(pour la photo, je vous laisse imaginer !)
Je suis sur une île.
Dans un genre de « resort » perdu dans un recoin du bout du monde, mais renommé dans certains milieux. Les bungalows parsèment les cocotiers. Parmi eux, des huttes plus grandes : le « hall du zen », la « maison du bouddha », le « temple du thé », le « hall du prana », et autres noms suggestifs. Il y a des cours de yoga, massage, tarots, « respiration consciente », « danse extatique », etc., le tout sur fond de didgeridoo ; et aussi un restaurant « détox » (ce qui n’empêche pas la présence de 200 litres de whisky dans les réserves !). Tout est « bio », pur, discret, élégant, vaguement hippie, mais maîtrisé. C’est avant-tout un business.
Dans un genre de « resort » perdu dans un recoin du bout du monde, mais renommé dans certains milieux. Les bungalows parsèment les cocotiers. Parmi eux, des huttes plus grandes : le « hall du zen », la « maison du bouddha », le « temple du thé », le « hall du prana », et autres noms suggestifs. Il y a des cours de yoga, massage, tarots, « respiration consciente », « danse extatique », etc., le tout sur fond de didgeridoo ; et aussi un restaurant « détox » (ce qui n’empêche pas la présence de 200 litres de whisky dans les réserves !). Tout est « bio », pur, discret, élégant, vaguement hippie, mais maîtrisé. C’est avant-tout un business.
Si je m’écoutais, je me laisserais facilement aller à
critiquer l’endroit et ses clients. Avant-hier, j’étais dans un endroit entièrement
dédié à la bière et à la liposuccion : il y avait cohérence. Mais aujourd’hui,
je suis dans un lieu qui se veut spirituel, mais où tout repose en réalité sur
le paraître, la séduction et l’argent. La dissonance est flagrante. Certes, me
direz-vous, les jeunes gens que je voie se pavaner la résolvent apparemment
sans difficultés : tout cela leur semble parfaitement naturel. Ils passent
de la méditation « zen » aux Full Moon parties avec l’aisance des
fortunés innocents. Mais je me sens un peu mal à l’aise au milieu de cette quête
hédoniste qui est en réalité une compétition féroce pour avoir les meilleurs
partenaires sexuels. Un peu comme dans La
plage – le film a d’ailleurs été tourné non loin.
Bref, ça me fait penser au « salon zen » de Paris,
qui est tout sauf zen. Et puis je vois dans les boutiques de journaux les
magazines de yoga « for weight loss », et même un article de Marc
Dicskowsky dans le dernier numéro du très chic Tathāstu, sur le Tantrāloka
d’Abhinavagupta. Mais tout cela est mondain, ces gens vivent à la surface d’eux-mêmes.
Toutefois, à y réfléchir plus avant, je m’aperçois que mes
critiques sont peut-être motivées par la jalousie – la passion qui vient le
plus facilement aux mortels selon Abhinavagupta. Et il y a de quoi. Ici tous le
monde est jeune, beau, mince (quand mangent-ils ?), bronzé, branché, looké, managé. Ils n’ont
rien d’autre à faire que draguer sous les cocotiers. La crise ? Ils n’ont
jamais entendu parlé. Pour eux, lundi est jour comme les autres. Ils vivent dans un
Eden éternellement présent.
Et puis, il faut sans doute relativiser. Ces jeunes sont
naïfs, mais ils sont plutôt bons et tolérants. Rien à voir avec les barbus et
leur esclaves voilées que j’ai croisé dans les grands centres touristiques, eux
qui convoitent les petits enfants avant d’aller faire la morale au reste du
monde.
Un coin sympathique, donc, mais fragile et immature. Du
reste, quelle spiritualité a jamais réussi en société ? A ce propos, je
viens de finir le Tibet, A History,
de Sam Van Schaik. Le meilleur livre sur l’histoire du Tibet à ce jour. Il
montre la complexité de la situation, loin des clichés. J’ai par exemple appris
que Shugden était le fantôme d’un ancien candidat malchanceux au titre de Dalai
Lama (à l’époque du « Grand cinquième »).
Mais revenons à l’essentiel :
Il n’est pas besoin de pratiquer ce qui est présent depuis
toujours.
La réalité des phénomènes étant immuable, il n’est donc pas
nécessaire de perfectionner cette réalité.
Tous les phénomènes sont déjà parfaits en eux-mêmes :
Ils sont l’essence même.
Et de même les bouddhas des trois temps sont déjà arrivés
à maturité.
N’enseigne donc pas l’effort et la pratique.
Le Roi créateur de
toute chose
Du pur Michel Houellebecq.
RépondreSupprimerIdem...
Alors pour bien connaitre ce genre d'endroits ,je me pique un peu à la curiosité en essayant de deviner de quel lieu vous voulez parlez.
RépondreSupprimerLe zen hall et le coté branché,ouvert et beautifull me faisait penser au centre Osho de Poona. Mais ensuite la référence a The Beach me ramène en Thailande ou j ai vécu des années,pratiqué et enseigné dans une école connue (Agama) sur l'ile de Koh pan Ngan mais il n'y a pas de Zen Hall la bas. Ou alors c'est peut être de l'autre coté de l'ile au Sanctuary,plausible pour le coté workshop.
Alors,j'ai bon?
Sinon tout a fait d'accord avec vous.La plupart des personnes gravitant dans ses milieux sont assez jeunes,beaux,rarement pauvres et vivant temporairement au paradis.
Le Samsara étant un peu trop confortable,il est assez difficile d'approfondir et de develloper une compassion véritable,pour cela il faut avoir souffert un peu.
La vie se chargera de les réveiller tôt ou tard.Rien ne dure même dans la sphère des dieux et des demi dieux.
Neammoins je ne regrette pas mes années passées a pratiquer le yoga,faire toutes sorte de cure, méditer en silence lors de retraite et bien sur flirter et expérimenter un amour moins possessif.
J'ai aussi rencontrer nombre de personne s'inscrivant dans une démarche sincère et pour qui un séjour dans un tel cadre a été important et enrichissant.
Donc comme vous le dites tout n'est pas a jeter et ils ne font de mal a personne.
M
Comme dirait Bouddha, il y a les chaînes d'or, et les chaînes de fer.
RépondreSupprimerDommage d'entendre parler de "grognasse" sur votre blog, pourtant subtil habituellement, même si je comprends parfaitement votre dégoût pour ce genre de personne.
Oui, gagné !
RépondreSupprimerBien bien! Si tu as le temps tu devrais faire un tour du coté d'Agama,une école assez controversé,notamment par une certaine utilisation des énergies sexuelles. Ils ne s'en cachent pas du tout d'ailleurs.
RépondreSupprimerPar contre c'est un endroit intéressant et une bonne partie de l'enseignement vaut vraiment le coup.
Oui, je suis passé à Thong Sala et j'ai surtout retenu les stages "Kashmir Shaivism", plus une interview du manager actuel, un Autrichien. Mais quant à aller voir (et payer !)... c'est une autre histoire. Ce sera peut-être pour le Guide Almora ; en faisant - pourquoi pas ? - un Guide pour l'Asie. En attendant, je flâne sur l'Île de la Tortue.
RépondreSupprimerJ'aurais aimé savoir ce que tu penses des stages de "Kashmir Shaivism". C'est dommage que je ne sois plus la bas,je t'aurais fait faire le tour du propriétaire.
RépondreSupprimerCher Arnaud (du Mexique ?),
RépondreSupprimerVoilà j'y suis, devant la statue du Shiva roumain : y a personne. Sauf un groupe de paysans qui pose les fondations des prochains halls.
On a juste croisé un certain Krishna qui semblait t'avoir connu.
Rien donc sur le Kashmir Shaivism. Cela étant, je lis les présentations, et j'admire l'efficace du management. Évidement, une expérience spirituelle n'est pas impossible à Agama. Mais justement, le propre de l'expérience intérieure est de ne pas dépendre de l'extérieur. Donc les avis positifs ne constituent pas, à mon sens, un point positif. Mais bien entendu, je reste toujours ouvert, et je profite de l'ambiance, autour d'une "no name" pizza !
Cher Philippe, en effet, ce n'est pas très subtil, mais la réalité non plus. Chaque jours qui passe le confirme.
RépondreSupprimerCela étant, je corrige le mot, non pour un plus subtil, mais pour un autre, peut-être plus juste - moins injuste pour ces victimes de la religion de la Mort.