lundi 30 avril 2018

Les deux grandes questions de la non-dualité védântique

A mon sens, l'Advaita Védânta reste ambigu sur deux questions :

1) Est-ce qu'il faut une pratique (méditative ou autre) en plus de la compréhension de la situation (=seule la conscience est réelle, le reste n'est qu'apparence) ?

2) Est-ce que les apparences restent après cette compréhension ?
a) si non, alors cela contredit l'expérience.
b) si oui, les apparences restent, alors elles ont survécu à la compréhension, à la connaissance,
et donc elles ne sont pas dues à l'ignorance.

Mais alors d'où viennent-elles ? Et pourquoi le Védânta affirme t-il que toutes les apparences ont pour cause l'ignorance ? Dans ce cas, tout devrait disparaître, comme le serpent disparaît quand on voit clairement la corde... Si elles ne disparaissent pas, c'est qu'elle ne sont pas dues, ou pas entièrement dues, à l'ignorance, selon l'adage "la connaissance n'a le pouvoir de détruire que ce qui est causé par l'ignorance".

Ce dernier problème est le plus important du Védânta.
Et c'est à cause de cette ambiguïté que je persiste à penser
que le shivaïsme du Cachemire (ou la philosophie de la Reconnaissance,
pour être plus précis), est plus pénétrant sur ce point.

Sur la première question, Shankara et Sureshvara, les deux maîtres de Védânta les plus radicaux, sont clairs : seule la compréhension est libératrice. L'éveil n'est qu'une certitude inébranlable, rien d'autre. Ce sont les maîtres ultérieurs qui se sont égarés en introduisant la nécessité de la pratique du yoga et de la méditation.

La seconde question, en revanche, reste obscure, même chez Shankara. Et même si leur idée est que les apparences "restent", alors pourquoi dire que toute apparence est causée par l'ignorance ?

Ou alors, dans ce cas ils suggèrent qu'en un sens, les apparences font partie de l'absolu. Mais il ne le disent clairement nulle part. Ni eux, ni mêmes les maîtres du néoadvaita indien (Ramana a vaguement toléré les apparences dans son sahaja-samâdhi et Maharaj a finit par tout rejeter en bloc : on ne trouve chez lui nulle trace d'aucune "dignité de l'apparence banale" ; Atmânanda est peut-être plus clair sur ce point, mais j'en doute).


Dans mon expérience, il est clair que les apparences ne cessent pas. Mais elles cessent d'apparaître séparées de leur fond de lumière. Au contraire, elles semblent plus claires, nettes, vivaces, lumineuses en lumière, comme les reflets d'un miroir bien propre. Moi et mes ami.e.s nous témoignons en ce sens. Il est étonnant que les maîtres de l'Advaita Védânta n'en disent rien.

Si quelqu'un.e peut clarifier sur ce point précis, je suis tout ouïe.

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