La conscience est l'essence de tout. Elle est à tout ce que le cœur est au corps. Or, elle n'a pas de forme, âkâra en sanskrit. A première vue, il est donc vain de chercher à la visualiser. Transparente, elle n'a nulle couleur. Limpide, elle n'a pas de figure propre. Sans visage, comment pourrais-je m'adresser à elle ? Partout et nulle part, elle est présente sur le mode de l'absence.
Néanmoins, la conscience se manifeste. Cela est certain, car tout cela est manifestation (prakâsha) animée par la conscience (vimarsha). Or, la conscience se manifeste selon nos désirs qui sont comme le prolongement contracté de son désir. Ainsi, j'écris en ce moment. Je peux imaginer. Et projeter des actions qui se réaliseront en partie. De même, la conscience apparaît divine selon nos désirs. Si l'on désire la richesse, elle incarnera la richesse. A cet égard, il y a bien quelque chose comme une "loi d'attraction" : a mes désirs répond le dynamisme bienveillant de la conscience que je suis réellement, même si je n'y crois pas, ou pas clairement.
La conscience revêt donc d'innombrables visages, dans chaque religion, dans chaque tradition, comme autant de réponses aux questions en forme de désirs, qui surgissent dans le cœur des humains. Ainsi les dieux et les déesses, avec les mantras qui les invoquent, sont des cristallisations de la conscience immaculée, afin de gagner tel ou tel résultat particulier.
D'un autre côté, toutes les formes sont les formes de la conscience sans forme. Et donc, si je contemple toutes ces formes, sans choisir, en plongeant en moi à la source vivante de tous les désirs, je réaliserai cela. Et le fruit en sera sans limites. Le résultat de l'infini est l'infini. Si je ne m'arrête à aucune image désirable, mais si, à l'occasion de tel ou telle image, je plonge à la racine du désir, là où le désir n'est pas encore un désir particulier, mais désir universel, sans forme ni figure, désir pur, alors je réalise l'infini, infiniment. La joie de cet éveil est sans commune mesure. Tout le reste, si vaste soit-il, n'est qu'une goutte de cet océan sans rivages.
Abhinava Gupta conseille donc :
yas tu saṃpūrṇacidvṛttir na phalaṃ nāma vāñchati /
tasya viśvākṛti dhyānaṃ sarvadaiva vijṛmbhate // Mâlînîvârttika, 2.138
"Mais celui qui jouit du mouvement de la conscience en sa plénitude
ne désire aucun résultat [particulier].
Pour lui, c'est la méditation/visualisation de toutes les formes
qui se déploie à chaque instant !"
Telle est la méditation divine, shiva-mudrâ. Ainsi, tout ce qui apparaît, instant après instant, en cet instant présent de pure et simple présence concrète, est le visage de la divinité. C'est le mandala naturel, la visualisation spontanée. Le flot du souffle est le mantra inné, les gestes du corps sont la mudrâ authentique. Et ainsi, la vie même devient célébration de la liberté. Je suis tout et tous. Il n'y a pas cessation du désir, mais expansion infinie du désir. Un seul désir pour un seul être manifesté en toutes choses.
Comment le ressentir ? En plongeant dans le "je suis", qui n'est pas un concept, ni une image, ni une vague sensation, ni une abstraction, mais la réalité la plus concrète en comparaison de laquelle tout le reste n'est qu'un songe. Ramana dit
Aham ahantayâ brahmâtrena bhâti
"Il brille en tant qu'absolu : je... je..."
Ou bien : "je suis je".
Non pas "je suis cela", ni "je suis", mais "je suis je", car ce Cœur universel est vibration, balancement et pulsation qui va du dedans au dehors, de soi aux autres, puis vers soi. Il est relation, union, communion parfois, réconciliation du corps et du monde, guérison et richesse inépuisable.
Plonger, âvesha, encore et encore et encore. Un instant, deux instants, un jour, une année, une vie et une éternité. A jamais.
Tel est le chemin du Tantra que je vous invite à explorer :
https://david-dubois.com/index.php/poesie/
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