"Nos peines et nos tristesses viennent de ce que nous cherchons les choses où elles abondent, tandis que nous fuyons celles qui renferment la joie et la vie. Ainsi sommes-nous les artisans de nos propres misères. Oui, nos désirs sont nos bourreaux.
Cependant, la fin de tous nos désirs sont la jouissance et le repos. Les mondains eux-mêmes ne cherchent pas autre chose ; ils travaillent dans la jeunesse pour se reposer dans la vieillesse et l'on plaint comme malheureux ceux qui sont toujours dans le travail et ne se reposent jamais.
C'est dans ce sens que Saint Thomas blâma les personnes spirituelles qui passent leur vie à chercher Dieu, au lieu de jouir de lui, et il assure que leurs exercices sont moins parfaits par cela même. Celui qui bâtit une maison compte sans doute l'habiter, et celui qui plante une vigne prétend bien en recueillir les fruits. "Quel est le pâtre, demande l'Apôtre, qui, content de paître ses vaches, ne boit pas leur lait ?" (1 Co 9, 7).
N'était-ce point encore dans ce sens que Jésus disait à Jérusalem : "Ah, si tu avais connu la paix qui s'était offerte ! Mais non, ce grand bien est caché à tes yeux" (Lc 19, 42). Ces paroles, en effet, peuvent très bien s'interpréter de cette manière : "Tu possèdes ce qu'il te faut pour être heureuse : il ne te manque que de le savoir pour jouir de la paix." Ce qui rend donc l'âme inquiète, c'est l'agitation avec laquelle elle poursuit un bien qu'elle croit ne pas avoir ; si elle savait le posséder, assurément elle se reposerait dans sa jouissance.
Voyez un homme qui en cherche un autre auquel il a besoin de parler ; lors même qu'il l'a trouvé, s'il ne le reconnaît pas, il continue à s'agiter encore, parce que son désir n'est pas satisfait.
Voilà ce qui arriva à sainte Marie-Magdeleine, à la résurrection du Sauveur ; elle le cherchait avec inquiétude, et, lors même qu'elle l'eût retrouvé, elle ne fut point en repos jusqu'à ce qu'elle sût que c'était lui. Quel est l'homme assez insensé pour préparer sans cesse sa nourriture sans jamais la prendre ? "Il y a, dit l'Esprit Saint dans l'Ecclésiaste, un autre mal que j'ai vu sous le soleil : un homme que Dieu a comblé de biens, en sorte que rien ne lui manque, et à qui il n'a pas donné le pouvoir d'en manger."
Balthasar Alvarez, Sur l'oraison de repos et de silence, Arfuyen, pp. 48-50
"Et pourtant, bien qu’il soit vu, le (Soi) n’est pas identifié comme étant ce (Seigneur dont parlent les Ecritures) en vertu de l’égarement. C’est pourquoi on donne à voir cette reconnaissance en dévoilant ses Puissances.
Cependant le Seigneur – qui est pourtant établi pour autant qu'il est notre conscience – n’est pas pris à cœur en vertu de l’égarement. C’est pourquoi (à présent) on donne juste à voir la reconnaissance (du Seigneur en soi-même). Elle est une ferme certitude (acquise) à travers la mise en lumière des Puissances qui lui sont propres et auxquelles on le reconnaît
De même que le bien-aimé qui, grâce à des tentatives répétées, finit par se trouver auprès de la fille amoureuse, ne (la) satisfait pas parce qu’elle ne l’a pas reconnu comme tel dans la mesure où il ressemble au commun, de même, pour les gens, ce Seigneur universel n’est pas en mesure de manifester sa gloire innée, bien qu’il soit notre Soi, car ses qualités ne sont pas examinées."
Utpaladeva, Stances pour la reconnaissance du Seigneur (Īśvarapratyabhijñākārikā)
Merci pour ce très beau texte et le lien fait avec les stances de la Reconnaissance !
RépondreSupprimerCela me touche particulièrement ! Yhwh était là, en ce lieu-même ; et moi, je ne savais pas ! (Gn 28, 16).
Je me suis trompé de texte
Fidèle de votre blog que j'apprécie beaucoup !