dimanche 16 juin 2013

Le sommet de la contemplation



La seconde Phase qu'il est bon d'exprimer ici est celle dont les Mystiques usent communément de ce qu'au sommet de la Contemplation les puissances sont comme ravies, suspendues et sans opérer.



En celle-ci on peut seulement dire que les puissances n'opèrent pas comme d'elles-mêmes, puisque ce qu'elles reçoivent est entièrement infus : et ce qui est lors la part de l'entendement est une simple retenue et suspendue admiration, et se laisser illustrer, pénétrer et consommer de la lumière divine. Et de la part de la volonté, saintement anéantir et détruire afin qu'elle ne sente, n'aime ni désire, ni se réjouisse en autre chose qu'en Dieu seul. Et cela avec un tel goût et sérénité qu'il ne semble pas opérer, à cause que cette affection amoureuse et simple est si intime et comme substantiée en l'âme, qu'elle semble toucher à l'essence et non aux puissances, en partie à cause de la grandeur et radication interne et profonde de l'affection, et en partie par la simplicité et suavité de celui dont la perfection approche plus du repos que du mouvement (comme dit Aristote et Saint Thomas après lui) et semble que ce soit plutôt une habitude qu'un acte, à raison que l'âme est en une habituelle disposition d'amoureuse inclination à Dieu, parce que toute inclination habituelle, intense, simple et suave unie à Dieu fait que ce qui est action ne paraît pas l'être, mais une chose comme substantielle et transformation d'être.

La raison de cela est premièrement que comme l'action est un mouvement, et que ces actions spirituelles ne durent que des instants, l'âme qui ne se sent point mouvoir, mais qui ressent en cette affection divine une espèce d'immutabilité et consistance de durée, cela ne lui semble pas être une action.

En second lieu parce que le comme et ordinaire de ses actions, c'est discourir et tirer une vérité d'une autre, ou s'approfondir avec peine et difficulté en elle, ou cheminer par ces actions et avec elles acquérir autre chose, à quoi l'intention, nécessité ou désir l'ordonne, l'âme sentant comme s'émouvoir et cheminer au bien, où à la fin prévue et préméditée.

Père Jacques de Jésus (non le Carme du XXe siècle, mais un religieux du XVIIe), Notes sur Jean de la croix.

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