L'amour ne demande rien. Il dépasse infiniment les personnes par qui il passe. Pourtant, il ne peut passer que par des personnes. D'où les formules audacieuse d'un Maître Eckhart, reprises par l'ange de Silésie.
L'amour est le lien en l'universel et le singulier, entre la personne et ce qui la dépasse.
La personne n'est pas un assemblage d'informations qui "fonctionne" selon des lois déterminées, une sorte d'automate spirituel. Ou plutôt, une telle machine, si elle existe, est la sève de l'Acte, cristallisée par l'oubli, devenue habitude, tombée dans l'inertie. Mais la Vie demeure, sans quoi même ce simulacre de personne qu'est le Vieil Homme ne saurait subsister. Point d'illusion sans un Souffle réel.
Cependant, l'important n'est pas là. L'important est le lien, l'amour. L'amour est relation, mais relation créatrice des termes reliés. Je n'existe pas avant d'aimer. Je n'existe pas avant d'être aimé. Le sujet et l'objet, ou comme on voudra les prendre, n'existent pas avant l'amour qui les embrasse et en qui ils s'embrassent. Point de dualité sans un troisième terme. Ce troisième n'est pas vraiment un troisième. Il est la vie des termes reliés, il est tout leur être. Il est, plus que le ciment, la matière des choses.
Et ainsi, il n'y a pas de séparation sans unité, pas d'unité sans séparation.
Telle est "l'ultime non-dualité", parama-advaita, du Dieu et de la Déesse.
Dieu - l'amour - dit, à travers le poète :
"Ma bien-aimée est l'abrégé de l'Univers,
et l'Univers est prolongement de ma bien-aimée".
(Novalis)
Et cette parole est tout, et elle continue en tout, en chaque cri d'amour, jusque dans le dernier désir du dernier des êtres.
J'ai souvent entendu dire que la Trinité ignorait le féminin. Inutile de nier que le christianisme de Paul de Tarse n'est pas celui d'un amant de la Déesse... Mais le Souffle sacré, traduit par "Saint Esprit", n'est-il pas l'amour ? Or, l'amour n'est-il pas féminin, à l'origine ? De même, dans l'amour courtois, il y a l'amour, incarné par la Dame, la jeunesse, incarnée par son amoureux, et la joie qui les relie. Quelque soient le mode, on retrouve cette trinité, on retrouve l'amour, et on retrouve le féminin.
La conscience est amour.
La conscience ne se contente pas d'être.
Ou alors, il faut dire que son "être" déborde fatalement en amour, en félicité, en désir, en sensation et en action. Elle est l'opposé de l'inertie. Son silence est une parole assourdissante, grosse de tous les mots de toutes les langues.
Ou alors, la conscience se contente d'être. Mais, même alors, elle désire seulement être, et dans cette manifestation de soi comme être sans plus, réside son Acte souverain.
La conscience se crée toujours. Sa créativité est son existence. Jusque dans le rien, elle se crée librement. Elle s'aime jusque dans le néant.
N'est-ce pas ainsi que les amoureux ont chanté l'abîme de l'amour ?
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