26.
Le maître doit répondre : "Tu ne mérites pas de voir les choses ainsi, ô toi qui es plein de vertus ! Car parler ainsi est défendu. Pourquoi cette vision dualiste n'est-elle pas permise (par la Tradition) ? Le maître doit alors citer (ces passages) :
"Il est différent. Je suis différent : celui qui dit cela ne sait pas"
"L'absolu abandonne celui qui voit l'absolu ailleurs qu'en lui-même"
"Celui qui ne voit que la dualité[1] en ce monde va de la mort à la mort"
27.
Ces passages de la Révélation suffisent à montrer que le cycle des renaissances vient de la croyance en la dualité.
28.
Par ailleurs, des milliers (de passages) montrent que la délivrance nait de la vision de la non-dualité : ainsi, après avoir révélé que le Soi est le Soi suprême
"Ce Soi immédiatement présent : c'est cela que tu es"
et avoir déclaré que
"Celui qui a un guide connaît l'Esprit",
ils montrent la délivrance simplement en faisant prendre conscience de la non-dualité:
"Pour celui qui (a un guide), la distance qui le sépare (de l'absolu) n'est que la distance (crée par la croyance en la dualité)". L'inexistence du cycle des renaissances est illustrée par l'exemple de l'ordalie dont l'innocent sort indemne et sans brûlure, alors que l'irruption du cycle des renaissances est illustrée par l'exemple du voleur qui est brûlé par la hache chauffée au rouge[2].
29.
Le passage qui commence par "En ce monde, que l'on soit un tigre ou bien (n'importe quelle créature, on est seulement l'absolu)", montre la non-dualité. Puis, ayant déclaré que "(celui qui voit la non-dualité) devient le souverain (de tout)", ils montrent en chacune de leurs branches qu'au contraire, la vision dualiste est la cause du cycle des renaissances : "Ceux qui voient autrement ont un autre souverain, dans des mondes périssables". Par conséquent, tu as tort de dire que tu es un fils de brahmane de tel lignage, renaissant sans cesse, différent du Soi suprême.
Shankara, Méthode pour éveiller un disciple, c. 800
[1] Litt. "celui qui voit diversement".
[2] L'Inde a pratiqué l'ordalie, c'est-à-dire que quand un individu est soupçonné d'un crime, comme ici le vol, il doit saisir à mains nues une hache chauffée à blanc. S'il n'est pas brûlé, cela prouve son innocence. De même, celui qui est "innocent" de la croyance en la dualité n'est pas "brûlé" par le feu de la souffrance qui caractérise pourtant le saṃsāra.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Pas de commentaires anonymes, merci.