La pleine conscience est une méthode de méditation simple et efficace.
Mais jusqu'à quel point et dans quelles conditions ?
La méditation, seule, semble moins efficace que ce que ses adeptes les plus enthousiastes prétendent.
Une étude récente fait la synthèse de dizaines d'années de données récoltées sur les bienfaits de la méditation. Ses conclusions sont claires : la méditation aide à réduire les symptômes de stress, d'angoisse, de compulsion, d'insomnie, etc. Mais on n'observe pas plus d'effet que dans des "groupes témoins", c'est-à-dire dans des groupes de gens qui, face à des symptômes semblables, ne font rien. Ou vont se promener. Ou font du tricot. Elle n'améliore pas non plus les capacités de concentration, pas plus, du moins, que d'être de mauvaise humeur...
Il n'y a là rien de surprenant d'un point de vue traditionnel. Un état de concentration parfaite (samâdhi) n'est qu'un état mental parmi d'autres, conditionné, soumis à l'impermanence. C'est un état d'arrêt (nirodha) des activités mentales et physiques. De suspension provisoire. Une parenthèse. Et qui n'a pas, en lui-même, le pouvoir de modifier le psychisme dans un sens ou un autre. En effet, les activités disparaissent provisoirement durant la méditation, mais les habitudes inconscientes à l'origine de ces activités persistent à l'état latent et se réactivent quand on sort de cette concentration. En termes médicaux, les symptômes disparaissent pendant un temps, mais ils reviennent parce que les causes n'ont pas été traitées.
Ces causes sont d'une infinie diversité. Mais elles se ramènent à une seule cause.
Et cette cause, c'est l'aveuglement (avidyâ) sur ce que nous sommes vraiment. Or, seule une activité mentale peut mettre fin à cet aveuglement : réfléchir et examiner la question par soi-même, éventuellement avec l'aide d'autres personnes, en leur compagnie et soutenu par leurs suggestions et encouragements. La simple absence de pensées n'a certes pas ce pouvoir, comme le prouve le sommeil profond...
Mais bien sûr la méditation ne se réduit pas à la pleine conscience comme concentration en vue d'arrêter les pensées. On peut aussi les accueillir. Toutefois cette posture présente les même limites : on se détend dans l'apparence des choses, sans jugement, mais l'aveuglement persiste. Et donc les effets de cette méditation sont temporaires. Cela reste un traitement de surface.
Le seul traitement efficace consiste à tirer au clair notre vraie nature : sommes-nous le corps, les sensations, la mémoire, les émotions, les sensations ? Ou quoi d'autre ?
Pour trouver la réponse, il suffit de retourner l'attention vers elle-même, de retourner le regard vers soi, vers cela qui regarde. La conscience se reconnaît alors elle-même, directement, comme libre de tout état, mental ou autre.
Idéalement, ceci peut se faire dans le cadre d'une méditation guidée. Nous combinons ainsi l'ouverture de la méditation à la pénétration de la réflexion qui reconnaît notre vraie nature au-delà de tout doute possible. L'aveuglement est ainsi éradiqué et ne restent qu'une paix profonde et doucement joyeuse, au sein de laquelle la vie s'écoule comme avant, mais baignée d'une lumière nouvelle. L'angoisse disparaît, le mal-être s'évanouit comme brouillard au matin. Quand au stress, il devient énergie. La torpeur devient silence ineffable. Le désir devient empathie. La colère (ou la peur, disons) devient clarté. L'état de veille, dominé par l'attachement, est désormais imprégné d'un profond ressenti d'unité avec toute chose. Les rêves (y-compris les rêveries dans l'état de veille), l'agitation, sont vécues comme clarté et créativité de l'arrière-plan conscient, de qui je suis vraiment, vraiment. Le sommeil profond, les "blancs", l'oubli et l'incapacité à comprendre quoi-qu'est-ce sont éprouvés comme vacuité insondable, légère et pleine d'énergie.
Du reste, Jon Kabat-Zinn, le principal propagateur de la pleine conscience, ne dit pas autre chose quand il distingue la pleine conscience comme méditation sur des objets, de la pleine conscience comme reconnaissance de la conscience (la "claire lumière") dans laquelle les objets apparaissent et disparaissent.
La pleine conscience : tout apparaît et disparaît dans la conscience. C'est un fait accompli.
Quand la conscience se voit elle-même, elle ne dit rien, mais elle a quand même l'air contente. Enfin ce n'est une impression.
RépondreSupprimerEh oui, cette dictature du bonheur et cette pleine conscience mise à toutes les sauces risquent, au final, à faire bien plus de mal que de bien.
RépondreSupprimerPourquoi ?
1) Parce que dans une société qui va mal, nous DEVONS changer la société, et je ne crois pas que c'est en nous asseyant et en faisant dissoudre notre indignation que nous y arriverons ;
2) Parce que la pleine conscience est une voie spirituelle, par un outil de psychologue en herbe, et qu'elle impose donc une remise à plat totale de notre être, un déconditionnement, une libération du connu.
Mais le capitalisme aime tellement vider les choses de leur substance pour mieux les vendre, et mieux nous endormir...