Parâ Devî
par Ekabhûmi
Comment faire cesser le bavardage mental sans effort ?
Il suffit d'écouter la respiration.
Extrait de l'Anthologie du shivaïsme du Cachemire,
à paraître le 18 juin 2020 chez Almora.
Ce recueil complète le manuel Les Quatre yogas, chez le même éditeur.
Voici une sélection de versets tirés de la Lampe du Yoga Technique (Hatha-pradîpikâ en dix chapitres, différente de la version en cinq chapitres déjà publiée en français), qui est elle-même une sorte de compilation de versets pris dans différentes traditions tantriques. Ces passage constituent aussi bien une description de la méditation de Shiva (Bhairava-mudrâ) et de "l'éveil de la Kundalinî" (shakti-bodha) :
Quand le mouvement des souffles est stoppé
Grâce l'attention (portée aux intervalles),
La (conscience) non-mentale
Apparaît d'elle-même et sans effort. (2, 27)
On pose d'abord les mains sur les genoux,
Les doigts étalés,
Puis, la bouche grande ouverte,
On pose le regard dans le prolongement du nez. (2, 35)
Tant que le souffle est stoppé dans le corps,
L'esprit est sans maladies.
Tant que le regard est posé entre les sourcils,
Comment donc pourrait-on craindre la mort ? (4, 28)
Quand le souffle traverse le centre,
L'esprit se stabilise.
Cet état où le mental est complètement immobile
Est l'état mental libre du mental. (4, 30)
La rétention du souffle aisée,
Qui laisse de côté remplissage et vidage :
Cet arrêt du souffle
Est ce que l'on entend par "rétention pure".
Quand on maîtrise la rétention pure,
Dépourvue de remplissage et de vidage,
Plus rien n'est difficile à obtenir
Dans les trois mondes.
En maîtrisant la rétention pure,
Peut peut tenir le souffle à volonté,
Et on gagne le royaume du yoga royal
Sans le moindre doute. (4, 64-65)
Il y a une rétention (spontanée) à la fin du vidage.
Il vide le mental de tout point d'appui.
En s'exerçant à ce yoga,
On atteint le royaume du yoga royal. (4, 67)
Quand le souffle est dans le domaine du vide,
Il est de fait sur la voie royale.
L'esprit est alors sans point d'appui
Et on triche avec la Mort.
Voie creuse, domaine du vide,
Ouverture vers l'Immense, grande voie,
Champs de crémation, attitude de Śiva
Et voie du centre : toutes ces expressions ont un seul et même sens. (5, 3-4)
La vie s'écoule
Dans l'expir et l'inspir,
Vers le haut et vers le bas,
Dans les chemins de gauche et de droite.
Quand elle va et vient (ainsi) on n'en a pas conscience.
Jeté contre le sol avec un bâton,
Une balle rebondie.
De même, la vie est emportée
Par l'expir et l'inspir,
De sorte qu'elle va et vient.
Un aigle attaché à une corde
S'envole puis est ramené en tirant sur la corde.
De même, la vie, prisonnière des qualités,
Est entraînée par l'expir et l'inspir.
L'inspir appelle l'expir
Et l'expir entraîne l'inspir.
Ils sont présents vers le bas et vers le haut (respectivement).
Celui qui le sait est un expert en yoga.
La vie sort en faisant "ha"
Et rentre en faisant "sa".
La vie récite donc sans interruption
Ce mantra : "haṃsa, haṃsa".
La vie récite ce mantra sans interruption,
Vingt-et-un mille six cent fois
En un jour et une nuit. (5, 155-160)
Quand le souffle s'amenuise,
Le mental se résorbe.
Quand il devient homogène,
C'est ce que l'on appel "contemplation". (7, 5)
Tant que les les souffles n'entrent pas dans le canal du centre,
Tant que la semence n'est pas stabilisée par l'éveil des souffles,
Tant que la vision naturelle de l'espace ne surgit pas dans l'esprit,
Parler de "connaissance" n'est que bavardage mensonge et hypocrisie. (7, 15)
Quand les souffles
Entrent dans le flot du canal vide,
Vide de souffles,
L'expert en yoga déracine
Toutes les conséquences des actes passés.
Déesse !
Comment la connaissance pourrait-elle vivre dans l'esprit
Tant que le souffle et le mental vivent ?
Quand le souffle et le mental disparaissent,
L'homme atteint la liberté.
Il n'y a pas d'autre méthode. (7, 18-19)
Bhairavi !
Quand le mercure ou le souffle sont neutralisés (mūrcchita),
Ils sont un remède aux maladies.
Morts, ils donnent la vie.
Emprisonnés, ils offrent la vie céleste (khecaratā).
Le mental est le maître des sens.
Le souffle est le maître du mental.
La résorption est maîtresse des souffles.
Or, cette résorption dépend de la résonance (nāda). (7, 21, 22)
Quand l'expiration et l'inspiration des yogins
Ont cessé,
La saisie des objets cesse.
Immobiles, inactifs,
Ils se résorbent. (7, 25)
Le mental se résorbe
Là où se résorbe le souffle.
Le mental et le souffle sont inséparables,
Comme l'eau et le lait.
Quand le souffle s'élance,
Le mental s'élance dans l'action.
Quand il se détend,
Le mental se détend.
Anéantir l'un,
C'est anéantir l'autre.
Puisque l'activité de l'un
Est celle de l'autre. (7, 32-33)
Celui dont le regard est fixe
Sans même un objet,
Dont le souffle est immobile
Sans effort,
Dont l'esprit est stable
Sans point d'appuis,
Lui seul est un vrai maître,
Digne d'être servi.
Quand le souffle
Ne sort ni n'entre
A droite et à gauche,
Alors il s'élance vers le haut
Dans la voie du milieu.
Alors on est libre,
Sans aucun doute. (10, 35, 36)
En ce qui concerne l'attention au souffle, connaissez-vous le livre "satipatthâna, la voie du bonheur" de Robert Kientz ? Il s'inscrit dans la tradition du bouddhisme Theravada mais c'est un témoignage concret et criant de vérité de jusqu'où peut nous conduire l'attention à l'Inspir-Expir, Ānāpānasati en Pâli, c'est -à-dire très loin... Cet ouvrage m'avait passionné et je l'avais trouvé très motivant pour la pratique. Le spirituel, c'est le souffle... Je n'ai jamais pu envisager une pratique spirituelle où le souffle n'ait pas son mot à dire...
RépondreSupprimerNon, je ne connaissais pas. Merci.
SupprimerBonjour David,
RépondreSupprimerEst-il possible de lire quelque part cette Hatha-pradîpikâ en dix chapitres?
Cette version en dix chapitres a été publiée par l'Institut Lonavla : https://www.exoticindiaart.com/book/details/hatha-pradipika-of-svatmarama-with-yogaprakasika-commnentary-by-balakrsna-NAK789/
SupprimerMerci.
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