La conscience est cette lumière à la fois évidente et mystérieuse qui se révèle en révélant les choses.
Elle ressemble à un témoin silencieux : toujours présente à travers la présentation des choses, elle s'absente pourtant sans cesse. Tournée vers les choses, elle s'oublie. Quand elle se réalise et se reconnaît, elle se savoure et retrouve sa liberté.
Mais n'est-elle qu'un témoin passif ?
Si la conscience est source de tout mais qu'elle est passive et sans activité, alors d'où viennent les activités ?
Si moi, conscience, je me retourne vers moi (faute d'une meilleure expression), je me sens comme créativité, activité intense, désir, émotion, mouvement, extase, et non comme simple lumière inactive. L'expression "témoin" ne désigne qu'une facette du mystère, une reconnaissance incomplète de la richesse de l'expérience, de cet "absolu" qui se connait plus ou moins complètement.
Je suis activité intense, infinie, en fait.
J'en fais l'expérience directe quand je plonge en moi.
C'est aussi ce que décrit Le Jeu de la conscience (bodha-vilâsa), un court poème attribué à Kshéma Râdja. L'absolu n'est pas une pure présence passive qui activerait une mystérieuse illusion on ne sait comment, mais il est le jaillissement créateur dont je fais l'expérience directe quand je plonge en moi :
Le Jeu de la conscience
attribué à
Kshéma Râdja
En toutes circonstances,
je salue Shiva,
lui qui déploie à chaque instant
les cinq actes (: création, maintient, résorption, voilement et dévoilement),
lui qui (fait tout cela) pour finalement
en révéler le sens ultime,
à savoir, notre propre Soi (qui est Shiva),
et qui est, de bout en bout,
plaisir, (c'est-à-dire) conscience. 1
Cette reconnaissance est une expérience "de chaque instant", sans périodes réservées à la pratique, en tous les cas sans dépendre de telle périodes.
Cette Lumière joue à travers un double jeu : d'une part, le jeu de la vie et de la mort, création et destruction, mystère de l'impermanence ; d'autre part, le jeu de l'occultation et de la révélation.
Le sens ultime de ce jeu est l'extase que chacun ressent au fond quand il plonge en soi.
Cette extase créatrice est la conscience.
La conscience est magie.
Ou, en langage brahmanique :
le brahman est mâyâ.
Inséparables comme le soleil et sa lumière.
Cela ne se découvre pas comme une simple connaissance,
une vision ou un éveil,
mais comme une saveur, un émerveillement, une délectation.
Je veux dire que ça n'est pas seulement cognitif,
mais aussi affectif.
C'est une émotion, une joie, un désir, un amour, etc.
C'est une expérience intuitive complète.
"Plaisir".
Simple, mais complète.
Et une vie nouvelle se déploie à partir de cette expérience.
Plonger en soi, savourer, doucement, sans se forcer, sans se presser, mais sans résister non plus.
Tranquille. Heureux.
Plonger en soi et sentir cet être d'extase, toujours présent, en fait, comme un être intérieur. Pas un simple témoin passif, non, un être plongé dans l'extase. Au centre de soi, comme le cœur d'un arbre. Enfin, c'est difficile à décrire, mais facile à vivre. Même si, pour des raisons obscures, il y a résistance, oubli et errance en surface.
Adoration du "jeu" à chaque instant.
Conscience=absolu=moi=activité=plaisir
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