Souvent, nous envions aux choses leur paix.
Contrairement à nous, elles se contentent d'être, sans être tourmentées par
aucune conscience de soi. Les choses sont. Elles n'ont pas conscience
d'elles-mêmes, et donc elles ne se jugent pas, ne s'inquiètent pas, ne se
déchirent pas entre des possibles. Elles sont simples. Pas dédoublées entre ce qu'elles sont et ce qu'elle devraient, ou pourraient être.
Prenez donc l'une de ces choses. Un vase, par exemple.
Goûtez son silence. Son immobilité, et constatez l'impact sur vos muscles,
votre souffle, le ressenti de votre ventre. Puis, au lieu de simplement
regarder ce vase, glissez vous en lui, comme dans un gant. Éprouvez le vide
qu'il enveloppe. Et soudain, donnez toute votre attention à cet espace, comme
si les parois du vase avaient disparues. Rien que l'espace dans l'espace. Puis
faites de même pour la pièce dans laquelle vous vous trouvez. Savourez sa
tranquillité. Puis donnez-vous à l'espace que cette pièce enveloppe. Prenez le temps,
quoique l'intensité soit plus importante que la durée. Et soudain, sentez que
les murs disparaissent, comme une bulle de savon qui éclate. En cet instant,
tout notre être réalise que l'intérieur et l'extérieur ne font qu'un, qu'ils
n'ont jamais été séparés. Souvent, la respiration s'arrête, comme devant un
spectacle sacré. Et faites de même pour toutes les cloisons. Que l'espace, au
lieu d'être un vide inerte et oublié, devienne vivant. Faites l'expérience de
vivre sans murs, sans frontières. A l'infini, un seul espace.
Voilà comment les choses, même les plus anodines,
peuvent nos délivrer de notre agitation. L'objet nous emporte au-delà de
lui-même. Nous ne sommes plus face à lui, une chose face à une autre, mais nous
ne sommes plus qu'un seul ciel. Chaque objet porte ainsi en lui le pouvoir ne
nous ramener à l'infini, à cela qui n'est pas une chose mais qui fait être
toutes les choses. Cela est peut-être la vérité de l'art.
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