Waouh !
Surprise !
Le fait est que (le Soi)
Est le Témoin toujours évident,
A soi-même sa propre preuve.
Même un être à l’intelligence la plus fine
Ne peut nier ce fait
Comme s'il s'agissait d'un vase !
Cela qui est vision ininterrompue
Ne peut devenir un objet pour la vision.
Si cela devenait objet pour la vision,
Comment cela pourrait-il être
Cela qui voit ?
Sureshvara, La Réalisation qui ne dépend pas d'une pratique
Il existe deux familles de non-dualité : inclusif ou exclusif.
Ces deux versets illustrent la non-dualité exclusive : la conscience, le Soi y est présenté surtout comme transcendant, au-delà de tout ce qui peut être connu, perçu, pensée, senti, car le Soi est le Sujet absolu, le sujet qui ne devient jamais un objet. On dira que c'est dualiste, car c'est opposer un sujet à un objet. Mais le partisan de ce non-dualisme exclusif répondra qu'il n'y a pas de dualisme, car l'objet n'existe pas, vu qu'il est impermanent, alors que la conscience, témoin de cette impermanence, est permanente. Or, il ne peut y avoir dualité entre la réalité (la conscience) et une illusion éphémère (ce dont on a conscience) ! Donc il n'y a pas dualité du simple fait de pointer la conscience-témoin. Il n'y a, au final, qu'une seule réalité : la conscience, témoin de rien, de rien de réel du moins. L'expression "témoin" est une manière de pointer le Soi en concédant d'abord l'existence de l'objet dont la conscience serait témoin. C'est un compromis provisoire, un peu comme dire "vous voyez l'étoile, là, juste à la pointe de la branche de cet arbre ?" Alors qu'au final, cette étoile est infiniment éloignée de la branche de cet arbre. Par rapport aux objets (choses, pensées, sensations), la conscience est d'abord désignée comme "témoin". C'est une approximation très utile, qui permet de pointer directement le Soi, sans rester dans le vague.
Voilà pourquoi Sureshvara, après avoir pointé la conscience-témoin, rejette l'objet comme étant une illusion inexplicable et irrationnelle :
"Ainsi l'objet - la dualité - est exclue du Soi, car il existe par erreur, parce qu'il n'est pas le Soi, parce qu'il est fondé sur l'égarement, parce qu'il est incompréhensible".
Sa manière de penser est très proche de celle de Nâgârjuna. C'est une pensée du tout-ou-rien, rigide, binaire, une logique désincarnée, comme si une machine un peu rustre cherchait à comprendre un être vivant.
Voilà pourquoi Sureshvara, après avoir pointé la conscience-témoin, rejette l'objet comme étant une illusion inexplicable et irrationnelle :
"Ainsi l'objet - la dualité - est exclue du Soi, car il existe par erreur, parce qu'il n'est pas le Soi, parce qu'il est fondé sur l'égarement, parce qu'il est incompréhensible".
Sa manière de penser est très proche de celle de Nâgârjuna. C'est une pensée du tout-ou-rien, rigide, binaire, une logique désincarnée, comme si une machine un peu rustre cherchait à comprendre un être vivant.
Le tantra inclusif, le tantra non-duel, emploie également cette expression de "conscience-témoin". Mais au lieu d'affirmer ensuite que l'objet est une illusion venue d'on ne sait où, la non-dualité inclusive inclut l'objet dans la conscience comme étant la conscience qui se manifeste librement, par jeu, à elle-même. Cet objet n'est pas réel au sens ou il existerait indépendamment de la conscience-témoin, mais il est réel au sens où il est vraiment une manifestation de la conscience, de la réalité, et non un fantôme insaisissable. Même si l'objet est une illusion magique, cette illusion a une valeur positive, elle exprime une vérité et une expérience de liberté, de béatitude, d'éveil, de joie, d'émerveillement, de surprise, de jeu gratuit, d'innocence, de créativité, d'amour et d'aventure vivante. L'objet, la dualité, l'illusion, sont accueillis et embrassés, sans être rejeté au nom de leur impermanence.
P.S. : la "dualité" entre la conscience et ses objets est surtout cristallisée chez les successeurs de Shankara et Sureshvara. Chez Shankara, cette non-dualité exlusive est bien un trait de sa pensée, mais il n'est pas toujours présent. Ainsi dans ce passage :
"Ce qui est projeté sur le Soi en sa transcendance, ce sont les noms et les formes [=mâyâ]. Mais de ces noms et ces formes manifestes, on ne peut dire catégoriquement ni qu'ils sont réels [et identiques au Soi], ni qu'ils sont autre, leur relation est analogue à celle de l'océan et des vagues".
Shankara critique ailleurs ce genre d'unité-du-multiple, il tend à être plus radical, suivant une logique du "tout ou rien". Mais dans des passages comme celui-ci, il semble moins catégorique. Cependant, il est clair que sa conclusion est une non-dualité par exclusion de la dualité : l'analogie de l'océan et des vagues n'a pour lui qu'une valeur provisoire.
P.S. : la "dualité" entre la conscience et ses objets est surtout cristallisée chez les successeurs de Shankara et Sureshvara. Chez Shankara, cette non-dualité exlusive est bien un trait de sa pensée, mais il n'est pas toujours présent. Ainsi dans ce passage :
"Ce qui est projeté sur le Soi en sa transcendance, ce sont les noms et les formes [=mâyâ]. Mais de ces noms et ces formes manifestes, on ne peut dire catégoriquement ni qu'ils sont réels [et identiques au Soi], ni qu'ils sont autre, leur relation est analogue à celle de l'océan et des vagues".
Shankara critique ailleurs ce genre d'unité-du-multiple, il tend à être plus radical, suivant une logique du "tout ou rien". Mais dans des passages comme celui-ci, il semble moins catégorique. Cependant, il est clair que sa conclusion est une non-dualité par exclusion de la dualité : l'analogie de l'océan et des vagues n'a pour lui qu'une valeur provisoire.
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