Le Chant de l'artisan.
L'artisan est Ribhou, fils de Brahmâ et
apparenté à ses homologues des mythologies nordiques. Ribhou est apparenté à
"labeur" et à l'allemand "arbeit". Toujours est-il que cet
artisan rencontre un petit jeune, un de ces ingrats qui vous dégoûtent
d'entretenir une progéniture, un certain Nidâgha. Mais Ribhou n'était pas
n'importe qui. Il avait reçu de Shiva l'enseignement de la non dualité. Patient
(en ce temps-là, cela marchait !), il finit par déciller Nidâgha qui le supplia
de lui rapporter cet enseignement. Le Chant
est à l'origine un texte indépendant en 49 chapitres. Sa beauté et sa force
sont immenses, mais difficiles à rendre dès lors que l'on traduit. Les mots
sont généralement simples, c'est plutôt le rythme et le côté chanté qui sont
difficiles à transposer. La source principale est le Yogavâsistha, composé au Cachemire vers 950. Mais ce texte-ci est sans doute plus récent - composé vers, disons, le XVIIe siècle.Je traduis brahman par "l'Immense", faute de mieux. Mais c'est déjà pas mal.
Quoi qu'il en soit, voici le premier
chant issu de ce texte qui a eu une influence décisive sur Ramana.
"Voici que Ribhou parla à Nidâgha
Après l'avoir éveillé (de son arrogance) :
- Je vais te dire le fin mot de la connaissance de soi
Qui n'a pas son pareil dans le passé, le présent et
l'avenir.
Śiva
a résumé et enseigné
Ce qui restera à jamais le plus profond secret.
Ce que l'on prend pour soi
N'est pas soi.
Pas plus que le mental.
Ou le monde.
Vois et décide : "pas de non soi".
Tous les concepts sont vides.
Tous les schémas sont retombés.
Seulement l'Immense.
Vois et décide : "pas de non soi".
En l'absence d'esprit, il n'y a rien à méditer.
En l'absence de corps, pas de vieillesse.
Seulement l'Immense.
Vois-donc et décide : "pas de non soi".
Sans jambes, pas de marche.
Sans bras, pas d'action.
Seulement l'Immense.
Vois et décide : "pas de non soi".
Sans créateur, pas de monde.
Sans monde, pas de créateur.
Seulement l'Immense.
Vois et décide : "pas de non soi".
Sans vieillesse, pas de mort.
Pas d'ici-bas, pas d'au-delà.
Seulement l'Immense.
Vois et décide : "pas de non soi".
Pas d'ordre naturel des choses, pas de pureté morale.
Pas de vérité, ni de peur.
Seulement l'Immense.
Vois-donc et décide : "pas de non soi".
Il n'y a pas de parole,
Car ma conscience est immuable[1].
Seulement l'Immense.
Vois et décide : "pas de non soi".
Il n'y a pas du tout de maître.
En réalité, il n'y a pas de disciple.
Seulement l'Immense.
Vois et décide : "pas de non soi".
En l'absence de l'un, pas de second.
Sans second, pas d'unité.
S'il y a une réalité,
Alors l'illusion est possible.
Si l'illusion est possible,
Alors la réalité est possible.
S'il y a du bon, sache qu'il y aura du mauvais,
De même qu'il y aura du bon, s'il y a du mauvais.
Pas de peur sans sécurité.
De la sécurité s'ensuit fatalement la peur.
Seulement l'Immense.
Vois et décide : "pas de non soi".
S'il y a aliénation, il y a libération.
Sans aliénation, pas de libération.
S'il y a mort, il y a naissance.
Sans naissance, pas de mort.
Si tu es, je suis.
Si tu n'es pas, je ne suis pas non plus.
Si cela est, ceci est.
En l'absence de ceci, cela n'est pas.
Pas de "il y a" sans "il n'y a pas".
S'il y a du "il n'y a pas", alors il y a du
"il y a".
S'il y a effet, il y a cause.
Sans aucun effet, pas de cause.
S'il y a dualité, alors il y a non dualité.
En l'absence de dualité, pas de non dualité.
Si quelque chose est vu, il y a aussi vision.
En l'absence de quelque chose à voir, pas de vision.
S'il y a un intérieur, il y a un extérieur, c'est vrai.
Et sans intérieur, pas d'extérieur.
S'il y a plénitude,
Alors quelque chose manquera.
S'il y a quelque chose dans l'esprit
Tout surgit en un rien de temps.
S'il n'y a rien, jamais,
Alors rien n'arrive.
Ceci n'est donc jamais, nulle part.
Ni toi, ni moi, ni ceci, ni cela.
Seulement l'Immense.
Vois et décide : "pas de non soi".
Il n'y a rien à faire voir en ce monde,
Ni rien qui puisse le montrer.
Seulement l'Immense.
Vois et décide : "pas de non soi".
Pas de mental qui se rappelle
"Je suis l'Immense, transcendant".
Ce monde est l'Immense.
Oui, seulement l'Immense.
Je suis seulement pure conscience.
Vois et décide : "pas de non soi".
Tel est le fin mot de la connaissance de soi.
Elle enveloppe tout : on l'a dite à Monsieur.
A l'entendre juste une fois,
On devient soi-même l'Immense."
Chant de l'artisan
extrait du chapitre quatre de la sixième partie de l'Arcane de Śiva, par... Śiva ?
"L'immense"
RépondreSupprimer"Pas de non soi".
Juste l'état naturel d'Etre permanent,ce fait d'Etre toujours présent, toujours conscient,immobile,indivisible, illimité.
Pas de mental individuel à l'horizon
mais des pensées dans cette pure conscience.
Pas de "je" mais la pensée "je".
Pas besoin de penser "je" pour ETRE.
Tout n'est que pensées sauf ETRE.
ETRE est la seule Réalité.
Pas d'esprit individuel non plus,
la Conscience est Pur Esprit.
"je suis seulement Pure conscience".
Je ne suis pas pure conscience et autre "chose" à la fois ou parfois conscience,parfois autre chose,parfois rien.Je suis seulement pure conscience,toujours.
On ne "devient" pas, on EST.
Pas besoin de l'entendre ou de le dire pour ETRE.
Juste une attention, de qui?
Simplement ETRE présent à Soi-même,pure conscience d'ETRE.
ETRE.
Merci!