],
S'attachant au contraire à rendre service aux autres. 8
Et en cet être
Une grâce pénétrante s'affermit en un instant.
Voilà pourquoi il passe en l'état de Śiva
Sans délai, en ce corps même. 9
A la fin de sa vie[9],
Il passe en l'état de Bhairava[10].
Ou bien, il ne fait qu'un avec Śiva.
Il savoure alors sans fin
(La joie) d'être Śiva,
Indépendance absolue de Śiva. 10
L'enseignement de Śiva,
Douceur du chant de la liberté,
Révélateur de la liberté,
Offre ainsi aux vrais amoureux
Tant la jouissance que la liberté[11]. 11
Cette composition inédite
De l'enseignement
Consiste en deux cent vingt et cinq
Versets dans le mètre gīti.
Elle a été achevée en l'an 5034 des Sept Sages[12]. 12
Vingt quatre versets dans le mètre gīti
Lui ont été ajouté
Dans le chapitre sur le yoga
Lors de la pleine lune
Du mois de Caitra de l'an 2031 de Vikrama[13]. 13
La liberté absolue
De Śiva, notre vraie nature,
Incarnation même d'une pure indépendance
Au beau visage emprunt de bienveillance
A été (ainsi) décrite un brin
(Par celui) qui n'est qu'en partie libre[14]. 14
Ô vous qui êtes éveillés !
Réaliser tout ce qu'il y a à réaliser
En méditant pour vous-mêmes[15]
La perfection de votre (vraie) nature
Dans cet enseignement de Śiva
Qui est comme un miroir de la liberté[16]. 15
Ô gens de bien !
Si vous être plein du désir
De connaître
Le jeu de votre propre liberté
Alors lisez le Jeu du Soi[17]
Tombé du lotus du visage
Du maître sublime. 16
Puisse Śiva se réjouir
De ce traité composé
Par Balajinnātha,
Natif du Cachemire,
Qui s'intéresse à l'enseignement de Śiva
Et trouve la paix dans l'amour des pieds [18]
Du Grand Seigneur. 17
Balajinnātha Paṇḍita, Le Miroir de la liberté (Svātantrya-darpaṇaḥ), Munshiram Manoharlal, Delhi, 1993
[1] Litt. "habitué a n'avoir que peu de pouvoir".
[2] En effet, le maître est celui par qui Śiva octroie la grâce sous la forme d'une initiation, ici synonyme de délivrance.
[3] Au sens philosophique (vicāra).
[4] La liberté politique, sociale et économique évoquée dans le chapitre huit.
[5] Ārya : l'Inde. Ou, plus exactement selon les tantras de Śiva, n'importe quel pays dans lequel le śivaïsme sert de norme. Ce qui fût le cas en de nombreuses contrées autres que l'Inde, telles que l'Afghanistan ou le Cambodge.
[6] śraddhā : "le fait de mettre son cœur en", la confiance.
[7] gāḍha : "intense".
[8] Il s'agit ici d'une fascination pour les choses en général, obnubilation mêlée paradoxalement de torpeur.
[9] "A la fin du corps".
[10] Selon l'A., un Bhairava est une sorte d'officier du seigneur Śiva, œuvrant pour le salut des êtres, un peu comme les bodhisattvas bouddhistes ou les saints chrétiens.
[11] La liberté par rapport aux conditions de cette expérience et à ses conséquences (le karma). L'adepte vit dans le monde, libre du monde, participant à sa création.
[12] 1958 A.D.
[13] 1974 A.D.
[14] Jeu de mots difficile à rendre. La liberté n'a été révélée que partiellement, par l'auteur qui est partiellement libre.
[15] pratyavamarśa.
[16] D'où le titre : ce texte est comme un miroir limpide dans lequel nous pouvons reconnaître notre vraie nature absolument souveraine.
[17] L'A. renvoie ainsi humblement son lecteur à l'enseignement de son maître, Amṛtavāgbhava. Pour avoir un aperçu de sa vie et de son œuvre, voir notre traduction du Siddhamahārahasyam. Malheureusement, nous 'avons pus obtenir un exemplaire de ce Jeu du Soi ( Ātmavilāsa). En note, l'auteur conseil du reste la lecture du Siddhamahārahasya, ainsi que du Traité en vingt stances (Viṃśatikāśāstra).
[18] En Inde il est de coutume que le disciple masse tendrement les pieds de son maître, spirituel ou autre.
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