Le brahman est l'absolu. Dans le Vedânta et l'hindouisme commun, il est décrit comme étant inactif, shânta "guéri de la fièvre" qui pousse les êtres à agir.
Dans le Tantra, en revanche, l'absolu est décrit comme étant en expansion, vikâsvara.
Bhartrihari est un personnage mystérieux. Il a peut-être vécu au Vème siècle. Il est l'auteur d'un livre célèbre, ardu à comprendre, car il décrit l'absolu comme une sorte de langage qui se déploie depuis le silence jusqu'aux langues ordinaires. De plus, il affirme que cette parole crée le Veda (le savoir sur l'invisible) et le monde. Ainsi, la parole crée le monde en parlant.
Il est un jalon important car sa philosophie, originale mais basée sur le Veda, a inspiré le Tantra et, en particulier, la philosophie de la Reconnaissance, de la reconnaissance de l'essentiel en la conscience.
Il est aussi l'auteur de trois poèmes, trois Centuries. L'une sur l'amour romantique, l'autre sur la morale et la dernière sur le détachement où la lucidité dégrisée, vairâgya. De prime abord, il semble être une diatribe du renoncement, décrivant avec acuité les défauts de la vie ordinaire. L'alternative est la méditation sur l'absolu, brahman.
Mais curieusement, on trouve ici et là dans son poème des termes du Tantra ultérieur, celui de la Reconnaissance et du "shivaïsme du Cachemire". Par exemple, le verset 69a :
sans âge, ultime, en expansion (vikâsi).
A quoi bon ces pensées sur ce qui n'est pas réel ?"
Nous retrouvons ici vikâsa, expansion, dilatation, terme essentiel du shivaïsme du Cachemire, du Tantra non-dualiste, pour décrire le fait que la conscience se dilate. Elle n'est pas statique, mais dynamique, plastique et fluide comme une matière vivante. Quoi de plus naturel pour la conscience qui est la vie absolue source de toute vie ?
En tous les cas, la présence de ce terme et d'autres est sans doute une indication de plus de l'extraordinaire continuité entre le Veda et le Tantra, entre les différentes étapes de la révélation tantrique.
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