"Dites-moi, mon Époux,
ai-je mal parlé et mal pensé
quand je vous ai montré et fait comprendre
que je ne dois pas échapper à cette situation
de ne rien pouvoir exprimer de votre amour ?
En effet, la jouissance et la possession
que nous y prenons l'un et l'autre sont au-delà de toute explication,
car cela se passe en une vision et un repos
infiniment indicibles.
Elles ne peuvent être exprimées
par quelques idées représentatives,
élaborées ou infuses,
qui ne pourraient être qu'à une infinie distance
de ce qu'est notre union.
A quoi sert-il d'exprimer les choses-qui-sont
par les choses-qui-ne-sont-pas,
ou, pareillement, d'exprimer celles qui-ne-sont-pas
par celles-qui-sont ?
Car, dites-moi, ma Vie et mon Amour,
où est la vérité de tout ce qui se rapporte
à l'Objet qui me ravit de lui et en lui,
dans la plénitude de ce qu'il est,
plénitude dont je me sens déborder
plus abondamment qu'on ne peut le penser ?
Où est-elle cette vérité,
sinon en vous, qui êtes au-delà de l'être,
en l'éminence de l'être et en l'éminence du non-être,
en l'être et au-delà de l'être,
connu par la voie de la suréminente négation."
Jean de Saint-Samson, Epithalame, 15
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