A la fin de son Explication des maximes des saints sur la vie intérieure (1697), Fénelon résume en quelques phrases frappantes ce qu'est l'oraison du cœur, aussi appelée oraison de repos ou de silence, issue d'une longue lignée de mystiques, principalement franciscains, et qui connu son apogée au XVIIème siècle avant de disparaître, suite à la polémique du "quiétisme", dont ce texte est un des plus forts témoignages. Mais Fénelon perdit la bataille face à Bossuet, et Madame Guyon fut enfermée à la Bastille. J'ajoute quelques explications entre parenthèses :
"La sainte indifférence (n'est que le désintéressement de l'amour (un amour qui ne cherche pas de récompense).
Les épreuves ("croix" et "nuits") n'en sont que la purification (tout - c'est-à-dire Dieu - est présent dès le début).
L'abandon n'est que son exercice dans les épreuves (pratique du lâcher-prise à travers les aléas de la vie courante).
La désappropriation des vertus 'ne pas chercher volontairement les vertus) n'est que le dépouillement de toute complaisance, de toute consolation et de tout intérêt propre dans l'exercice des vertus par le pur amour (pas d'ego spirituel).
Le retranchement de toute activité (le "quiétisme") n'est que le retranchement de toute inquiétude et de tout empressement intéressé par le pur amour (abandon gratuit).
La contemplation n'est que l'exercice simple (sans pensées) de cet amour réduit à un seul motif (un élan pur).
La contemplation passive n'est que la pure contemplation sans activité ou empressement (se laisser aller dans la magie de la présence indéfinissable).
L'état passif, soit dans les temps bornés de contemplation pure et directe (les "séances de méditation"), soit dans les intervalles où l'on ne contemple pas (formellement), n'exclut ni l'action réelle ni les actes successifs de la volonté (écrire une lettre, lire, parler, etc.), ni la distinction spécifique des vertus par rapport à leurs objets propres (une conduite morale), mais seulement la simple activité ou inquiétude intéressée (égotique). C'est un exercice paisible de l'oraison et des vertus par le pur amour ("pur" : sans pensées ni effort).
La transformation et l'union la plus essentielle ou immédiate n'est que l'habitude de ce pur amour qui fait lui seul toute la vie intérieure et qui devient alors l'unique principe et l'unique motif de tous les actes délibérés et méritoires. Mais cet état habituel n'est jamais ni fixe, ni invariable, ni inamissible (on peut toujours régresser)."
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