Il y a cette opinion :
La connaissance de la non-dualité, parce qu'elle est transmise par des mots, est une connaissance indirecte de la non-dualité. Cette connaissance intellectuelle doit être transformée ensuite en connaissance directe par la pratique de la méditation, l'éveil de la kundalinî ou l'énergie spéciale d'un maître ou quelque chose du même genre.
En réalité, c'est le contraire qui est vrai.
L'expérience de la méditation, etc. peut conduire à l'expérience de l'unité. Mais cette expérience n'est qu'un reflet déformé de la vérité perçue à travers le prisme de l'ignorance ("je suis une entité limitée, séparée de l'absolu"). C'est donc une connaissance indirecte de la non-dualité.
En revanche, la compréhension de l'enseignement non-dualiste (par exemple sous la forme d'un "Tu es cela") débouche sur une connaissance directe de la non-dualité, puisque l'ignorance est précisément ce qu'elle anéanti. Seule la connaissance intellectuelle est donc nécessaire pour la réalisation de la non-dualité.
Du côté du shivaïsme du cachemire, Abhinavagupta ne dit pas autre chose. Dans sa Lumière des tantras, il explique qu'il y a deux sortes d'ignorance : intellectuelle, et inconsciente ou spirituelle. Il démontre alors que la connaissance intellectuelle est la plus importante, car elle seule peut mettre un terme à l'ignorance en cette vie, même si la connaissance spirituelle, gagnée par le rite de l'initiation, peut mener à la liberté après la mort.
Du côté du Vedânta, c'est encore plus clair. Sureshvara le dit :
"La connaissance du Soi conduit à sa plénitude le sens de la vie, sans dépendre d'une autre pratique ou d'une autre forme (de connaissance) en plus de cette clarification de notre vraie nature".
La Réalisation qui ne dépend pas d'une pratique, 1, 35
Une autre interprétation du Vedânta fut celle de Râmânuja (XIe siècle). Pour lui, la connaissance de soi est la connaissance de Dieu mise en pratique dans l'adoration de ses attributs glorieux. Lui et les adeptes de sa tradition ont polémiqué avec les non-dualistes jusqu'à ce jour. Le cœur de cette controverse est la définition de l'ignorance. Les fidèles de ce blogue se rappelleront mes aventures à Melkote, haut lieu de cette tradition vénérable...
Voici un film tamoul qui raconte la légende de Râmânuja. Son professeur, un méchant non-dualiste, tente de l'assassiner... :
Un documentaire plus récent retrace sa vie et son oeuvre :
Sa vie en dessin animé :