Ciel bleu, nulle part
A Marseille, il n'y a pas que le foot
et les quartiers Nord.
Il y a ou, du moins, il y a eu de
grands spirituels, aujourd'hui oubliés. En dehors de Cassien, je pense à François
Malaval, fin XVIIe. Aveugle de naissance, Docteur en Sorbonne (!), il est l'auteur
de La Belle ténèbre et de magnifiques poèmes.
On y sent l'homme du Sud. Sa langue
est limpide, tendre et elle va droit au but. Il faisait partie du courant du Pur
Amour, illustré aussi par Madame Guyon. Mais Malaval irradie la chaleur et les parfums
de la Provence. Quelques extraits, voici le premier :
"Tout cet univers est plein de
Dieu, il est partout. Non seulement par sa grâce et par sa vertu, mais encore par
sa propre nature. il n'y a pas un atome sur terre, une goutte dans tous les abîmes
des eaux, une particule en l'air, un point dans les globes de tous les cieux, où
Dieu, Père, Fils et saint Esprit ne soit tout entier.
Il est de même tout entier dans les
animaux, dans les plantes, dans les minéraux et dans toutes leurs parties, quand
il y en aurait une infinité en chacun de ces êtres.
C'est donc un article de foi que Dieu
est en toutes choses ou, à parler plus proprement et selon la rigueur de la théologie,
que toutes choses sont en Dieu. Car nous ne disons pas que la mer soit dans l'éponge,
mais nous disons au contraire que l'éponge est dans la mer, dont elle est pleine,
au dedans et au dehors, aux côtés et en toute sa substance.
Par conséquent, Dieu est dans vous-mêmes,
sans le chercher hors de vous. Il est dans votre corps et dans votre âme. Et si
vous pouviez voir comment Dieu est dans vous ou, pour mieux dire, comment vous êtes
en Dieu, vous vous trouveriez si petite, abîmée dans cette immensité, qu'en vérité
vous auriez peur de vous et vous reconnaîtriez que vous n'êtes rien. Qu'est-ce qu'une
goutte d'eau dans l'océan ? ...
Que sommes-nous donc, vous et moi,
considérés dans l'océan infini de la Divinité, sinon des néants revêtus de quelque
peu de vie, qui ne saurions subsister et agir hors de la divinité, non plus que
les poissons hors de l'eau ? Quel bonheur d'être toujours dans Dieu, et que ce bonheur
est peu connu !
C'est un soleil qui brille
jour et nuit sur nous et en nous. Et l'on ne daigne pas ouvrir les yeux pour le
regarder. Nous demeurons en ténèbres au sein même de la lumière. Et nous sommes
tièdes au milieu du feu qui nous environne.
Ouvrez les yeux, par une vive foi
que Dieu est en vous, et vous voilà aussitôt en sa présence. De sorte que la contemplation
n'est autre qu'une vue fixe et amoureuse de Dieu présent.
C'est pourquoi, après que vous serez
recueilli, demeurez ferme dans cette vue, sans vous figurer Dieu, ni comme juge
sur un tribunal, ni comme roi sur un trône, car vous formeriez des images... Mais
seulement comme Dieu incompréhensible en lui-même, au-dessus de toute figure, de
toute imagination, de tout entendement, et qui seul peut nous faire connaître ce
qu'il est."
La Belle ténèbre, 1670, I, "Entrer en contemplation"
Cette insupportable extase dans laquelle il faut s'interdire de traduire trop vite.
RépondreSupprimerRester dans ce silence qui dit tout sans aucune forme. Sentir la vérité sans aucune possibilité de mettre la main dessus.
Ouf, je transpire, et je ne suis même pas en Inde, mais dans l'hiver pyrénéen.
:-)
Magnifique texte ! Merci !
RépondreSupprimerMerci pour ce très beau texte.
RépondreSupprimerToutefois, n'y-a-t-il pas une faute de frappe :
C'est un soleil qui brille chaque jour et nuit sur nous et en nous.
-> C'est un soleil qui brille chaque jour et luit sur nous et en nous.
Merci. En fait, j'avais ajouté "chaque"...
RépondreSupprimerOK d'accord, à la lecture, j'ai placé la virgule au mauvais endroit, après "chaque jour".
RépondreSupprimerMerci encore pour ce blog que je viens de découvrir, et dont je parcoure les articles avec grand intérêt.
' et qui seul, peut nous faire connaitre ce qu'il Est '
RépondreSupprimerOh Oui! on peut l'aider un peu..en étant vigilant et Présent ici :)