Description du yoga de l'espace, de la Méditation de Shiva (śiva/bhairavamudrā) :
hānādānatiraskāravṛttau rūḍhimupāgataḥ /
abhedavṛttitaḥ paśyedviśvaṃ citicamatkṛteḥ //
Abhinavagupta, Tantrāloka, V, 74
"En se familiarisant avec
le Mouvement qui ne prend ni ne rejette,
grâce à ce mouvement unifié,
on voit toutes choses dans l'émerveillement :
la conscience vivante."
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La méditation n'est pas un effort mécanique, mais une familiarisation qui enracine tout l'être (corps, énergie, esprit, inconscient) dans un regard simple.
Ce regard est décrit comme "mouvement" (vṛtti). Le choix de ce terme est très significatif. Dans les autres traditions, vṛtti est en effet connoté de manière péjorative. Selon la célèbre définition du yoga donnée par Patanjali, le yoga consiste à bloquer les mouvements du corps, de la parole et de l'esprit.
Ici, nous sommes dans une approche radicalement différente. La conscience est immobile, mais d'une immobilité en mouvement, une vibration, spanda. Elle est un élan d'extase créatrice, non une chute subie dans une dualité accidentelle. La conscience est vibration, mouvement, élan, vague, onde, désir, éveil, éclosion, expansion. Autant d'images traditionnelles qui pointent vers le paradoxe qu'est notre essence. Le monde, le corps, le mental, ne sont pas des étrangers venus troubler la paix du Soi, mais les manifestations du Soi, leur prolongement inséparable, comme les vagues sont la manifestation de la mer.
Et donc, on habite ce mouvement de manifestation du vide dans le vide, comme des nuages dans le ciel :
les cinq sens totalement ouverts, le mental absolument silencieux. Pure perception sans mot dire. Bouche bée, pure ouverture, transparence sans aucun filtre, l'attention se fond dans l'émerveillement.
Rien ne disparaît, tout se révèle dans la lumière, lumière sur lumière, ciel dans le ciel, sans aucun conflit ni inconfort, comme des reflets sur une eau calme.
Tout s'unifie, le corps, l'attention, la volonté, le monde, ne forment plus qu'une seule sphère, comme une fleur éclose en plein jour.
La dualité de disparaît pas, l'unité ne s'impose pas. "Sans prendre ni rejeter". Comme l'enfant béat, un regard simple plonge jusqu'aux racines de l'être et ouvre les nœuds, défait ce qui est factice, comme une eau fraîche dans une terre desséchée.
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