mardi 13 novembre 2018

Comment être ouvert sans être aveugle ?


Toutes les cultures se valent-elles ?

L'esclavage vaut-il la liberté ?
Vivre dans la crainte de l'Inquisition et des fatwas
vaut-il la liberté de conscience ?

Aujourd'hui se livre une bataille  entre les tenants du relativisme culturel et les héritiers des Lumières.
L'enjeu est la survie des sociétés ouvertes.

Mais cette vision, celle des Modernes, n'est plus comprise.

Voici le problème tel qu'il est formulé par Claude Lévi-Strauss, ethnologue que l'on ne peut soupçonner d'ethnocentrisme et qui pourtant refusa toujours de se soumettre au relativisme culturel et au communautarisme qui se cache dans son sillage :

"Si nous jugeons les accomplissements des groupes sociaux en fonction de fins comparables aux nôtres, il faudra parfois nous incliner devant leur supériorité ; mais nous obtenons du même coup le droit de les juger, et donc de condamner toutes les autres fins qui ne coïncident pas avec celles que nous approuvons. Nous reconnaissons implicitement une position privilégiée à notre société, à ses usages et à ses normes, puisqu'un observateur relavant d'un autre groupe social prononcera devant les mêmes exemples des verdicts différents. 

Dans ces conditions, comment nos études [de sciences de l'Homme] pourraient-elles prétendre au titre de science ?

Pour retrouver une position d'objectivité, nous devrons nous abstenir de tous jugements de ce type. Il faudra admettre que, dans la gamme des possibilités ouvertes aux sociétés humaines, chacune a fait un certain choix et que ces choix sont incomparables entre eux : ils se valent.

Mais alors surgit un nouveau problème : car si, dans le premier cas, nous étions menacés par l’obscurantisme sous forme d'un refus aveugle de ce qui n'est pas nôtre, nous risquons maintenant de céder à un éclectisme qui, d'une culture quelconque, nous interdit de rien répudier : fût-ce la cruauté, l'injustice et la misère contre lesquelles proteste parfois cette société même, qui les subit. Et comme ces abus existent aussi parmis nous, quel sera notre droit de les combattre à demeure, s'il suffit qu'ils se produisent ailleurs pour que nous nous inclinions devant eux ?"

(Tristes tropiques, Plon, 1955, p. 445)

Il y a un demi-siècle déjà, tout était dit du terrible piège dans lequel nous nous sommes enfermé. Ce piège, les chercheurs spirituels s'y trouvent pris aussi. Refusant de juger, ils jugent qu'il ne faut pas juger, font de l'Autre une idole et affichent le plus grand mépris pour leur propres racines, quand ils n'ignorent pas tout de leur culture.

Peut-on hiérarchiser de façon légitime ?
Je crois que oui.
De toutes façons, nous n'avons pas le choix.
Choisir de ne pas choisir, c'est encore choisir,
c'est choisir sans le dire,
c'est choisir sans transparence.
Et c'est faire le jeu de tous les dogmatismes,
lit des fanatismes.

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